19.11.03
- L'Europe et la spécificité polonaise.
"L'Eglise polonaise appuie l'intégration européenne à la condition
qu'elle se fasse dans le respect des droits de l'homme et de la spécificité
polonaise." Ce qu'avait affirmé le P. Adam Schultz, porte-parole
de l'épiscopat, a été le thème de base de la démarche
de dimanche dernier.
"L'Europe a besoin de la Pologne, la Pologne a besoin de l'Europe":
le 19 mai, devant un parterre de pèlerins polonais rassemblés à Rome
sur la place Saint-Pierre, le pape Jean-Paul II était entré en
campagne, en se prononçant sans ambiguïté pour le "oui". Le dimanche
suivant, dans toutes les églises polonaises, les prêtres ont donné lecture
aux fidèles d'une lettre rédigée par les épiscopats de huit pays d'Europe
centrale et orientale.
Sur le thème "l'Europe est une chance", le 1er juin, nouvelle séance
de lecture pendant la messe, avec cette fois une missive du seul épiscopat
polonais appelant les catholiques à aller voter et, plus indirectement
il est vrai, à faire le bon choix. L'épiscopat, qui officiellement ne
fait pas de politique, a suivi de très près, dès le début, les négociations.
Et obtenu, sur plusieurs points, des autorités polonaises qu'elles adoptent
son point de vue et le défendent.
C'est à la demande des évêques polonais que Varsovie a obtenu de Bruxelles
la garantie qu'il n'y aurait pas de transfert de compétences, sur les
dossiers tels que l'avortement, le mariage ou les droits de la famille.
Et c'est encore la volonté de l'Eglise que traduit le gouvernement quand
il milite pour que la future Constitution européenne fasse référence
aux "valeurs chrétiennes".
Le cardinal Glemp a trécemment déclaré : "La
Pologne fait partie de l'Europe depuis des siècles. Que la question
de son intégration dans l'Union Européenne suscite des
craintes et des réticences, c'est normal. Mais nous tenons à
être présents dans cette construction de l'Europe. Avec
notre foi et notre identité, avec nos traditions et nos espoirs."
(La Croix-19 novembre)
Mais, pour les catholiques les plus conservateurs, c'est encore insuffisant
et l'Europe reste dangereuse. Ces derniers ont le sentiment que la Pologne
risque d'y perdre à la fois son identité et son âme. Des craintes véhiculées
par le journal "Nasz Dziennik" et surtout par la puissante
radio ultracatholique "Radio Maryja", dirigée par le P. Tadeusz
Rydzyk et financée par la congrégation des religieux rédemptoriste.
"Radio Maryja" est régulièrement écoutée par 6 millions de
catholiques pratiquants sur les 17 millions (46% de la population) que
compte la Pologne. "Radio Maryja" a su donner à ses auditeurs,
en même temps que la parole, le sentiment d'appartenir à une communauté.
Elle a tendu la main aux déçus et aux laissés-pour-compte de la modernisation
à un moment où ils se sentaient lâchés par l'Eglise officielle, qui,
elle, soutenait les réformes engagées et affichait sa solidarité avec
les élites qui les conduisaient.
Dans les milieux catholiques pratiquants, notamment les plus modestes,
ainsi qu'au sein du clergé, même parmi ceux qui sont européens,
l'entrée de la Pologne dans l'Union européenne suscite une crainte diffuse.
Selon une enquête publiée au début de l'année par l'Institut des affaires
publiques, 64% des prêtres polonais pensent que l'adhésion aura des
conséquences négatives sur la solidité des familles. Interrogés sur
les sentiments de leurs paroissiens, 56% d'entre eux évoquent l'appréhension.
Et 23% seulement, l'espoir. L'on comprend alors pourquoi certains évêques
ont souhaité que le dimanche 16 novembre, les curés abordent
ces thèmes devant leurs fidèles. (source : spp)
Pour plus d'informations : Conférence
des évêques de Pologne
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