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du 2 au 5 décembre 2008 (semaine 50)
 

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2008-12-05 -
LE DÉCÈS DU PATRIARCHE DE MOSCOU ALEXIS II

Le patriarche de Moscou Alexis II, est décédé le 5 décembre dernier, dans sa résidence de Pérédelkino, près de Moscou, à l'âge de quatre-vingts ans. L'Église perd ainsi l'un des grands rénovateurs d'une Église blessée par la Révolution communiste.

Le patriarche, qui souffrait de problèmes cardiaques depuis plusieurs années, avait été hospitalisé à plusieurs reprises en Suisse et en Allemagne. Il était à la tête de l'Eglise orthodoxe russe depuis juin 1990, comme successeur du patriarche Pimen.

Alexeï Mikhailovitch Ridiger, issu d'une famille de la noblesse germano-balte ayant embrassé l'orthodoxie au XVIIIe siècle, est né le 23 février en 1929 en Estonie. Il était le 15ème patriarche de l'Eglise orthodoxe russe.L'influence de son entourage familial et du contexte de relative liberté dont bénéficiait l'orthodoxie en Estonie dans l'entre-deux-guerres a été décisive dans sa vocation au service de l'Eglise.

Les monastères de Pühtitsa et de Petchora, à l'époque sur le territoire estonien, ainsi que celui de Valaam, sur une île du lac Ladoga rattachée alors à la Finlande, étaient des lieux de pèlerinages fréquents qui lui ont permis d'avoir un lien direct avec ce qui restait de la tradition monastique russe, alors que sur le territoire soviétique presque tous les monastères étaient fermés.

Après la guerre, il fit ses études au séminaire de Leningrad et fut ordonné prêtre en 1950. Il partit ensuite accomplir son ministère pastoral dans différentes paroisses d'Estonie, tout en terminant une licence par correspondance à l'académie de théologie de Leningrad. Ordonné évêque de Tallinn en 1961, ses interventions auprès des autorités civiles locales permirent, peu après, de sauver de la fermeture la cathédrale de Tallinn et le monastère de Pühtitsa, aux pires heures de l'assaut lancé contre l'Eglise par Nikita Khrouchtchev.

Remarqué pour ses talents d'administrateur, il dirigea, de 1964 à 1986, la chancellerie patriarcale, devenant ainsi membre permanent du saint-synode. Dans les vingt dernières années du régime soviétique, il représenta à de nombreuses reprises le patriarcat de Moscou sur la scène internationale, notamment au sein du mouvement oecuménique, ce qui le conduisit notamment à la vice-présidence de 1971 à 1987, puis à la présidence de 1987 à 1992 de la Conférence des Eglises européennes (KEK)

Elevé à la dignité de métropolite dès 1968, il attendra 1986 pour être nommé au diocèse de Leningrad (aujourd'hui Saint-Pétersbourg). Le 5 juin 1990, il était élu patriarche de Moscou par un concile réunissant les évêques ainsi que des délégués clercs et laïcs de l'Eglise russe.

Au cours de son long service dans l'Eglise, le patriarche Alexis II devait connaître deux facettes de l'histoire, celle de la période soviétique, marquée par les persécutions, mais aussi les compromissions avec le pouvoir, ce dont il devait s'expliquer par la suite, notamment dans une longue interview au quotidien Izvestia, en décembre 2002, et celle du renouveau, avec la restauration et la reconstruction de nombreuses églises et monastères, dont la basilique du Christ-Sauveur, détruite par Staline et rebâtie à l'identique en quatre ans, à Moscou.

En dix-huit ans, Alexis II a effectué un travail pastoral important, parcourant la Russie de long en large. Durant cette même période, l'Eglise russe a, sous son impulsion, ouvert ou rouvert une quarantaine de diocèses, quelque dix mille paroisses, une quarantaine d'écoles de formation théologique et pastorale, près de quatre cents monastères.

Plusieurs assemblées plénières de l'épiscopat russe se sont tenues sous sa présidence et ont pris d'importantes décisions : la canonisation de nouveaux saints, dont les nombreux martyrs et confesseurs de la foi en Russie au 20ème siècle, y compris le dernier tsar Nicolas II et les membres de sa famille assassinées par les bolcheviques.

Il octroie un statut d'autonomie à l'Eglise d'Ukraine en 1991, adoption de nouveaux statuts canoniques, publie un document sur la doctrine sociale de l'Eglise en août 2000. (SOP 251.4), et rend possible la réintégration, en mai 2007, de l'Eglise russe hors-frontières, une entité ecclésiale issue de l'émigration russe qui s'était séparée du patriarcat de Moscou au début des années 1920.

Dans la vie interne de l'Eglise russe, Alexis II a cherché à tenir, malgré bien des difficultés, une ligne médiane, dénonçant tout à la fois les courants conservateurs extrémistes et les mouvements jugés " réformistes "initiateurs des " innovations " en matière de pratique pastorale et liturgique.

Alexis II s'est imposé dans la vie politique et sociale du pays. Son engagement en faveur de la poursuite du processus démocratique engagé en Russie l'a conduit à dénoncer très clairement le putsch d'août 199, puis à entreprendre, dans des conditions moins claires, une mission de médiation lors de la révolte du Parlement russe contre Boris Eltsine en octobre 1993.

Ses prises de positions contre la peine de mort et contre l'anti-sémitisme ainsi que sa dénonciation de la première guerre de Tchétchénie ont été particulièrement remarquées, quoiqu'assombries plus tard par une attitude plus ambiguë lors de la deuxième guerre de Tchétchénie, au cours de laquelle le patriarche s'est aligné sur le discours antiterroriste de Vladimir Poutine.

C'est, peut-être, sur le plan des relations entre Eglises qu'Alexis II a rencontré le plus de difficultés, avec tout d'abord les schismes en Ukraine, en Moldavie et en Estonie, la situation dans ce dernier pays entraînant même pendant six mois, en 1996, la suspension de la communion entre le patriarcat de Moscou et le patriarcat oecuménique.

Les relations étaient également devenues de plus en plus tendues entre l'Eglise russe et le Vatican, en raison de ce qu'Alexis II a dénoncé, à plusieurs reprises, comme un acte de prosélytisme catholique sur le territoire canonique du patriarcat de Moscou, au point que toute idée de rencontre entre le patriarche et le pape a dû être abandonnée, tout au moins jusqu'à la disparition de Jean-Paul II. Depuis l'élection de Benoît XVI, en avril 2005, les relations se sont nettement améliorées entre le Vatican et le patriarcat de Moscou, au point que l'éventualité d'une rencontre était à nouveau évoquée. (source : SOP)


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