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10.09 - Les conclusions de la Conférence de Durban.

Un temps occultée par la question israélienne, la valeur symbolique de la déclaration finale de la Conférence mondiale contre le racisme n'en est pas moins fondamentale et pourrait constituer une première étape vers une nouvelle législation internationale.

Ni traité international, ni résolution onusienne, cette déclaration n'a certes aucune force juridique en soi et les gouvernements peuvent complètement l'ignorer. Ce type de déclaration établit une norme informelle sur laquelle peuvent s'appuyer les citoyens pour réclamer des changements dans leur propre pays. La conférence mondiale contre le racisme pourrait constituer une première étape vers une nouvelle législation internationale, affirment des experts. "Vous partez d'un principe, vous l'incluez dans une déclaration et un programme d'action et les gouvernements finissent par prendre des engagements sérieux", explique Michael Posner, directeur exécutif de la Commission des juristes pour les droits de l'homme, une organisation dont le siège est à New York. "Enfin, vous votez des traités et des lois qui deviennent obligatoires".

La porte-parole de la Conférence contre le racisme, Sue Markham, assure que la conférence de Durban a déjà innové en demandant aux gouvernements d'aborder -pour la première fois dans une rencontre internationale- la question du racisme dans leur pays, de la xénophobie et de l'héritage historique du racisme.

Pour la première fois aussi, les organisations non gouvernementales de défense de droits de l'homme ont eu la possibilité de participer à une conférence des Nations Unies contre le racisme. Les victimes du racisme et les militants des droits de l'homme ont passé trois années à préparer la réunion de Durban. Des dizaines de millions de dollars ont été investis dans les conférences préparatoires.

Les organisations présentes en Afrique du Sud durant cette semaine ont dressé la liste des personnes touchées par le racisme, réclamant une reconnaissance internationale de leurs plaintes, à l'image des Noirs américains qui demandent des réparations pour l'esclavage, les Roms (Tsiganes) une garantie de leurs droits, et les membres des basses castes en Asie du sud une reconnaissance des discriminations dont ils souffrent.

Les Européens se félicitent d'avoir permi, par leur médiation, d'éviter une mise en accusation sur la question de l'esclavage. La Conférence note que certains Etats ont pris l'initiative de présenter des excuses et ont payé des compensations. Mais la déclaration finale ne crée pas de lien direct entre la dénonciation et d'éventuelles réparations aux descendants des victimes.

Tous espèraient qu'un paragraphe les concernant dans la déclaration finale leur apportera une légitimité à laquelle se raccrocher pour défendre leur cause dans leur pays. C'est la raison pour laquelle les Palestiniens, soutenus par leurs alliés arabes, se sont si durement battus pour la condamnation d'Israël et du sionisme et que les Etats-Unis et l'Etat hébreu ont quitté la conférence en voyant que ce texte risquait d'être adopté.

La Conférence reconnaît avec une profonde inquiétude la montée de l'antisémitisme et de l'islamophobie dans difféents pays du monde. Israël accueille comme une victoire cette déclaration :"C'est une défaite cuisante pour la Ligue arabe, dans la mesure où sa majorité systématique s'est effondrée."

Mais également la Conférence reconnait le droit inaliénable du peuple palestinien à l'autodétermination et à la création d'un Etat indépendant ayant droit à la sécurité.

Mais il y a aussi des "oubliés". Les populations indigènes, qui ne disposent pas d'appuis dans les Grandes puissances internationales se sont senties marginalisées. Les dalits, les intouchables indiens ressentent mal la déclaration finale où leur voix n'a pas été véritablement entendue.

Les Etats-Unis se sont mis hors du jeu, faisant d'Israël leur otage. Mais la vraie raison n'est pas dans le conflit israélo-palestiniens, mais le débat sur les réparations de l'esclavage que les Etats-Unis ont voulu à tout prix éviter.

"Le retrait américain est un coup dur, surtout pour les Américains et n'affaiblit pas la portée du document final", a déclaré un représentant africain, qui ajoute : "si un document consensuel solide émerge et que les Européens l'approuvent, il peut avoir une influence positive."

Les Quinze de l'Union européenne ont pesé de tout leur poids pour que la Conférnce de Durban parvienne à ce compromis final. L'ayant obtenu, ils entendent bien avoir un rôle croissant sur la scène diplomatique sans avoir l'ambition de se passer des Américains.

Le programme que Jean Paul II et son représentant permanent à l'ONU souhaitaient voir se réaliser à Durban est peut-être imparfait. Mais il existe.


Pour le texte de la Déclaration doit paraître en français sur le web :
http://www.unhcr.ch/french/html/racism

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