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du 3 au 10 août 2008 (semaine 32)
 

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2008-08-10 - Bolivie
LE COUP DE POKER DU PRÉSIDENT MORALES

Le président bolivien Evo Morales, son vice-président Alvaro Garcia, ainsi que huit des neuf préfets ou gouverneurs des départements boliviens, pour la plupart opposés au gouvernement central, joueront à quitte ou double leur carrière politique.

Le 10 août, lors du référendum révocatoire, les perdants remettront ni plus ni moins leur mandat. Evo Morales sait qu'il peut tout perdre dans cet exercice démocratique. Mais aussi ce qu'il peut gagner: le départ possible de ses plus farouches opposants, pour certains du moins.

Surtout, le président bolivien verrait sa légitimité renforcée, pour mener a bien son projet de nouvelle Constitution, constamment bloquée par l'opposition, mais aussi les réformes, agraires, qui font grincer des dents les gros propriétaires des départements du sud sécessionniste de la Bolivie.

Jugeant illégal pour vices de forme et de fond le projet de nouvelle Constitution socialiste et indigéniste du président Morales, le département de Santa Cruz, le plus vaste et le plus riche de Bolivie en hydrocarbure et en agro-alimentaire, a en effet plébiscité le 4 mai par 85,6% de oui son autonomie régionale. Les départements de Pando, Beni et Taija - lequel recèle 85% des réserves de gaz du pays andin - se sont prononcés en juin dans le même sens. La fièvre des autonomies, illégales pour le pouvoir, a
ainsi coupé en deux le pays.

Reste que le référendum du 10 août aurait très bien pu ne pas se tenir. La faute aux adversaires voire aux ennemis de Morales, qui ont tout mis en œuvre dans les dernières semaines pour faire annuler ce rendez-vous, le paralyser, le qualifiant d'anticonstitutionnel, alors qu'il avait été approuvé par le Congrès. Ceci expliquant cela: les sondages sont aujourd'hui
favorables à la confirmation de Morales.

Car pour déloger Morales du Palais présidentiel de la Paz, le "non" à ce référendum révocatoire doit impérativement dépasser  les 1.544.374 voix recueillies par le président lors de son élection à la présidence, en décembre 2005.

Ce référendum a été convoqué par Morales pour tenter de sortir le pays d'une profonde crise et de la lutte que se livrent le gouvernement central qui entend faire approuver un projet constitutionnel considéré comme illégitime par l'opposition et les régions, qui cherchent à imposer un projet autonomiste, qualifié de sécessionniste par le pouvoir central.

Avec l'appui de son Parti, le MAS (Mouvement vers le socialisme) le président, espère obtenir 60% des voix, ce qui lui permettrait, dit-il, de lancer la suite de son programme en vue de définir la superficie maximale de la propriété agraire dans les terres basses de la Bolivie.

Or les grands latifundistes du Sud, de Santa Cruz, peuvent étrangement compter sur un allié de taille: l'archevêque de Santa Cruz, le cardinal Julio Terrazas, véritable chef de l'Eglise bolivienne.
A l'instar de son collègue vénézuélien de Caracas, qui s'était rangé aux côtés des putschistes en 2002, lors du coup d'Etat avorté contre le président Chavez, le cardinal bolivien s'est prononcé en mai dernier en faveur du vote "illégal" sur l'autonomie de Santa Cruz, bastion de l'opposition, pour la partition du pays: le Sud aux nantis, le Nord aux Indios défavorisés, d'ethnie aymara pour la plupart.

Dans une lettre ouverte, le Prix Nobel de la Paix argentin, Adolfo Perez Esquivel, lui fait part de sa stupéfaction: "Cela me préoccupe que tu soutiennes ceux qui prétendent déstabiliser un gouvernement démocratique… Cela nous préoccupe beaucoup  que tu soutiennes les grands propriétaires terriens qui recherchent leur intérêt propre et non le bien du peuple…"

"Que le gouvernement bolivien ait commis quelques erreurs, ajoute cette lettre, c’est certain. Il les reconnaît et il sait qu’il doit les corriger. Mais toi, qu’as-tu fait pour lui venir en aide et pour cheminer avec le peuple ? Toi, frère, qui est à la tête de l’Eglise
de Bolivie, quelle est ton option et quelle lecture fais-tu de tout ce que je viens de te signaler et que tu sais très bien déjà ?" (source : Apic)


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