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FlashPress - Infocatho
du 16 au 18 mars 2009 (semaine 12)
 

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2009-03-18 - A bord de l'avion.
LES QUESTIONS POSÉES PAR LES JOURNALISTES

texte intégral enregistré par le Corriere dela Sera

Quand le Boeing B777 survole la côte africaine, Benoît XVI, quitte sa place à l'avant, et rejoint les journalistes à l'arrière de l'avion. Tranquille, souriant, l'air intrigué.

Le porte-parole, le P. Federico Lombardi commence :

Santità, les journalistes ont préparé trente questions (le Pape écarquille les yeux) et à la fin nous en avons choisi six (le Pape imprime à ses traits une expression de soulagement). Benoît XVI écoute attentivement les journalistes.

Vous sentez-vous seul ...

Depuis longtemps, et en particulier après votre dernière lettre aux Évêques du monde, les journaux parlent de solitude du Pape. Qu’en pensez-vous? Vous sentez-vous seul ? Et avec quels sentiments, après les récents événements, volez-vous maintenant vers l'Afrique ?

« Pour dire la vérité je dois un peu rire sur ce mythe de ma solitude. En aucune façon, je ne me sens seul. Chaque jour je reçois les collaborateurs les plus proches, du secrétaire d'État jusqu'à La Propagation de la foi, je vois régulièrement tous les chefs de dicastère, je reçois des évêques en visite ad limina, dernièrement j'ai vu les évêques du Nigeria et d'Algérie, nous avons eu deux assemblées plénières ces jours-ci, la congrégation du culte et celle du clergé, en plus de nombreux entretiens amicaux, un réseau d'amitiés : mes amis d'Allemagne sont venus bavarder avec moi. Aucune solitude, je suis vraiment entouré d'amis, en étroite collaboration avec des évêques et des collaborateurs et avec les laïques, et j'en suis heureux. Je me rends en Afrique avec une grande joie. J'ai beaucoup d'amis africains depuis que j'étais professeur, j'aime la joie de leur foi, cette joyeuse foi qu'on trouve en Afrique. Vous savez que le mandat du Seigneur pour le successeur de Pierre est de confirmer ses frères dans la foi et moi chercherai à le faire. Mais je suis sûr que ce sera moi qui serai confirmé par mes frères, contaminé pour ainsi dire par leur joyeuse foi ».

La crise et les problèmes de l'Afrique ...-

Santità, le voyage en Afrique alors qu'une crise économique mondiale est en cours, qui se reflète aussi dans les Pays pauvres. En particulier l'Afrique doit faire face aussi à une crise alimentaire. Cette situation trouvera t'elle écho dans votre voyage ? Vous adresserez-vous à la communauté internationale pour qu'elle prenne en charge les problèmes de l'Afrique ? Sera t-il question aussi de ces problèmes dans l'Encyclique qui se prépare ?

« Naturellement je ne viens pas en Afrique avec un programme politique et économique, il me manquerait la compétence. J'arrive avec un programme religieux, de foi, de morale, mais justement cela peut donner une contribution essentielle pour la crise économique que nous avons en ce moment. Nous savons qu'un élément fondamental de la crise est le déficit d'éthique dans les structures économiques. On a compris que l'éthique n'est pas une chose hors de l'économie, mais dans. L'économie ne fonctionne pas si elle ne porte pas en elle un élément éthique. Donc en parlant de Dieu et des grandes valeurs spirituelles je cherche à donner une contribution pour dépasser la crise et rénover le système économique de l'intérieur, là où réside vraiment le nœud de la crise. L'église est catholique, universelle, traverse toutes les cultures et les continents, elle est présent dans tous les systèmes politiques et ainsi la solidarité est le principe fondamental du catholicisme. Je voudrais faire appel à la solidarité catholique et à la solidarité de tous. Évidemment je parlerai de cela dans l'encyclique, c'est le motif du retard, nous étions sur le point de la publier lorsque la crise s'est déchaîné et nous avons repris le texte pour répondre au changement dans le cadre de nos compétences, de la doctrine sociale de l'Église, mais en référence aux éléments réels. J'espère que l'encyclique pourra être un élément d'aide, une force pour dépasser cette crise ».

La croissance qualitative de l'Afrique ..
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- Le Conseil spécial pour l'Afrique du Synode des évêques a demandé que la forte croissance quantitative de l'Église africaine devienne aussi une croissance qualitative. Parfois les responsables de l'Église sont considérés comme un groupe de riches et de privilégiés et leurs comportements ne sont pas cohérents avec l'annonce de l'Évangile. Inviterez-vous l'Église en Afrique à un engagement d'examen de conscience et de purification de ses structures ?

« J'ai une vision plus positive de l'Église en Afrique : c'est une Église très proche des pauvres, des souffrants, des personnes qui ont besoin d'aide. Donc il me semble que c'est une institution qui fonctionne encore lorsque les autres institutions ne fonctionnent plus. Toujours avec son système d'éducation, ses hôpitaux, elle est très présente parmi les pauvres. Naturellement le péché originel est aussi présent dans l'Église. Il n'y a aucune société parfaite. Il y a des pécheurs et des manquements dans l'Église, et même en Afrique. En ce sens un examen de conscience et une purification intérieure deviennent nécessaires : j'en parlerai mais cela fait partie aussi de la liturgie eucharistique : on commence toujours avec une purification de la conscience. Je dirais que, plus qu'une purification des structures, toujours nécessaire, il faut une purification des cœurs. Une purification des structures est nécessaire mais elle est inutile sans une purification des cœurs. Les structures sont un reflet des cœurs : faisons notre possible pour donner une nouvelle force à la spiritualité, à la présence de Dieu dans notre cœur, tant pour purifier les structures de l'Église que pour aider la purification des structures de la société ».

Les sectes et les religions traditionnelles ...

- Lorsque vous vous adressez à l'Europe, vous parlez souvent d'un horizon dont Dieu semble disparaître. En Afrique il n'en est pas ainsi, mais il y a la présence agressive des sectes, il y a les religions traditionnelles africaines. Quelle est alors la spécificité du message de l'Église catholique que vous pouvez présenter dans ce contexte ?

« Nous reconnaissons tous qu'en Afrique le problème de l'athéisme ne se posent presque pas. La réalité de Dieu est si présente que ne pas croire en Dieu ou vivre sans Dieu n'est pas une tentation. C'est vrai, il y a aussi des problèmes de sectes. Nous n'annonçons pas comme ils le font un évangile de prospérité mais un de réalisme ; la sobriété de la vie chrétiennes, pas des miracles ; mais nous sommes convaincus que justement cette sobriété, un Dieu fait homme, profondément humain, que souffre avec nous, donne un sens à notre souffrance, a un horizon plus vaste et un futur. Nous savons que ces sectes ne sont pas très stables. Prospérité, guérisons, miracles… mais ensuite on voit que la vie est difficile et un Dieu humain qui souffre pour nous est plus prometteur, plus humain, d'une plus grande aide dans la vie. Et ensuite nous avons la structure de l'Église, pas un petit groupe qui à la fin se perd. Un grand réseau d'amitié qui nous unit, aide à dépasser le tribalisme et à arriver à l'unité dans la diversité qui est la vraie promesse pour le futur ».

Comment lutter contre le SIDA...

- Parmi beaucoup de maux qui tourmentent l'Afrique, il y en en particulier celui de la diffusion du Sida. La position de l'Église catholique sur la manière de lutter contre lui, est souvent considérée pas réaliste et pas efficace. Affronterez-vous ce thème pendant le voyage ?

« Je dirais le contraire. Je pense que la réalité la plus efficace, la plus présente et la plus forte dans la bataille contre le Sida est vraiment l'Église catholique avec ses structures, ses mouvements et communautés. Je pense à Sant'Egidio qui fait tant dans la lutte contre le Sida, aux 'camilliani', aux sœurs qui se consacrent aux malades. On ne peut pas surmonter le problème du Sida seulement avec l'argent, qui aussi est nécessaire, s'il n'y a pas une âme qui sait appliquer une aide. Et on ne peut pas surmonter ce drame avec la distribution de préservatifs, qui au contraire augmentent le problème. La solution peut être double, une humanisation de la sexualité et une vraie amitié envers les personnes souffrantes, la disponibilité, même avec des sacrifices personnels, à être avec les souffrants. Ceci est notre double force : rénover l'homme intérieurement, lui donner la force spirituelle et humaine pour avoir un comportement juste et en même temps la capacité de souffrir avec les souffrants dans les situations d'épreuve. Cela me semble la juste réponse que l'Église donne, une contribution importante ».

Un message d'espoir ...

- Quel signe d'espoir l'Église voit-elle dans le continent africain ? Pensez-vous pouvoir adresser à l'Afrique un message d'espoir ?

« Notre foi est espoir par définition. Qui porte la foi est convaincu de porter aussi l'espoir. Malgré tous les problèmes que nous connaissons bien, il y a de grands signes d'espoir, de nouveaux gouvernements, de nouvelles disponibilités de collaboration, de lutte contre la corruption - grand mal qui est en train d'être surmonté - et aussi l'ouverture des religions traditionnelles, à la foi chrétienne. Tous connaissent Dieu mais il apparaît un peu lointain et ils attendent qu'il se rende plus proche. Et ensuite le culte traditionnel des ancêtres trouve sa réponse dans la communion des saints : qui ne sont pas les canonisés mais tous nos morts. Il y a une rencontre profonde qui donne espoir. Le dialogue interreligieux croît. J'ai parlé avec plus de la moitié des évêques et ils me disent que la relation avec les musulmans est très bonne. Le respect réciproque la responsabilité éthique commune, la joie d'être chrétien grandissent. Un problème des religions traditionnelles est la peur des esprits. Un évêque m'a dit : quelqu'un est vraiment converti et devient pleinement chrétien s'il sait qu'avec le Christ il n'a pas peur, que Jésus est plus fort que les esprits. Les forces spirituelles, sociales et économiques qui donnent espoir grandissent aussi. Voilà : je voudrais mettre en lumière l'élément de l'espoir ». (source : VIS)

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