30.09.03
- Europe : L'euthanasie, un débat de société.
Vincent Humbert, le jeune tétraplégique français décédé vendredi,
à sa demande en suite du geste de sa mère et déterminée,
devant son coma définitif, par le corps médical, provoque
en France et au Conseil de l'Europe un long débat.
Les médecins de l'hôpital de Berk, dans le nord de la France,
n'ont pas voulu poursuivre un acharnement thérapeuthique devenu
sans solution et ont coupé les sondes qui maintenait en vie le
jeune homme. Le débat s'étend à l'opinion publique
: Faut-il ou non, et selon certaines conditions promouvoir l'euthanasie
ou la "mort assistée" ?
Le ministre français de la santé, Jean-François Mattei, s'est dit favorable,
dimanche, à " un guide de bonnes pratiques ou une charte " sur le problème
de l'euthanasie, ajoutant qu'il " n'inscrivait pas la loi comme finalité
du dialogue. " Invité de l'émission France Europe Express sur France
3, il a précisé que ce guide (ou cette charte), " affirmerait de façon
claire que l'acharnement thérapeutique n'est pas une bonne solution
".
Le Comité protestant évangélique pour la dignité humaine (CPDH) a dénoncé
lundi "l'exploitation qui est faite" du décès de Vincent Humbert : "On
ne peut utiliser le cas extrême pour faire déplacer les normes d'une
société. Au-delà du "tu ne tueras point" biblique, la véritable
compassion ne se mesure pas dans l'élimination d'une personne, quel
que soit son âge ou son état, mais dans son accompagnement", affirme
dans un communiqué le CPDH, basé à Strasbourg. La mort de Vincent Humbert
"peut être présentée par certains comme une délivrance. Elle est plus
sûrement la conséquence d'une échec, celui d'une société qui découvre
ses morts, parce qu'elle ne sait plus accompagner la vie", poursuit
le CPDH;
Le CPDH "propose, qu'à la lumière de ce qui vient de se passer, une
réflexion nationale soit engagée afin de promouvoir, notamment à travers
les soins palliatifs, un accompagnement digne d'un pays initiateur des
droits de l'Homme". Les deux grands partis français, l'UMP et
le parti socialiste, sont d'accord pour qu'une commission parlementaire
étudie cette question "sur le fond".
L'assemblée parlementaire des 45 pays membres du Conseil de l'Europe
avait prévu de discuter à Strasbourg, de ce thème controversé : faut-il
ou non dépénaliser l'euthanasie en Europe ? Deux textes étaient sur
la table. Le premier, défendu par le Suisse libéral Dick Marty, proposait
d'inviter les pays du continent à se doter d'une loi encadrant cette
pratique, sur le modèle des Pays-Bas et de la Belgique. Le second, défendu
par le socialiste britannique Kevin McNamara, demandait à l'inverse
que soit maintenues, au nom de la défense de la vie et de la primauté
du droit, les interdictions actuelles qui assimilent l'euthanasie à
un meurtre.
Mais, le 29 septembre, la veille de ce débat, le parlementaire
hongrois Matyas Eorsi (libéral) a jugé que le débat n'était pas assez
mûr et a proposé que le sujet soit retiré de l'ordre du jour pour le
reporter à une session ultérieure. Ce qui fut accepté. Seul un échange
de vues a eu lieu entre les membres de la commission des affaires sociales,
de la santé et de la famille, qui soutenait le premier texte, et deux
experts, Lisette Tiddens, représentante de la commission permanente
des médecins européens, et Rob Jonquière, secrétaire de l'organisation
" Droit de mourir en Europe ".
Ce débat sur l'euthanasie fait apparaître au Conseil de l'Europe un
clivage géographique. Les pays du Nord sont plutôt favorables à une
législation et ceux du Sud et de l'Est y sont plutôt opposés. La commission
des questions sociales du Conseil de l'Europe, après avoir été saisie
de cette question, il y a un an, avait auditionné partisans et adversaires
de la légalisation de l'euthanasie, médecins et patients. Elle concluait
son rapport en demandant s'il ne " serait pas envisageable d'introduire
une législation exemptant de poursuites les médecins qui acceptaient
d'aider des malades à mettre fin à leurs jours s'ils en faisaient la
demande répétée ", en établissant pour cela des critères stricts et
transparents.
Ce rapport ajoutait même : " Nul n'a le droit d'imposer à un mourant
ou à un malade en phase terminale de continuer à vivre dans une angoisse
et des souffrances intolérables lorsqu'il exprime de façon répétée le
désir de mourir. " Une autre commission du Conseil de l'Europe, celle
des questions juridiques et des droits de l'homme, saisie le 9 septembre
dernier, a un autre avis : " Autoriser un malade à demander qu'on
mette fin à ses jours était un " manquement à la dignité et aux droits
qui en découlent ".
Le report pour mieux étudier les chiffres avancés par chacun est une
mesure qui calme le jeu mais on peut regretter qu'une instance comme
le Conseil de l'Europe ne puisse débattre sereinement d'un sujet aussi
important. (sources diverses)
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