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08.01.04 - France : La laïcité divise les musulmans.

Le projet de loi concernant la "visibilité" religieuse à l'école divise profondément la communauté musulmane tandis que que ses associations laïques opposées à une loi interdisant les signes religieux à l'école se mobilisent difficilement.

Les associations musulmanes "laïques" ,déjà échaudée par le discours de Jacques Chirac à l'Élysée le 17 décembre dernierLes associations laïques opposées à une loi interdisant les signes religieux à l'école se mobilisent difficilement, parce qu'elles sont coincées entre leur volonté de marquer leur mécontentement au lendemain de la publication du projet de loi, et la crainte d'une récupération par des "extrémistes religieux".

Réunies mercredi soir à Paris, des associations tels que le MRAP, la Ligue des Droits de l'Homme, les syndicats d'enseignants et associations de parents d'élèves, pour la plupart signataires le 16 décembre d'un appel commun contre la loi, n'ont pris aucune décision d'action. "Il y a entre nous des nuances d'appréciation, "déclare le président de la Ligue des droits de l'Homme. Pour lui, une manifestation publique n'est pas souhaitable, même si la loi est une vraie catastrophe

La FSU va dans le même sens : "Nous estimons tous que cette loi n'est pas opportune, car elle n'est pas une bonne réponse à l'exclusion et à la ghettoïsation, mais à la différence de certains, nous pensons que le port de signes religieux à l'école est contradictoire avec la nécessité de neutralité de l'école".

"Il faut reconnaître que, même à l'intérieur de notre mouvement, il n'y a pas unanimité sur la loi", reconnaît Mouloud Aounit, secrétaire général du MRAP. En revanche, l'unanimité règne parmi les associations sur le refus de participer à la manifestation du 17 janvier à Paris, initiée par le Parti des musulmans de France (PMF), ou à d'autres initiatives organisées par des associations musulmanes.

Du côté du Conseil français du culte musulman (CFCM), il en est de même. Une fracture important est apparue publiquement le lundi 5 janvier, lors de la réunion du CFCM avec l'absence remarquée du représentant de l'UOIF - pourtant vice-président - alors que ce Conseil allait justement décider de privilégier la concertation et de ne pas soutenir les manifestations du 17 janvier (Paris, Bordeaux, Nantes et Lille) organisées par le Parti musulman de France (PMF) contre cette loi. sur la stratégie à choisir.

Plus encore, au sortir de la rencontre du mercredi 7 janvier avedc le ministre de l'Education nationale, Dalil Boubakeur, recteur de la grande mosquée de Paris, s'est vu contrecarrer sèchement par Mohamed Bechari, le vice-président du CFCM, qui appartient à la Fédération nationale des musulmans de France (FNMF). Au même moment, le site Internet de l'UOIF relayait l'appel de son assemblée générale à " s'associer à toutes les initiatives (manifestations, marches, rassemblements, pétitions) qui défendent les libertés religieuses et s'opposent à tout projet de loi visant à interdire le port du foulard dans les établissements scolaires publics ".

L'UOIF a peur de se trouver dépassée par les franges les plus radicales, les groupes salafistes, en particulier ", observe le P. Christian Delorme, dans un entretien avec le quotidien "La Croix". Ce connaisseur de l'islam estime que ses responsables ne pourront aller jusqu'au bout de la contestation. " Leurs liens avec le Maroc, et notamment avec le roi Hassan VI, sont trop étroits, et l'on sait que ce dernier soutient l'initiative de Jacques Chirac. "

" Cette loi fait le jeu des extrémistes, nous l'avons dit dès le début ", constate, amer, Mgr Jean-Luc Brunin, évêque auxiliaire de Lille, très engagé dans les relations avec l'islam. " Les jeunes musulmans sont entrés dans une logique de victimisation ", poursuit l'évêque qui s'alarme de voir à Roubaix ou Tourcoing le nombre de voiles se multiplier. " Le meilleur du rapport Stasi explique que nous vivons dans une société diverse. Or, la première mesure pour prendre en compte cette diversité se résume à une mesure de prohibition : là, on a loupé la première marche ! ", déplore-t-il. (source : la Croix)

Pour plus d'informations : Conférence des évêques de France

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