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du 22 au 29 juillet 2012 (semaine 30)
 

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29 juillet 2012 -
PEUT-ON VOIR LE MONDE SEULEMENT À PARTIR DE ROME ?

Étonnement à Rome. Le nouveau préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi fait l’éloge de la théologie de la libération. Cela demande quelques précisions. Mgr Müller s'en explique dans "L'Osservatore Romano" du 26 juillet.

Le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi est un personnage clé de la Curie romaine, puisqu’il se trouve à la tête du « ministère » du pape compétent pour les questions théologiques de foi et de morale. Il l’est encore plus lorsque le pape est lui-même théologien, et fut de longues années à la tête de cette même Congrégation.

Or, nouveau titulaire depuis le 2 juillet, Mgr Gerhard Müller, très proche de Benoît XVI, a suscité certaines interrogations, notamment du côté des milieux plus traditionnels de l’Église, du fait de ses liens avec le théologien de la libération Gustavo Gutiérrez. La publication d’un long entretien du nouveau préfet, dans l’Osservatore Romano, lui donne l’occasion de s’expliquer.

Ses propos paraissent novateurs. En fait Mgr Müller parle de son expérience. Invité en 1988 à participer en Amérique latine à un séminaire avec Gustavo Gutiérrez, y est d’abord allé avec certaines réserves, puis a ensuite été conquis : « J’ai pu constater qu’il fallait faire la distinction entre une théologie de la libération erronée et une autre correcte. Je considère que toute bonne théologie concerne la liberté et la gloire des fils de Dieu. »

Certes, « le mélange de la doctrine d’une auto-rédemption marxiste avec le Salut donné par Dieu doit être rejeté » . Mais il poursuit : « Comment pouvons-nous parler de l’amour et de la miséricorde de Dieu face à la souffrance de si nombreuses personnes qui n’ont ni nourriture, ni eau, ni soins, qui ne savent pas comment offrir un avenir à leurs enfants, là où la dignité humaine est absente, là où les droits de l’homme sont ignorés par les puissants ? »

Mgr Müller est direct. La théologie de la libération part en effet de l’expérience de pauvreté et d’exploitation vécue, et affirme qu’il est vain de parler de Salut et de libération en Jésus-Christ si l’on ne donne à ces mots une signification immédiate.

Il entend ainsi clarifier la réalité. Il faut distinguer deux textes de la Congrégation pour la doctrine de la foi concernant la théologie de la libération.

Le premier, en 1984, mettait fermement en garde contre l’utilisation de la pensée marxiste. Le second, en 1986, traçait au contraire une voie pour une telle théologie, dans la tradition chrétienne.

Et Mgr Müller quitte alors les cieux romains. Dans les milieux romains de la Curie, le terme reste souvent considéré comme a priori suspect. Mgr Müller replace donc cette théologie dans un cadre plus universel, dans le cadre plus large de la doctrine sociale de l’Église.

Lui-même, « fils d’un simple ouvrier d’Opel », à Mayence, a été influencé par l’héritage de Mgr Wilhelm von Ketteler, évêque de cette ville au XIXe siècle, précurseur de la doctrine sociale de l’Église.

Son expérience de la théologie de la libération n'est pas celle des rapports classés dans des dossiers par des "minutantes", des secrétaires qui ne voient le monde qu'à partir de Rome..."Le monde vu de Rome."

Il raconte avoir passé chaque année en Amérique latine deux ou trois mois, « dans des conditions extrêmement simples » : « Au début, avoue-t-il, pour un citoyen de l’Europe centrale, cela demandait un gros effort. Puis, quand on commence à connaître les personnes et à voir dans quelles conditions elles vivent, alors on accepte… »

Et c'est pourquoi, Mgr Müller a collaboré à l’écriture d’un livre sur la pauvreté et la théologie de la libération avec le P. Gutiérrez en 2004. (source : AP)

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