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FlashPress - Infocatho
du 6 au 9 août 2011 (semaine 32)
 

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9 août 2011- Nigeria
QUEL DIALOGUE INTERRELIGIEUX
DANS LA SITUATION ACTUELLE

" Je n’ai jamais connu au Nigeria, déclare Mgr Onaiyekan, un moment où nous avons combattu sur la question de savoir si Jésus est ou n’est pas Dieu, ce qui constitue pourtant une différence théologique majeure entre chrétiens et musulmans.

" Nous n’avons jamais combattu pour cela, et nous ne nous sommes jamais querellés sur la question de savoir si Mahomet est un vrai prophète ou pas. Nous avons lutté pour la terre. Nous nous sommes battus sur le nombre de ministres qui seront musulmans ou chrétiens. Nous avons lutté sur la question de savoir qui serait le chef de tel ou tel parti politique.

" Nous nous identifions très facilement comme chrétiens ou comme musulmans. Allez au Nigeria un dimanche, les églises sont pleines. Tout le monde va à l’église le dimanche. Si vous êtes chrétien et vivez avec un musulman, et que vous restez à la maison un dimanche, il vous demandera « pourquoi ne vas-tu pas à l’église ? Qu’est-ce qui t’arrive ? Tu as un problème ? » Et le chrétien dira la même chose à un musulman. C’est comme si l'identité était définie en termes d'appartenance religieuse. Ainsi quoique vous fassiez, cela est considéré comme chrétien ou musulman."

" Il existe naturellement, des deux côtés, des courants en très forte opposition. Certains courants islamiques sont convaincus que les chrétiens sont de mauvais croyants. Beaucoup de Nigérians regardent la télévision ou écoutent les sermons retransmis du Yémen par des chaînes islamiques.

" Il y a aussi des chrétiens qui disent des choses terribles sur les musulmans. Pour eux, le musulman qui va à La Mecque adore une idole, une pierre, et il ne pourra jamais même s’approcher du paradis, car Jésus a dit que si un homme ne naît d'eau et d'Esprit, il ne peut entrer dans le Royaume de Dieu.

" Quand quelqu’un déclare publiquement et directement ces choses avec des haut-parleurs aux musulmans, ceux-ci y voient une provocation. Mais encore une fois, il s’agit de petits groupes évangéliques.

" Notre Eglise n’enseigne pas cela. Quand ce genre d’échanges tourne à l’affrontement, c’est toute la communauté qui se trouve entraînée et c’est un grand problème.

" Parfois les journalistes sont paresseux. Ils ont déjà leur opinion toute faite sur la violence qui sévit au Nigeria, et il leur est plus facile de dire : 'Nous avons tout expliqué, il s’agit seulement de ces musulmans et chrétiens qui continuent à se battre'. Ils ne prennent pas la peine de chercher à en savoir un peu plus sur la véritable racine du problème."

" Parfois aussi cela dépend de qui rencontre le journaliste. Si on contacte une de ces personnes qui pensent que nous devons unir toutes les forces chrétiennes pour en finir avec ces musulmans une fois pour toutes, alors on vous donnera ce type de version. Les journalistes devraient dire : « Je dois mener une enquête. J’ai parlé avec quelqu’un dans la foule qui m’a dit ceci, mais ensuite je dois entendre beaucoup d’autres voix avant de pouvoir m’exprimer sur la question ».

"Pour moi, c'est l'évangile de saint Matthieu ch.25 qui exprime le mieux le christianisme dans le dialogue entre les musulmans et les chrétiens.

« J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais nu et vous m’avez vêtu, prisonnier et vous êtes venu me voir. L’homme demanda : 'Quand ai-je fait tout cela ?' Jésus répondit : 'Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait' ».

" Je ne vois aucun motif pour lequel ce passage devrait être interprété dans le sens : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères « chrétiens ». Non, pour moi, c’est le test décisif pour savoir qui on est vraiment : si on n’a pas été bon avec son prochain, on ne peut pas prétendre être agréable à Dieu. C’est une idée que l’on retrouve tout au long du Nouveau Testament. Sans mâcher mes mots, je dis à mes gens à Abuja : « Ecoutez, mes frères : c’est merveilleux d’être catholique et si vous êtes bon catholique vous aurez une grande récompense au paradis, mais je vous dis qu’on ne vous demandera pas votre certificat de baptême à la porte du paradis ».

En d’autres termes, Matthieu 25 ne dit pas : « Etes-vous baptisé ? A quelle Eglise appartenez-vous ? » La question va être : « Qu’avez-vous fait pour les pauvres ? » La parabole est très forte et j’attire l’attention des hommes politiques sur ce point aussi. Si vous êtes un homme politique et que vous pouvez donner à manger à ceux qui ont faim, mais que vous n’avez rien fait et vous avez passé votre temps à voler de l’argent, vous aurez à en répondre aux portes du paradis."

" Je suis convaincu, conclut à ce propos Mgr Onaiyekan, que non seulement la Bible nous aiderait à entretenir de bons rapports avec le monde islamique, mais aussi que le monde islamique devrait tirer de ses propres ressources spirituelles les éléments qui aideraient à soutenir les efforts du dialogue interreligieux.

" Je dis toujours à mes collègues et frères musulmans que si nous devions chercher des passages de la Bible où il est question de combat, nous en trouverions en abondance également chez les chrétiens. Il nous suffirait d’ouvrir Josué, les Juges pour voir comment Dieu combat pour les siens et détruit l’ennemi. Je pourrais me référer à ce texte, mais je ne le fais pas car j’ai d’autres textes qui m’encouragent à vivre en paix avec tous.

" Jésus est venu et est mort pour toute l’humanité, ce qui signifie pour moi que tous sont mes frères et mes sœurs." (source : COMECE)


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