18.07.02 - L'Orthodoxie russe et l'Occident.
Le diocèse du patriarcat de
Moscou en Grande-Bretagne et en Irlande accepte avec difficulté
la nomination d'un nouvel évêque qui n'a pas su s'adapter
au contexte ecclésial et pastoral local et agissait "de manière contraire
à l'esprit et à la pratique du diocèse".
En d'autres termes, les orientations que prend l'évêque
auxiliaire que vient de nommer la patriarcat de Moscou, manifeste un
"écart de plus en plus profond entre la foi telle que nous la confessons
et la vivons ici, en Europe occidentale, et l'expérience d'une Église
[de Russie] qui, ayant été terriblement marquée par l'épreuve cruelle
de 70 ans de communisme, cherche aujourd'hui à retrouver son identité
nationale et semble vouloir insister sur une autorité hiérarchique pyramidale
au détriment de la conciliarité".
Le métropolite ANTOINE de Souroge, qui dirige le diocèse du patriarcat
de Moscou en Grande-Bretagne et en Irlande a annoncé, le 16 juin dernier,
que son deuxième auxiliaire, l'évêque Hilarion (Alféïév), un jeune théologien
russe de 36 ans arrivé en Grande-Bretagne il y a moins de quatre mois,
avait accepté de présenter sa démission, compte tenu des graves tensions
apparues entre lui et une grande partie des membres du clergé et des
paroisses du diocèse.
Il a souligné que l'évêque HILARION n'avait pas su s'adapter au contexte
ecclésial et pastoral local et agissait "de manière contraire à l'esprit
et à la pratique du diocèse". Ces agissements allaient dans le sens
d'une reprise en main du diocèse par le département des relations extérieures
du patriarcat de Moscou, estime-t-on généralement à Londres, en se fondant
sur les déclarations et les actes de ce même département ces dernières
année, notamment lors de la visite à Londres de son responsable, le
métropolite Kirill de Smolensk, le 28 novembre 2001.
Le métropolite Kiril avait insisté en effet sur la nécessité
de concentrer le travail pastoral sur les citoyens russes récemment
installés en Grande-Bretagne, alors que le métropolite Antoine veut
voir dans son diocèse, non pas une entité religieuse nationale exclusivement
russe, mais le ferment, avec d'autres juridictions en Grande-Bretagne,
de "la vraie Église locale".
L'assemblée diocésaine clérico-laïque réunie le 29 juin, à Londres,
n'a fait que confirmer la situation. Le sort de l'évêque Hilarion y
a été réexaminé en présence de ce dernier, lequel s'est présenté comme
victime d'une cabale menée par les éléments occidentaux au sein du diocèse.
Il a déclaré ne pas avoir à donner sa démission, affirmant que seul
le saint-synode de l'Église russe, qui l'avait nommé, pouvait le rappeler.
Ces tensions sont le signe de la difficulté de l'Eglise orthodoxe
russe de ne pas se replier sur un "nationalisme ecclésial",
le "phylétisme", reproche que l'on peut faire également
sur les terres russes.
Dès son arrivée en mars, l'évêque Hilarion, fidèle aux consignes
de Moscou, avait entrepris une série de visites pastorales à travers
le pays, en donnant la préférence aux contacts avec les fidèles récemment
venus de Russie, au point que ceux-ci ont pu "croire qu'il était 'leur'
évêque, chargé de défendre 'leurs' intérêts" et ainsi favoriser "l'émergence
d'un diocèse purement russe dans sa composition ethnique", a affirmé
la métropolite Antoine.
"Il n'y a eu aucun effort de sa part pour comprendre l'éthos, l'esprit
et la vie de notre diocèse, pas plus que sa signification pour la vie
de l'Église orthodoxe en Europe occidentale", a souligné le métropolite
Antoine, avant d'en venir à la conclusion qu'il était préférable que
l'évêque Hilarion "retourne à Moscou, où il pourra faire bénéficier
[l'Église] de ses grands et multiples talents de manière plus utile".
Dans cette même intervention, le métropolite Antoine fit remarquer
que l'une des "particularités" de son diocèse tient au fait que les
membres du clergé, à commencer par l'évêque, "se considèrent comme des
serviteurs du peuple de Dieu". À l'instar de nombreux responsables du
patriarcat de Moscou aujourd'hui, l'évêque Hilarion "emploie toujours
dans ses discours le mot 'règlement', et jamais le mot 'service' […],
alors que l'éthos de notre diocèse passe par un esprit de 'service'
de la part des clercs et de 'fraternité' de la part des laïcs, et ne
se résume pas à une structure hiérarchique."
Le diocèse compte aujourd'hui une dizaine de paroisses et plus de douze
communautés en Grande-Bretagne ainsi qu'une paroisse en Irlande. En
plus du métropolite Antoine et de son premier auxiliaire, l'évêque Basile
(Osborne) qui réside à Oxford, le clergé comprend vingt-trois prêtres
et huit diacres. Il publie un bulletin mensuel en anglais et en russe,
"Cathedral Newsletter", et une revue trimestrielle en anglais,
"Sourozh".
Pour plus d'informations : Service
orthodoxe de presse
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