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Du 14 au 18 mai 2017 (semaine 20)
 


- 18 mai 2017
- Irak
MOSSOUL, C'EST FINI, DISENT LES CHRETIENS

“ Pour nous les chrétiens, Mossoul c’est fini. Nous n’y retournerons pas”. Le ton du Père Emmanuel, curé du camp de réfugiés d’Ankawa à Erbil, est définitif.

" Malgré leur présence séculaire, les chrétiens n’ont plus leur place dans la deuxième ville d’Irak encore en partie occupée par les djihadistes de l’Etat islamique. Dans ce contexte, libérer Mossoul ne sert pas à grand-chose.” 5’000 chrétiens vivent aujourd’hui dans ce camp de réfugiés, en bordure de la capitale du Kurdistan d’Irak, dont le prêtre a la responsabilité.

Quelque chose s’est irrémédiablement cassé avec nos compatriotes musulmans, déplore le Père Emmanuel. “Nous voulons rester dans le pays. Mais si la majorité musulmane ne veut plus de nous, que pouvons-nous faire ? Les musulmans ne connaissent pas l’amour du prochain surtout si celui-ci est d’une autre religion.

" Et il est très improbable qu’ils acceptent de restituer les biens des chrétiens dont ils se sont emparés.”

Le curé a abandonné Mossoul dans la précipitation avec les 500 familles de sa paroisse le 10 juin 2014 devant la poussée des djihadistes. Leur fuite les a d’abord conduits à Qaraqosh, à une trentaine de kilomètres, de la métropole du nord de l’Irak, et dans les villages de la plaine de Ninive.

Deux mois plus tard, un nouvel assaut les repousse jusqu’à Ankawa, le quartier chrétien d’Erbil, la capitale du Kurdistan d’Irak.

“ Il y avait des gens partout dans les églises, les squares, les rues, les jardins de maisons privées, sous des tentes de fortune et des bâches, sans eau et sans latrines”.

Le Père Emmanuel n’est pas de ceux qui baisse les bras. Il se démène pour nourrir ses gens et monte des cantines où il distribue 250 kilos de riz par jour. Après trois mois sous la tente autour de l’église saint Simon, il obtient finalement l’autorisation d’installer un camp à Ashti, sur un vaste terrain vague occupé par quelques hangars et des poulaillers. Avec l’aide des organisations internationales, une cité de containers se monte et le camp d’Ankawa – Ashti 2 ouvre le 10 avril 2015.

La petite sœur de Jésus qui a accompagné l’exil des chrétiens de Mossoul et de Qaraqosh, reçoit dans son container en bordure du camp. Les 9 mètres sur 3 se partagent entre une chambre à coucher qu’elle occupe avec une consoeur, un petit séjour, et, au centre, une cuisinette avec un wc-douche, avec l’eau courante et l’électricité.

Devant la porte, sous une véranda abritée par une tôle, un petit rosier blanc égaye le paysage. A quelques mètres, un treillis marque la limite du camp qui n’est cependant pas fermé, chacun étant libre d’en sortir ou d’y entrer à son gré. La sécurité est assurée par quelques gardes en uniforme placés sous l’autorité des peshmergas kurdes.

Le camp est placé sous la responsabilité de l’Eglise chaldéenne. A priori ni le gouvernement central de Bagdad, ni le gouvernement du Kurdistan n’y interviennent. Sécurité, propreté, calme donnent l’apparence d’une vie paisible. Mais la situation n’est de loin pas rose pour les réfugiés. Dépressions, maladies, alcoolisme, toxicomanie, prostitution… les sœurs travaillent surtout comme assistantes sociales. Alors quitter le pays est la seule perspective

Les traumatismes se cicatrisent peu à peu, mais les gens restent des réfugiés, explique le Père Emmanuel. En Irak, les chrétiens, souvent bien formés, n’étaient pas les plus pauvres. Ceux qui survivent à 7 ou 8 dans les 27m2 de leur container avaient parfois de grandes villas.

Ils étaient propriétaires agricoles, commerçants ou entrepreneurs. Ils n’ont plus rien. Pas une famille que la guerre n’a pas disloquée. Sans projet, sans organisation, il n’est même pas question d’envisager rentrer chez soi, même si les terroristes de Daech sont chassés.

L’Eglise cherche bien à encourager le retour, mais sans sécurité personne ne veut s’y risquer. Leur unique perspective est de quitter le pays pour un avenir incertain, loin de leur terre natale. (source
: Chrétiens orientaux)

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