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08.01.04 - Brésil : La prise d'otages est terminée.

Les trois religieux des Missionnaires de la Consolata et leurs élèves pris en otage dans la nuit de lundi à mardi, dans l'Etat de Roraima, dans le nord du Brésil, ont été libérés jeudi 8 janvier dans l'après-midi.

Revenons sur les faits. Un groupe de 200 à 300 personnes, formé de cultivateurs de riz, de "fazendeiros" (propriétaires terriens) et d'indigènes instrumentalisés par des politiciens et des entrepreneurs de Roraima, avait attaqué, le lundi 5 janvier, la mission de Surumu, située en territoire indigène de Raposa/Serra do Sol, prenant en otage les religieux et des élèves. La mission a été prise d'assaut en plein coeur de la nuit, saccagée et dévastée. 9 élèves se trouvait dans le centre de formation indigène actif auprès de la mission de Surumu, moins que les 20 normalement présents dans cette école de formation agro-pastorale.

Selon certains témoins, il semblerait que les responsables de l'attaque ne soient pas des indigènes de la zone. Dans un communiqué diffusé par le diocèse de Roraima peu après l'enlèvement des trois missionnaires, il est affirmé: "Il ne s'agit pas d'un fait isolé; cela fait partie d'une ensemble de manifestations guidées par des cultivateurs de riz, des propriétaires terriens et des hommes politiques … ils bloqueront toutes les routes, ils occuperont le siège de la FUNAI (Fondation nationale indigène responsable pour les actes administratifs concernant les territoires démarqués) et menacent aussi d'occuper la cathédrale du Christ rédempteur et le CIR (Conseil indigène de Roraima)".

Le quotidien "Brasil Norte" , dans son édition sur Internet du 6 janvier, dédie quatre articles à la question de l'homologation des terres indigènes et aux tensions qui se sont exacerbées autour de cette problématique. A ce stade, il semble toujours plus évident que l'assaut à la mission ait été organisé par un cultivateur de riz très connu dans la zone mais dont on ne citera pas le nom, pour des raisons évidentes de sécurité.

Il n'est qu'un des nombreux propriétaires terriens qui s'opposent à la poursuite des procédures pour la démarcation et l'homologation de la zone de Raposa/Serra do Sol (nord-est de l'état de Roraima), une opération qui semble sur le point d'être achevée et qui attribuerait définitivement la zone, en une juridiction unique et non plus en "îlots" séparés, aux populations indigènes.

Trop souvent des tranches importantes de la population voient encore et toujours les indigènes comme une "honte pour le Brésil", les accusant de posséder trop de terre, de faire obstacle au développement économique, de ne pas produire… En réalité, "en Amazonie comme dans les autres régions brésiliennes, les terres prises par "blancs" ont subies de tels dommages qu’il faudrait des sommes d’argent exorbitantes pour les "récupérer", alors que la forêt, préservée par les indiens, contient bien plus de richesses que les"blancs ne pourront jamais en produire".

Depuis la fin décembre, le climat était déjà tendu dans certaines zones de l'Etat de Roraima après la nouvelle de la signature par le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva pour le mois de janvier de documents pour l'homologation du territoire de Raposa/Sierra do Sol, qui s'étend sur plus d'1,5 millions d'hectares, en faveur des 15.000 indigènes Macuxi, Wapixana, Ingarikó, Patamona et Taurepang qui le peuplent. L'article 231 de la Constitution brésilienne attribue en effet aux indigènes "la possession permanente" et "l'usufruit exclusif" des richesses naturelles sur le sol de ce territoire, dans ses fleuves et lacs de terres traditionnellement occupées.

Selon Marculino, un responsable des indiens Macuxis, le " tuxana " (cacique) de Contão, a négocié avec la police fédérale mardi soir la libération des religieux pour mercredi à 13h00 locales. Mais face aux " informations mensongères " selon lesquelles ils sont maltraités, les indiens ont décidé de les garder en otages " jusqu'à ce que soit rétablie la vérité ". " Les missionnaires se trouvent dans le poste de santé du village indien et ont mangé des gâteaux, du manioc, et bu des rafraîchissements et du caxiri " (boisson indienne), a précisé Marulino, qui dirige depuis mardi l'occupation du bâtiment de la Fondation nationale de l'Indien (Funai) à Boa Vista.

"L'objectif de cette action, d'ailleurs pré-annoncée, est de faire pression sur le gouvernement fédéral afin qu'il renonce à l'homologation dans une zone contiguë au territoire de Raposa" confirme une source de l'agence MISNA. "Le 29 décembre dernier, après l'annonce de l'imminente démarcation définitive du territoire par le ministère de la Justice de Brasilia, nous avons su qu'un célèbre cultivateur de riz local organisait, avec d'autres secteurs opposés à la cause indigène, le barrage des routes qui donnent accès à l'aire" poursuit notre interlocuteur. "L'ordre donné aurait été celui d'arrêter tous les véhicules du diocèse et du CIR, le Conseil Indigène de Roraima, de tenter d'enlever des représentants et d'assaillir la mission de Surumu, comme cela a été le cas".

La mobilisation contre l'homologation du territoire de Raposa/Sierra do Sol - plus d'1,5 millions d'hectares, en faveur des 15.000 indigènes Macuxi, Wapixana, Ingarikó, Patamona et Taurepang qui le peuplent - prend des proportions grandissantes au fil des heures: des barrages routiers bloquent les routes principales vers la capitale Boa Vista et sur les autoroutes 174 et 401 qui relient l'Etat au Venezuela et au Guyana. (source : misna)

Pour plus d'informations : Agence Misna

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