- 20 février 2016 - Sri Lanka
LA RÉFORME PROVOQUE DE FORTES REMOUS
Annoncée le 9 janvier, la réforme de la Constitution crée des remous. Les minorités religieuses s'inquiètent notamment de la réaction des mouvements extrémistes bouddhistes aux changements proposés par le président Maithripala Sirisena.
Pour le président Sirisena, la réforme constitutionnelle est « indispensable » afin de faire face « aux nécessités du XXIe siècle » et pour « garantir que toutes les communautés du Sri Lanka vivent en harmonie ».
En s’exprimant devant le Parlement le 9 janvier, un an jour pour jour après avoir prêté serment à la suite des élections qui lui avaient donné la victoire sur le président sortant Mahinda Rajapaksa, le président a déclaré vouloir garantir que le pays ne replonge pas dans le conflit ethnique qui a fait plus de 100.000 morts entre 1972 et 2009.
« Les extrémistes du sud [majorité cinghalaise] et du nord [minorité tamoule] ont causé la perte de milliers de jeunes vies », a rappelé le président, affirmant vouloir « assurer la réconciliation et l’harmonie afin de ne jamais voir revenir la guerre ».
Une
« Assemblée constituante », formée de députés, et chargée de faire des recommandations pour une nouvelle Constitution. La nouvelle loi fondamentale devra donc renforcer les pouvoirs du Parlement et fixer le degré de dévolution du pouvoir qui sera consentie aux régions, afin de faire droit aux aspirations politiques des minorités tamoule et musulmane.
Mais, ce faisant, le président touche à une question particulièrement sensible, à savoir la place faite au bouddhisme dans les institutions de la nation. On ne sait pas encore si cette place « prééminente » du bouddhisme sera conservée mais des dispositions législatives sont annoncées afin de « réguler » le pouvoir du clergé bouddhiste.
Avant même que l’on connaisse ce que sera la future Constitution, les partis bouddhistes extrémistes donnent de la voix. « Nous demandons aux moines bouddhistes de boycotter les tribunaux de ce pays. Le gouvernement devra faire de chaque cocotier de cette nation une potence et transformer chacune de ses écoles en prison s’il veut supprimer le peuple bouddhiste cinghalais. »
Du côté des minorités religieuses, les réactions sont prudentes. Dans un pays qui compte 7 % de chrétiens et 10 % de musulmans, le retour au respect des pratiques démocratiques par le binôme Sirisena - Wicremesinghe est très bien accueilli, mais on attend de voir comment sera effectivement rédigée la future Constitution.
Pour l’archevêque catholique de Colombo, le cardinal Malcolm Ranjith, le Sri Lanka est à un tournant de son histoire et il appartient aux Sri-Lankais de cesser de se définir avant tout par leur appartenance ethnique ou religieuse.
Le 11 janvier, il fêtait le 150e anniversaire du Gnanartha Pradeepaya, le plus ancien journal catholique de l’île. « Nous devons quitter cette époque où nous nous pensions comme cinghalais, tamouls ou musulmans, ou bien encore comme bouddhistes, hindous, musulmans ou catholiques. Ce qui est attendu de nous aujourd’hui, c’est de ne pas donner dans les idéologies raciales et religieuses faites de haine et qui ne font que nous emprisonner dans les attitudes malheureuses du passé.
"
Les temps présents nous appellent à être suffisamment courageux pour bannir les partis politiques et les extrémistes qui fondent leurs manifestes sur des idéologies à base raciale et religieuse. Il est de notre responsabilité de protéger l’identité de la majorité en même temps que nous devons protéger les identités des différentes minorités [de ce pays] », a-t-il affirmé à cette occasion. (source : Mepasie)
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