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du 6 au 12 juillet 2010 (semaine 27)
 

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2010-07-12 -
QUAND LES JUGES S'IMPROVISENT THÉOLOGIENS

En Belgique, ils perquisitionnent les tombes des évêques. Aux Etats-Unis, ils appellent le Pape à la barre. Un tournant, dans la culture juridique et dans la pratique des tribunaux. Le vaticaniste Sandro Magister rejoint l 'analyse de Pietro De Marco .

En ce début d’été, un nouvel acteur, le juge, est entré en scène à grand fracas dans le drame de la pédophilie. Le 24 juin, en Belgique, des forces de police ont procédé, sur ordre de la magistrature, à des perquisitions portant sur des personnes et des lieux essentiels pour l’Église de ce pays : l'archevêché de Malines-Bruxelles alors qu’y étaient réunis les évêques, le domicile du cardinal Godfried Danneels et le siège de la commission indépendante créée par l’Église de Belgique pour enquêter sur les abus sexuels. Les enquêteurs y ont saisi 475 dossiers, dont beaucoup concernant des victimes qui s’étaient adressées à cette commission plutôt qu’à la justice civile pour protéger leur vie privée.

De plus, le même jour, à la cathédrale Saint-Rombaut de Malines, les tombes des cardinaux Désiré-Félicien Mercier, Jozef-Ernest Van Roey et Léon-Joseph Suenens ont été violées, dans une vaine recherche de preuves présumées de la complicité de l’Église belge dans les abus sexuels.

Le 29 juin, aux États-Unis, la Cour suprême a en revanche refusé d’examiner la requête du Saint-Siège tendant à empêcher la mise en cause des plus hautes autorités vaticanes, en tant qu’accusés, dans un procès qui a lieu dans l'Oregon pour abus sexuels commis par un religieux.

Par conséquent, la Cour suprême a renvoyé le jugement à un niveau inférieur, en l’espèce la Cour d’appel fédérale de l'Oregon. Théoriquement, donc, ce tribunal pourrait confirmer la mise en cause, comme accusés, de Benoît XVI, de son Secrétaire d’État, le cardinal Tarcisio Bertone, du préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le cardinal William Levada et du nonce apostolique aux États-Unis, l'archevêque Pietro Sambi.

Cela deviendrait possible au cas où la cour de l'Oregon déciderait que le religieux auteur des abus sexuels, mort en 1992, était un "employé du Saint-Siège".

Qu’on en arrive à ce point, c’est-à-dire à traduire le Pape en justice pour les crimes commis par un de ses "employés", c’est peu probable. Mais que, tôt ou tard, une Cour s’arroge le droit de définir selon ses critères propres ce qu’est l’Église et quelles relations la hiérarchie a avec ses "employés" n’est plus une hypothèse à exclure absolument.

En ce sens, les perquisitions ordonnées par la magistrature belge – qualifiées de "brutales" par le ministre belge de la justice, Stefaan De Clerck, lui-même – ne sont pas rassurantes du tout. Dans ce cas, l’Église a été considérée comme un clan mafieux.

En Belgique et aux États-Unis, mais aussi un peu partout, se manifeste une tendance croissante à juger la nature et l'organisation de l’Église en ne tenant pas compte de ce qu’elle est et de son organisation originale et particulière, qui est également entrée dans la meilleure culture juridique et a été reconnue par des accords de valeur internationale.

Le souhait exprimé plusieurs fois par les autorités de l’Église, que la justice civile et la justice canonique opèrent chacune dans son domaine pour lutter contre les abus sexuels commis par le clergé, ne se traduit donc pas toujours par une coopération pacifique et fructueuse.

L’Église, depuis quelque temps et surtout grâce à l’impulsion de Joseph Ratzinger cardinal et pape, fait beaucoup pour corriger ses fautes et omissions. Mais la justice civile doit elle aussi faire mieux. Ses essais en ce domaine ont souvent été décevants au cours des dernières décennies. Mais si aujourd’hui elle abusait de son pouvoir en s’attribuant des compétences et des rôles qui ne lui reviennent pas et en agissant en conséquence, elle ferait pire encore, conclut Sandro Magister. (source : Chiesa)


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