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26.09.03 - France : Le geste d'une mère relance l'euthanasie.

Vincent Humbert, tétraplégique, muet et presque aveugle, est mort vendredi matin 26 septembre, au service de réanimation du centre hélio-marin de Berck-sur-mer moins de deux jours après que sa mère a tenté de mettre fin à ses jours comme il le souhaitait.

Placée en garde à vue mercredi soir à Berck-sur-mer (Pas-de-Calais) après avoir tenté d'aider à mourir son fils Vincent, par un produit toxique dans l'une de ses perfusions, trois ans jour pour jour après l'accident qui l'a rendu tétraplégique, elle fut autorisée à se rendre à son chevet, par l'autorité judiciaire soucieuse d'une grande attention humanitaire pour ce cas tragique d'euthanasie où l'amour est le vrai mobile.

Le cas de Vincent Humbert avait été rendu public en décembre dernier. Le jeune homme, tétraplégique, muet et presque aveugle, avait écrit au président de la République, Jacques Chirac, pour lui faire part de son calvaire et lui dire qu'il souhaitait mourir. "Je voudrais que vous sachiez que vous êtes ma dernière chance", écrivait-il, alors que l'euthanasie est illégale en France. L'Elysée avait fait savoir que Jacques Chirac avait pris connaissance "avec beaucoup d'émotion" de la lettre de Vincent et le chef de l'Etat avait ensuite appelé le jeune homme à plusieurs reprises.

Marie Humbert avait écarté l'idée de se rendre avec son fils dans un pays où l'euthanasie est légalisée. "Mon fils ne veut pas. Il ne veut pas se cacher pour mourir." L'équipe médicale du centre hélio-marin de Berck-sur-mer qui suivait Vincent Humbert depuis que sa mère lui eut injecté un produit toxique

"Compte tenu du tableau clinique, de l'évolution et des souhaits qu'avait exprimé à divers reprises Vincent, l'équipe médicale a décidé de limiter les thérapeutiques actives", précisent les médecins du service réanimation et soins intensifs. "L'équipe médicale qui l'a accompagné pendant 3 ans a pris cette décision collective et difficile en toute indépendance", conclut le communiqué. Marie Humbert reste libre, tout en étant sous le coup d'une instruction judiciaire.

Mais son geste repose une fois de plus, devant l'opinion publique, la question de l'euthanasie. Bruno Frappat, dans son éditorial du quotidien "La Croix" du 26 septembre, nous donne à réfléchir ainsi :

"Peut-on, par amour maternel, donner la mort ? La réponse à cette question est-elle affaire d'opinion publique ? Voilà deux interrogations que suscite la tragédie vécue par ce jeune tétraplégique qui, depuis son lit de souffrance de l'hôpital de Berck, avait réclamé il y a dix mois, au chef de l'État, puis à l'opinion, le droit de cesser de vivre. C'est-à-dire d'y être aidé, puisqu'il était dans l'incapacité physique de se tuer."

" À chacun, dans le tréfonds de sa conscience, de mesurer ce qui relève, dans ce cas limite, de la compassion, de la tendresse ou de l'irrespect d'un principe dépassant toutes les situations : celui du caractère sacré de toute vie. À chacun, même, d'évaluer si ce qui choque, voire qui scandalise dans le drame ainsi établi au su de tous, n'est pas d'abord qu'il soit connu de tous et livré au jugement de tous."

" Si attentif et exigeant soit-on dans la défense d'un absolu, tout le monde sait - même si beaucoup ne peuvent l'admettre - que la relativité fait accepter des exceptions, dans l'intimité d'une situation donnée, dans le huis clos des ultimes souffrances. Ce ne sont pas les cas individuels qu'il convient, dès lors, de commenter. Encore moins de " juger " ! Car, dans les analyses " à froid ", comme dans le débordement émotionnel qu'inspirent de tels cas, nous sommes tous débordés par un " moment " humain qui ne nous appartient pas."

" Ce qui pose problème, et problème public, dans le drame de Berck, c'est qu'il devient une pièce majeure dans la propagande en faveur de l'euthanasie active. Par des interventions, puis par un livre bien relayé, par des annonces, les héros de ce malheur seront venus à l'appui d'un " combat " général qui les touchait et les dépassait. Toute la société est prise à témoin, au nom de la compassion, valeur forte, et d'une " liberté ", valeur non moins forte. Ceux qui rappellent que le don de la vie et son respect doivent demeurer la pierre d'angle de l'idée qu'une société se fait d'elle-même - faute de quoi elle s'effondre sur elle-même -, ceux-là sont renvoyés, par la culture de plus en plus dominante, à leur négation de l'humain."

" La vie fardeau, la mort valeur ? Où nous mènerait une telle rupture anthropologique ? Au glissement progressif vers plus d'inhumanité." (source : la croix)

Pour plus d'informations et pour ce texte : La Croix

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