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15.03 - Russie : Une hérésie ecclésiologique.

Dans la revue des Jésuites "Civilta Cattolica", le cardinal Kasper analyse l'attitude de l'Eglise orthodoxe russe et cet article, qui vient de paraître, est un véritable message qui lui est adressé.

Le cardinal Walter Kasper, qui en est le signataire, est en effet le président du Conseil Pontifical pour la Promotion de l'Unité des Chrétiens. Sous le titre :"Les racines théologiques du conflit entre Moscou et Rome", il établit une analyse très franche des raisons adoptées par l'Église orthodoxe pour critiquer la décision du Vatican de créer certains diocèses catholiques en Russie, accusant Rome de volonté de prosélytisme et d'inobservance du principe canonique territorial.

Le cardinal soutient que le noyau dur de la controverse réside dans le fait qu'après le Concile l'Église catholique a accepté le principe de la liberté religieuse, surmontant un débat très dur et douloureux en son sein. L'Église orthodoxe, par contre, n'a pas encore accepté ce principe; elle est donc en retard par rapport à la société moderne et pluraliste.

Moscou est encore à la recherche de sa vraie place après la fin d'une longue période d'oppression communiste. "On comprend alors, écrit-il, qu'elle cherche encore sa place. Et cela exige de la patience de notre part". Mais tant que l'Église orthodoxe russe se cramponnera à ses positions idéologiques, "elle ne pourra pas entamer un dialogue constructif avec la société moderne ni avec l'Église catholique. Sa position est certainement cohérente en soi, mais elle n'est pas en mesure d'affronter l'avenir".

Cette critique rejoint d'ailleurs des analyses parues dans certaines publications religieuses en Russie. Reprochant à l'Eglise russe de réagir "idéologiquement", il demande toutefois aux catholiques "un peu de patience" car la position actuelle orthodoxe "ne sera pas capable d'affronter le futur".

"Il est devenu clair que derrière le débat sur le principe du territoire canonique et du prosélytisme, se cachent des argumentations de nature substantiellement idéologique", affirme le cardinal Kasper dans son article. En effet, selon lui, l'Eglise orthodoxe russe "défend non seulement une réalité qui désormais n'existe plus, mais aussi une relation entre l'Eglise et le peuple qui est problématique sur le plan théologique". Il critique en outre une "hérésie ecclésiologique" consistant à "ne pas reconnaître à l'Eglise catholique sa dimension missionnaire au nom d'un concept de prosélytisme indûment amplifié dans sa signification".

Mais pour le président du Conseil pontifical pour l'unité des chrétiens, la réaction de l'Eglise orthodoxe russe peut s'expliquer par le fait qu'elle "ressent ses propres faiblesses pastorales et évangélisatrices, craignant ainsi une présence catholique essentiellement plus efficace au niveau pastoral, bien que réduite au plan numérique". "Certains catholiques sont bien sûr parfois trop zélés, mais on trouve ce genre de personnes aussi dans l'Eglise orthodoxe comme dans toutes les autres Eglises", précise-t-il.

Après une longue période d'oppression communiste, ajoute le cardinal, "l'Eglise orthodoxe russe se retrouve face au monde moderne pluraliste. On comprend qu'elle soit encore à la recherche de sa place", affirme-t-il, mais "cela exige de la patience de notre part". Reconnaissant ainsi une certaine "cohérence" dans la position orthodoxe, il précise toutefois qu'elle ne permettra pas "d'affronter le futur". "Ils feraient mieux de reprendre le dialogue avec l'Eglise catholique et de sortir de l'impasse dans laquelle ils se trouvent. L'Eglise catholique est prête à ce dialogue et est disposée à collaborer", conclut-il, faisant appel à "un peu de bonne volonté".

Pour plus d'informations : Pères jésuites

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