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du 9 au 12 août 2013 (semaine 32)
 

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12 août 2013 -
L'ÉGLISE VUE NON PAS DE ROME MAIS D'APARECIDA


Dans son éditorial du 10 août, Lucetta Scaraffia, éditorialiste à L'Osservatore Romano, écrit :" A quelques jours de distance on peut réfléchir plus calmement sur le voyage du Pape François au Brésil et en lire les multiples significations."

" En premier lieu, on est frappé par une ressemblance avec le pontificat de Benoît XVI: pour Joseph Ratzinger aussi, en effet, le premier voyage international a lieu pour une journée mondiale de la jeunesse, à Cologne, et lui offre l’occasion de retourner dans son pays natal, en Allemagne. Aujourd’hui toutefois, il ne s’agit pas seulement d’un pays, mais d’une partie du monde et le sens de nouveau départ est encore plus fort, du moment qu’il s’agit d’une terre très éloignée de Rome.

" Pour le Pape François, la participation à la journée mondiale de la jeunesse constituait aussi la dernière occasion d’obtempérer à un engagement pris par son prédécesseur: à présent, en effet, les voyages ne seront plus que les siens. Mais le destin — dans l’optique de la foi, l’Esprit — a voulu que le dernier acte lié à Benoît permette à François d’ouvrir l’avenir, en révélant le document programmatique de son pontificat qui, pour la première fois dans l’histoire, est né et a été expérimenté sur un continent différent de l’Europe, par des évêques qui avaient face à eux des problèmes bien différents de ceux du monde dit «avancé»: le programme d’Aparecida.

" Si à Lampedusa, le Pape avait déjà parlé d’une mondialisation mauvaise, à laquelle il faut répondre par une mondialisation bonne, depuis le sanctuaire d’Aparecida, ce choix positif prend corps et âme. L’Eglise catholique — comme l’indique son nom même, qui signifie «universel» — s’y entend en mondialisation depuis près de deux mille ans, mais cette fois, tout en restant à Rome, François a déplacé le point de vue depuis lequel l’Eglise doit regarder, et il s’agit d’une révolution stratégique importante.

" Bien sûr, à beaucoup d’Européens cela peut sembler un nouveau déclassement du «vieux continent», mais il ne faut pas fermer les yeux devant la nécessité de répondre à une mondialisation qui porte partout une culture de l’utilité et du profit, élaborée par l’Occident, qui a fait perdre de vue la place centrale de l’être humain. Et la réponse catholique peut advenir uniquement en trouvant des ressources du côté des victimes de cette mondialisation. Qui voient bien entendu le monde d’une autre manière, qui indiquent d’autres nécessités primaires, qui agissent avec un souffle de renouveau dans un monde qui semblait affronter la crise économique de manière aveugle et immobile.

" Quelque chose de semblable est advenu déjà à l’époque de la Réforme, lorsque la découverte de l’Amérique puis les voyages en Asie ont ouvert d’immenses espaces d’évangélisation au catholicisme qui était en train de perdre une partie de l’Europe. Puis à nouveau au XIXe siècle, lorsque l’Eglise agressée par la Révolution française, les nationalismes et les libéralismes, a trouvé une nouvelle vie dans les missions, qui s’étendaient grâce aux moyens de transport modernes et donnaient l’occasion de témoigner jusqu’au bout de la fraternité chrétienne.

" Tandis que le colonialisme s’exprimait sous forme de racisme à l’encontre des peuples conquis, l’Eglise catholique, en effet, ouvrait la carrière ecclésiastique d’abord à des asiatiques puis à des africains, avec pour résultat de se retrouver, au cours du XXe siècle, être la seule institution qui pouvait compter dans toutes les régions du monde sur une élite locale. Et plus d’un siècle auparavant, tandis que les responsables occidentaux visitaient la France et l’Angleterre ou tout au plus les Etats-Unis, le futur Pie IX voyageait pendant plus de deux ans en Amérique du Sud, en se faisant une idée précise des conditions de ce monde.

" La dimension mondiale est celle qui a toujours sauvé l’Eglise, elle lui a donné le souffle nécessaire pour penser en grand, et sur le long terme. Tel est l’unique façon d’échapper, sans perdre sa propre identité, à l’autoréférentialité qui a été reprochée à la culture catholique européenne des dernières décennies. Le signal que le Pape François a lancé depuis Aparecida est nouveau, mais c’est aussi un retour au passé le plus glorieux de l’histoire de l’Eglise, lorsque cette institution savait respirer à pleins poumons, et librement. (source : Osservatore romano)


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