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08.08.03 - L'Eglise, les OGM, la spéculation et la faim.

Selon le quoitidien italien "La Stampa", le Vatican serait prêt à dire oui aux OGM en novembre prochain et n'attendrait que l'approbation du pape pour dire oui aux OGM cet automne.

Il est vrai que le Conseil pontifical Justice et Paix, à Rome, a bel et bien l'intention de convoquer cet automne une réunion d'étude avec des experts sur le thème des organismes génétiquement modifiés (OGM). Mais contrairement aux affirmations non fondées du quotidien italien, aucun document précisant la position du Vatican sur les OGM ne serait cependant en préparation à l'heure actuelle.

Le débat est lancé au sein de l'Eglise où les associations de volontaires pour le tiers monde, les missionnaires et d'une manière générale le clergé du Sud, sont contre les OGM, estimant qu'ils ne servent pas à combattre la faim dans le monde, mais seulement à augmenter les profits les multinationales agro-alimentaires, qui en brevetant le vivant, augmentent la dépendance des pays du Sud.

Le cardinal Ersillio Tonini affirme en revanche que "si la nourriture transgénique permet vraiment de sauver de la famine un milliard de personnes pauvres, ce serait un crime de barrer la route aux OGM".

Dans un communiqué de presse parvenu à l'agence de presse missionnaire MISNA, Mgr Martino souligne que sa position et celle du Conseil est celle qu'il a lui-même exprimée "au nom du Saint-Siège à l'occasion de la Conférence Ministérielle sur la Science et la Technologie en Agriculture, tenue à Sacramento, dans l'Etat américain de la Californie, du 23 au 25 juin dernier". Et de rappeler ses paroles : "le problème de la faim dans le monde interpelle la conscience de chaque être humain et en part iculier des chrétiens. C'est pour cela que l'Eglise catholique suit avec une attention particulière tout progrès de la science pour résoudre un drame qui afflige une aussi vaste partie de l'humanité".

Le quotidien italien va donc un peu vite dans son interprétation des faits en disant que l'épreuve du texte, qui a requis deux ans de travail, n'attend que l'approbation du pape. Le document rédigé par des experts du Conseil pontifical "Justice et Paix" aborderait les champs éthique, économique, pastoral et sanitaire. Certes, l'administration Bush cherche depuis des mois à convaincre les responsables du Vatican de se prononcer en faveur des aliments génétiquement modifiés.

Dans son édition du mois de juin 2003, la revue catholique italienne "Trenta Giorni", accusait les Etats-Unis de faire pression sur le Vatican pour convaincre ses responsables à se prononcer en faveur des aliments génétiquement modifiés. Déjà, lors de la venue du secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, le 2 juin dernier au Vatican, celui-ci avait abordé avec Jean Paul II et le cardinal secrétaire d'Etat du Vatican, Angelo Sodano, le thème sensible des OGM, qui représente de gigantesques marchés pour les exportateurs américains. Les Etats-Unis verraient d'un très bon oeil un revirement de la position vaticane.

Un éventuel soutien du Vatican aux OGM pourrait être mal reçu par l'Union européenne qui a imposé un moratoire sur leur production et leur importation, ainsi que dans certains pays africains, comme la Zambie qui a déjà rejeté toute assistance alimentaire américaine contenant des OGM, malgré de fortes pressions. La Zambie résiste aux pressions du lobby pro-OGM "La Zambie ne devrait pas être contrainte d'accepter du maïs génétiquement modifié", ont déclaré récemment les jésuites du Centre de formation agricole "Kasisi" (Katc) et du Centre jésuite pour la réflexion théologique (Jctr). Les jésuites de Zambie estiment en effet que devoir accepter du maïs génétiquement modifié au titre de l'aide alimentaire non seulement mettrait en péril la santé des consommateurs, mais pourrait avoir un impact négatif sur l'agriculture des pays africains.

Nous ne pouvons que faire nôtres les réflexion que vient de publier le P. Giulio Albanese, directeur responsable de l'agence Misna.

..." Personnellement, j'estime qu'il fait éviter les positions préconcues, idéologiques ou instrumentales, sans négliger le chemin de réflexion entrepris par des conférences épiscopales. Le fait que le prélat ait ressenti la nécessité d'affirmer, dans une note diffusée samedi, au sujet de la faim dans le monde et de la possible utilisation des OGM, que "l'Eglise catholique suit avec une attention particulière tout progrès de la science pour la résolution d'un drame qui afflige une aussi vaste partie de l'humanité" ne peut que réjouir quiconque croit en le progrès du savoir humain, surtout quand la survie des pauvres est en jeu. Il n'y a pas de doutes que, même sur cette question délicate, "il est important de chercher une solution ecclésiale pour approfondir chaque aspect du problème, aussi bien du point de vue scientifique, qu'éthique et humanitaire".

..." C'est pour cela, je crois, que la provocation de Monseigneur Martino doit être écoutée sereinement afin de promouvoir un débat constructif sur une matière aussi délicate. Le Conseil Pontifical pense convoquer à l'automne une réunion d'étude avec des experts du secteur et des personnalités intéressées. Je suis convaincu que cette initiative permettra de tirer des indications très importantes. La préoccupation de nombreux membres du monde missionnaire, dont l'agence MISNA se fait porte-parole, concerne avant tout et surtout le mécanisme économique lié à l'utilisation des OGM. Mis à part les mesures de précaution, bien éradiquées dans la culture européenne, il y a la question du "business" et plus précisément des droits de propriété sur les segments d'OGM qui, à la lumière de l'éthique sociale de l'Eglise catholique, ne ferait qu'augmenter, à notre avis, la dépendance des pays pauvres envers les pays riches."

..." Nous faisons part à Mgr Martino de toute notre estime, pour le service qu'il rend, et de la certitude qu'il saura se faire l'interprète des instances des Jeunes Eglises et des Peuples du Sud du Monde. (source : misna)

Pour plus d'informations : Agence Misna

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