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Du 23 au 27 novembre 2010 (semaine 47)
 

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2010-11-27 - Pakistan
ON ATTEND LA DÉCISION PRÉSIDENTIELLE

Le sort d’Asia Bibi, condamnée à mort pour blasphème, est toujours suspendu à une décision présidentielle et malgré une importante mobilisation internationale, attend toujours en prison de savoir si elle pourra bénéficier de la grâce présidentielle.

Le 8 novembre, Asia Bibi, une chrétienne, âgée d'une quarantaine d'année et accusée d’avoir blasphémé contre le Prophète Mahomet, avait été condamnée à mort par pendaison par le tribunal de Sheikhupura au titre de la loi anti-blasphème, devenant ainsi la première femme condamnée à la peine capitale au Pakistan pour ce motif .

Les chrétiens du Pakistan, relayés par de nombreuses communautés catholiques et protestantes dans le monde, la plupart des ONG et organisations de défense des droits de l’homme, ainsi que, ces derniers jours, différents Etats et des institutions internationales, ont vigoureusement condamné la sentence de mort, ainsi que la loi anti-blasphème à l’origine de celle-ci.

Mais les pressions internationales n’ont pour le moment pas abouti, contrairement à ce qu’ont pu indiquer des rumeurs récentes sur la libération ou la grâce présidentielle qui auraient été accordées à Asia Bibi.

Des rumeurs qui trouvent leur origine très probablement dans les dernières démarches menées en faveur de la condamnée par le ministre des Minorités, Shahbaz Bhatti, et le gouverneur de la province du Pendjab, Salman Taseer, lequel a rendu visite à Asia Bibi dans sa prison samedi 20 novembre. La chrétienne lui a remis à cette occasion une demande de grâce à transmettre au président Asif Ali Zardari.

A l’issue de son entretien avec Asia Bibi, le gouverneur avait fait part sur la chaîne CNN de son espoir que la jeune femme puisse être graciée par le président. L’étude du cas de la jeune chrétienne avait été également confiée à Shahbaz Bhatti, ministre des Minorités, qui avait jugé « sans fondements » les accusations portées à l’encontre d’Asia Bibi, soupçonnant une « affaire montée de toutes pièces » contre une femme « innocente ».

Ashiq Masih, mari d’Asia Bibi, a reçu de nombreuses menaces de mort et doit cacher sa famille dans un lieu tenu secret. : « Nous avons peur, nous recevons des menaces, surtout de religieux musulmans. Avec les organisations chrétiennes qui luttent pour la libération de la jeune femme, il a également demandé que le gouvernement assure la protection d’Asia Bibi dans sa prison, les exécutions extrajudiciaires et les meurtres inexpliqués en détention de chrétiens condamnés pour blasphème n’étant pas rares.

Toujours à la suite de la propagation des rumeurs de libération de la chrétienne, les principales organisations islamiques ont commencé ces jours derniers à rassembler leurs militants dans les grandes villes du pays et multiplient les manifestations, menaçant le gouvernement de provoquer des émeutes au cas où Asia Bibi devait échapper à sa sentence de mort. Les avocats des cours des districts de Sheikhupura et de Nankana ont fait grève le 23 novembre contre la demande de grâce et de nombreux mouvements et partis islamiques ont fait des déclarations rappelant qu’il n’y avait pas de pardon possible pour une faute aussi grave.

Mgr Lawrence Saldanha, archevêque catholique de Lahore, a confié son inquiétude: "En ce moment, nous sommes préoccupés par le climat d’intolérance croissante. La tension s’est accrue, les manifestations et appels des groupes islamiques radicaux qui veulent raviver les communautarismes se succèdent. Nous espérons que la mission du cardinal Tauran pourra rasséréner les esprits et contribuer à résoudre le cas d’Asia Bibi ."

Le cardinal Jean-Louis Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, arrivé au Pakistan ce 25 novembre, prévoit en effet d’intervenir dans cette affaire au sujet de laquelle le pape Benoit XVI avait exprimé sa préoccupation en audience publique, le 17 novembre dernier.

C’est malgré tout l’incertitude qui domine aujourd’hui concernant le sort d’Asia Bibi et l’attente risque probablement de se prolonger de longs mois si l’on en croit les déclarations sur CNN, le 20 novembre, du porte-parole du président du Pakistan, Farhatullah Babar : « Asia ne peut être exécutée pour le moment ni graciée. Selon la loi, la sentence doit d’abord être confirmée par la Haute Cour. »

Mgr Joseph Coutts, évêque de Faisalabad et vice-président de la Conférence épiscopale du Pakistan, commentent ainsi la situation des chrétiens au Pakistan : " Les chrétiens souffrent parce qu’au cours des dix dernières années l’intolérance religieuse s’est accrue dans le pays. Les données de la Commission « Justice et Paix » et les rapports des principales ONG concordent.

" L’intolérance frappe les communautés chrétiennes, les autres minorités religieuses mais aussi les groupes de fidèles musulmans modérés, comme ceux qui fréquentent les sanctuaires soufis, souvent victimes d’attaques terroristes. Des leaders connus et des intellectuels musulmans modérés ont été tués ou séquestrés. Il est urgent qu’une telle question soit inscrite à l’agenda du gouvernement et que des mesures adéquates soient adoptées.

" La lutte contre les groupes radicaux, qui voudraient imposer par la violence la « charia » selon l’interprétation wahhabite de l’islam, est aujourd’hui une priorité pour le pays. Nous sommes également impliqués dans l’urgence du terrorisme au niveau régional et international.

" En tant que chrétiens, une petite minorité, nous continuons à promouvoir la paix , la justice, le dialogue et l’harmonie. Mais également à défendre et à soutenir les valeurs telles que la démocratie, l’Etat de droit, la liberté de conscience et de religion et tous les droits inaliénables de l’individu, pour le bien du Pakistan qui est notre Patrie." (source : Fides et EDA)


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