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du 17 au 20 avril 2012 (semaine 16)
 


- 20 avril 2012 - Turquie
UN TIMIDE ET DIFFICILE RETOUR SUR LEUR TERRE

Encouragées à demi-mot par le gouvernement, une quarantaine de familles de culture syriaque se sont réinstallées dans la région du Tour Abdin, au sud-est de la Turquie. Mais les conditions de vie restent difficiles.

Ces syriens-orthodoxes furent contraint à un exode massif par le gouvernement, après la seconde guerre mondiale.

C’est avec fierté que Yakop Gabriel ouvre les portes de sa fabrique de vin. Situé à la sortie de la ville de Midyat, le bâtiment de pierres de taille se repère de loin. « Nous produisons 150.000 bouteilles par an », explique le quinquagénaire souriant qui souhaite relancer la tradition viticole dans cette région du Tour Abdin, la « Montagne des serviteurs de Dieu », centre spirituel du monde chrétien syrien-orthodoxe.

Après vingt-trois années d’exil en Suisse, il est rentré au pays en 2002, en famille. " Nous étions les premiers chrétiens à revenir pour de bon. Nous étions suivis et surveillés. Les difficultés ont été nombreuses mais nous ne regrettons rien. Car nous sommes les habitants de cette terre."

La présence syriaque sur ces terres rocailleuses et sauvages est bien antérieure à celle des Kurdes, Turcs et Arabes aujourd’hui majoritaires. Par ses églises et monastères, en ruine ou en état, chaque village rappelle l’importance de cette communauté utilisant la langue du Christ, l’araméen, pour la liturgie et qui, d’après le P. Gabriel Akyüz, de Mardin, comptait près de 60.000 membres dans les années 1970 contre à peine 3 000 aujourd’hui.

Le départ de ces chrétiens orientaux, rattachés au patriarche d’Antioche installé en Syrie, a débuté en 1895. Il s’est amplifié lors des massacres de la première guerre mondiale.

Après la mise en place en 1942 d’un impôt visant les chrétiens, les problèmes économiques dans les années 1960, et le conflit provoqué par la guérilla du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), l’exode s’intensifia dans les années 1980-1990.

Dans chaque village du Tour Abdin, on constate le retour de quelques chrétiens, retraités ou couples avec enfants. Sans compter les centaines de vacanciers syriens-orthodoxes qui, chaque été, rénovent leurs maisons ou en construisent de nouvelles.

Beaucoup avaient émigré en Suisse. "En Suisse, tout était facile", reconnaît Yacop Gabriel, face à une cheminée où trône un crucifix. « Mais cela ne suffit pas lorsqu’on ne se sent pas chez soi. Notre amour de la patrie nous a fait revenir. »

Dans le village voisin, des cours de syriaque sont dispensés par l’Église, mais le dernier lycée communautaire a fermé ses portes en 1926. Le P. Gabriel Akyüz demande sa réouverture. Pour ce prêtre, le retour d’exilés européens est un phénomène « important ». « Avant, les syriens-orthodoxes se considéraient comme chrétiens dans un pays musulman. Lorsqu’ils sont arrivés en Europe, ils ont développé un sentiment national et ont décidé de rentrer chez eux. Leur identité chrétienne est passée au second plan. »

Un syriaque a été élu député en juin 2011. Longtemps absents de la scène politique, les syriens-orthodoxes ont fait entendre leur voix dans l’actuel travail constitutionnel. Toutefois, face aux fantasmes qu’éveille dans cette région très conservatrice l’idée d’un afflux de chrétiens, la communauté refuse de trop rendre publics ces retours.(source : AP)


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