- 30 septembre 2015 -Népal
LA LIBERTE RELIGIEUSE FORTEMENT RESTREINTE
Le 16 septembre, l’Assemblée constituante du Népal a voté, à la très forte majorité de 507 voix sur un total de 601, une nouvelle Constitution pour le pays, mettant ainsi un terme à un laborieux et délicat processus entamé il y a huit ans.
Le nouveau texte, qui entrera en vigueur ces jours-ci,, affirme le caractère laïc (secular) des institutions népalaises, tout en encadrant sévèrement la liberté religieuse, notamment la liberté de changer de religion des près de 28 millions de Népalais, dont 80 % sont hindous.
Dans cet ancien royaume hindou, la laïcité de l’Etat avait été adoptée en 2007, un an après l’abolition de la monarchie et au terme d’une décennie de guerre civile entre les forces armées gouvernementales et la guérilla maoïste. Mais, depuis cette date, l’incertitude se maintenait quant à la forme que prendraient les futures institutions népalaises.
La pression exercée par les partis pro-hindous était forte et s’ajoutait aux innombrables difficultés – notamment celles relatives au redécoupage du pays en sept provinces – qui rendaient introuvable un accord entre les membres de la Constituante. Ce n’est qu’après le dramatique séisme meurtrier (quelque 8 000 morts) du 25 avril dernier que, pressés par la population, les principaux partis politiques représentés au Parlement sont parvenus à un accord, accord conclu en août dernier et qualifié par les Népalais d’« historique ».
Le 14 septembre, ils ont rejeté par plus des deux tiers, un amendement présenté par un parti hindouiste qui proposait de déclarer le Népal : « Etat hindou ».
La nouvelle a été accueillie positivement par les responsables de l’Eglise catholique locale (laquelle rassemble une communauté d’à peine 8 000 fidèles). « La laïcité n’est pas qu’une question religieuse. C’est une valeur qui induit la liberté religieuse et l’égalité de traitement entre toutes les religions », a ainsi commenté le P. Silas Bogati, vicaire général du vicariat apostolique du Népal,.
Du côté des partis hindouistes, les commentaires diffèrent. L’amendement rejeté le 14 septembre était présenté par le Rastriya Prajatantra Party-Nepal, quatrième formation par ordre d’importance représentée à la Constituante. Le jour du vote, des militants hindouistes manifestaient devant le Parlement pour faire pression sur les députés.
A l’issue du vote, Madhav Bhattarai, président pour le Népal de l’organisation hindouiste indienne Hindu Janajagruti Samiti (Comité pour la renaissance hindoue), a déclaré que la décision des députés « heurtait les sentiments [de la majorité hindoue de la population népalaise] ». « Le Népal a laissé passer la chance de devenir le seul Etat hindou de la planète. C’est une décision contraire à notre identité », a ajouté le responsable hindouiste.
Enfin, si les responsables des minorités religieuses se disent soulagés de voir affirmé le caractère laïc de l’Etat, ils ne cachent pas leur inquiétude face à certaines dispositions inscrites dans la Constitution. Ainsi, la loi fondamentale stipule désormais que l’Etat doit sauvegarder le « Sanatan Dharma », terme souvent traduit par ‘Tradition primordiale’ et qui désigne l’essence de l’hindouisme.
De plus, l’article 31 de la Constitution inquiète – il a même été qualifié de « dangereux » par le P. Silas Bogati en juillet dernier. Si l’alinéa 1 de cet article pose le droit à la liberté religieuse comme un droit fondamental et si son alinéa 2 postule « le droit à abandonner la religion », son alinéa 3 est rédigé ainsi : " Toute incitation à troubler la paix publique, à agir pour convertir une autre personne d’une religion à une autre ou tout acte ou comportement visant à saper et à compromettre la religion de l’autre sont interdits et de tels actes sont passibles d’être sanctionnés par la loi. »
Dans ce contexte, a été annulée la tournée du cardinal Fernando Filoni, préfet de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, au Népal du 15 au 19 septembre, notamment pour témoigner de la proximité et de la solidarité de l’Eglise catholique aux Népalais meurtris par le séisme du 25 avril.
Officiellement, pour des motifs de sécurité. En fait sa venue à Katmandou aurait pu être comprise et dénoncée par les extrémistes hindous comme une manœuvre du Saint-Siège visant à empêcher la restauration de la religion hindoue comme religion d’Etat au Népal. (source : Mepasie)
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