21.04.03 -
Offensive pour les gourmandises pascales.
Les
pâtissiers et les chocolatiers français ont profité
des fêtes pascales et de la grande production de confiserie de
cette période pour écrire au pape et lui demander de faire
modifier la traduction française du "péché
de gourmandise".
Dans le bulletin de "leur paroisse parisienne", Saint Roch,
située rue Saint Honoré, nous avons relevé ce commentaire
qui se veut humoristique et ne nous semble pas déplacé
durant ces réjouissances pascales, d'autant que vous trouvez
le détail sur "infocatho"
des nombreuses friandises qui ont leur origine à Pâques.
"Aimer ce que Dieu a mis à notre disposition, en nous-mêmes et
autour de nous, dit ce texte, n'est pas une faute, puisque c'est la
réponse la plus normale que nous avons à donner pour ce qu'il nous a
confié au sixième jour de la Création, selon le livre de la Genèse,
chapitre 1, verset 29 à 31 : "Et Dieu vit que cela était bon. " Par
contre l'utilisation " hors norme ", si l'on peut parler ainsi, peut
devenir faute, parce que cette utilisation n'est plus dans le sens fondamental
de l'être humain, dans ses relations avec les autres ou dans son comportement
avec lui-même.
" Savourer, admirer, contempler est le fait de tout être vivant
qui découvre une véritable joie, dans un acte humain normal, mais quand
il l'exagère jusqu'à le dénaturer, cela devient un vice, ou, selon l'expression
des moralistes chrétiens, un péché capital. " Capital " parce qu'il
est alors à l'origine de toute une série de dépravations, d'aveuglements,
de détournements anti-nature. L'orgueil comme l'égoïsme deviendront
appétit de domination, de pouvoir, d'exclusion du plus faible. La vraie
gourmandise peut devenir une boulimie qui s'appellera gloutonnerie,
ou alcoolisme.
" Il y a loin des "arts de la table " qui mettent en valeur avec
discrétion et retenue la richesse des dons de Dieu, à cette goinfrerie
sensuelle qui n'est plus qu'une satisfaction sans intelligence, en raison
même de sa démesure. La récente supplique adressée au pape par Lionel
Poilâne et reprise par sa fille Apollonia Poilâne veut exprimer tout
cela. En sa qualité de présidente d'honneur de l'association " de la
question gourmande " elle demande à Jean Paul II de bien vouloir veiller
à une meilleure traduction de l'un des sept péchés capitaux.
" Le secrétaire des chocolatiers de France y souscrit avec
une égale et filiale déférence. "Avec humilité,
nous vous demandons, très Saint Père, sachant que la suppression d'un
de sept péchés capitaux est inconcevable, de modifier sa traduction
dans la langue française. "
Et de suggérer de remplacer le mot " gourmandise " par " gloutonnerie
", terme utilisé dans ce sens en anglais, en italien, en espagnol ou
en allemand.
" La presse, " gourmande " d'actualités qu'elle considère comme
originales, en a " fait ses choux gras " dans des articles de plaisanteries
légères. Nous avons donc cru bon, à notre tour, d'aller, avec sérieux,
aux sources même de la doctrine " culinaire " et de l'expérience de
l'Eglise catholique romaine.
"Dans les évangiles, nous voyons Jésus fréquenter de nombreux festins
et en faire même des paraboles du " festin du Royaume ", c'est-à-dire
la vie éternelle avec Dieu Trinité. Il n'a pas refusé d'être aux noces
de Cana, des noces qui, sans aucun doute, devaient être comme toutes
ses semblables, bruyantes et émaillées de propos de toutes sortes. N'empêche
que cette convivialité ne lui était pas contraire, puisqu'à la demande
de la Vierge Marie, il ajoute l'équivalence de 750 bouteilles de vin
par le miracle de l'eau changée en vin, et en bon vin …
"Il s'invite chez Zachée pour fêter sa conversion et sa repentance.
Il rappelle à Simon le Pharisien les gestes de l'hospitalité et le père
de l'enfant prodigue ira tuer le veau gras pour le retour de son mécréant
de fils. Par delà toute nourriture, c'est le sens de la relation et
de la joie que Jésus exprime dans ces récits et dans ces invitations
acceptées.
" C'est au cours du repas pascal qu'il nous donne son corps et
son sang, en nourriture pour la vie éternelle, en signe de l'Alliance
qu'il nous entre Lui et nous. Le P. Xavier de Chalendar vient même de
consacrer un livre entier aux dizaines de repas dont parlent les quatre
évangiles.
" Avec le temps, nous voyons l'influence des moines transformer
l'art culinaire après les invasions barbares. Les moines et les moniales
paisibles soignent des jardins où des fruits et des légumes de qualité
deviendront des aliments appétissants et digestes par leur fraîcheur
et leur diversité. L'excellence des produits employés, le soin apporté
aux préparations culinaires comme à toute chose, seront à l'origine
de recettes monastiques qui traverseront les âges et influeront les
cuisiniers des seigneurs durant leurs fêtes gloutonnes.
" Si vous cherchez la gourmandise chez le grand théologien qu'est
saint Thomas d'Aquin, vous trouverez difficilement ce terme. Et pourtant
il en traite dans la question 141 de son imposante " Somme théologique
". Il y consacre l'équivalence de 12 pages. Il y fait appel à saint
Augustin et à saint Ambroise, pour nous dire où doit se situer la vraie
gourmandise : " dans la tempérance ". " Dans la tempérance, c'est surtout
la sérénité de l'âme qui est considérée et recherchée. " " La tempérance
appartient à la grâce de la modération. " Mais il ne refuse pas que,
dans cette modération, nous éprouvions de grands plaisirs.
" Et pour lui le plaisir n'est pas une faute. " Comme le plaisir
accompagne l'acte qui s'accorde avec la nature, les plaisirs sont d'autant
plus intenses que les actes qu'ils accompagnent sont plus naturels.
Ce qui est par dessus-tout naturel aux êtres vivants, ce sont les actes
par lesquels se conserve la nature de l'individu : le manger et le boire
et la nature de l'espèce, par l'union de l'homme et de la femme. Voilà
pourquoi les plaisirs de la nourriture et de la boisson et les plaisirs
sexuels sont proprement l'objet de la tempérance. " C'est la déviation
de la nature et des lois de cette nature qui est faute et péché.
" Modération et tempérance sont les conditions même d'une vie saine
et d'une vie qui corresponde au dons que Dieu nous fait. Saint Thomas
d'Aquin est même très précis : "Au goût appartient le discernement des
saveurs qui contribuent au plaisir de la nourriture.. Les plaisirs raffinés
consistent premièrement dans la substance même de l'aliment mais secondairement
dans la saveur exquise et la préparation des nourritures.
" Pour être plus sûr encore, nous avons été cherché la " gourmandise
" dans le catéchisme de l'Eglise catholique. Il n'y est consacré que
quelques lignes. Les voici : " Ils sont appelés péchés capitaux parce
qu'ils sont générateurs d'autres péchés, d'autres vices. Ce sont l'orgueil,
l'avarice, l'envie, la colère, l'impureté, la gourmandise et la paresse.
" Rien de plus, sinon une note qui donne une référence à un texte de
saint Grégoire le Grand. (Catéchisme de l'Eglise catholique. § 1866)
" Un grand saint martyr nous donnera la conclusion. Il s'agit de
saint Thomas More (1478-1535) chancelier d'Angleterre, décapité pour
sa foi par le roi Henri VIII : " Donnez-moi, Seigneur, une bonne digestion
et aussi quelque chose à digérer. Donnez-moi la santé du corps avec
le sens de la garder au mieux. Donnez-moi une âme sainte qui ait les
yeux sur la beauté et la pureté afin qu'elle ne s'épouvante pas en voyant
le péché, mais sache redresser la situation. Donnez-moi une âme qui
ignore l'ennui, le gémissement et le soupir. Ne permettez pas que je
me fasse trop de souci pour cette chose encombrante que j'appelle "
moi ". Seigneur, donnez-moi l'humour pour que je tire quelque bonheur
de cette vie et en fasse profiter les autres. Amen. "
" A propos, Très Saint Père, pouvons-nous envisager votre accord
pour une meilleur traduction de la gourmandise qui ne condamne pas les
vrais gourmets qui mettent en valeur, avec tempérance et modération,
les dons dont Dieu nous a comblés. (source : saint roch)
Pour plus d'informations : Paroisse
Saint Roch
Retour
|