14.06 - France : Le procès de l'évêque
de Bayeux.
Lors de la première audience, le jeudi
14 juin, Mgr Pierre Pican, évêque de Bayeux-Lisieux, jugé pour ne pas
avoir dénoncé un prêtre pédophile, a fait son "mea culpa"
devant le tribunal correctionnel de Caen et a
admis "un manque d'investigations"de sa part.
Le procès doit
durer deux jours. L'évêque, mis en examen le 24 janvier 2000 pour "non-dénonciation
d'agressions sexuelles et non-dénonciation de mauvais traitements sur
mineurs de moins de 15 ans", encourt jusqu'à trois ans de prison. La
justice lui reproche de ne pas avoir informé les autorités judiciaires
et administratives des actes pédophiles commis de 1996 à 1998 par l'abbé
René Bissey, condamné le 6 octobre dernier à 18 ans de réclusion par
la cour d'assises du Calvados et qui sera rejugé avant la fin de l'année
à Rennes par la cour d'assises d'Ille-et-Vilaine.
C'est la première fois qu'un
évêque comparaît devant la justice française pour des faits concernant
la pédophilie. L'évêque a reconnu qu'il avait été prévenu en
1996 par son vicaire général, Michel Morcel, des actes de pédophilie
de l'abbé René Bissey. Cependant, s'il a admis avoir commis une "erreur
d'appréciation", il a aussi affirmé que si des faits similaires
se reproduisaient, il ne les dénonceraient pas.
Première personne appelée à la barre des témoins, le vicaire général
du diocèse a affirmé: "Dès que j'ai pris connaissance des actes
de pédophilie qui étaient reprochés à l'abbé Bissey, j'ai aussitôt averti
mon évêque et nous avons convenu de le rencontrer rapidement, ce qui
fut fait". Interrogé par le procureur de la République, Jacques-Philippe
Segondat, sur les mesures prises, le vicaire général a
répondu: "être proche de cet homme pour qu'il prenne conscience de ses
actes".
Dans l'après-midi, l'évêque de Bayeux a été longuement appelé à la barre
après l'audition de témoins de moralité.
A la fin de la prmière audience, les familles des victimes semblaient
exaspérées. "Il cherche encore son système de défense, il s'enfonce
dans ses réponses", a déclaré Daniel Rebillard, père d'une des victimes
de l'abbé Bissey, partie civile dans ce procès Pican. "On souhaitait
tous un peu de compassion qu'il n'a même pas eue pour les victimes".
En fin d'après midi, d'autres témoins de moralité sont passés à la barre,
notamment le cardinal Louis-Marie Billé, évêque de Lyon et président
de la conférence des évêques de France, qui ne s'est évidement pas exprimé
sur les faits, mais a reconnu que chaque cas de pédophilie ne se traitait
pas de la même manière.
Me Thierry Massis, l'un des trois avocats de Mgr Pican, a estimé que
l'évêque "suit un cheminement pastoral". "Mais ne nous trompons pas:
ce n'est pas lui le principal coupable. L'horreur, ce sont les agissements
de l'abbé Bissey", a-t-il déclaré à la sortie du tribunal.
Ce procès met en cause plus que les faits reprochés. Il
ne suffit pas balayer les faits au nom de la relation spécifique
entre un prêtre et un évêque. Il ne s'agit pas de
nier non plus la particularité de quelques professions pouvant
revendiquer un certain droit au secret, médecins ou responsables
de l'Education nationale.
Jamais la justice, ni en France ni ailleurs, n'est encore allée
aussi loin dans l'évaluation de "l'option de conscience",
juridiquement prévue dans la notion de "secret professionnel".
L'on touche là des questions éthiques fondamentales. Quoi
qu'il en soit, l'Eglise en France toute entière est concernée
par ce procès.
Pour plus d'informations : Conférence
des évêques de France
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