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17.04.04 - Le millénaire d'une impossible réconciliation.

Juillet 2004 marque le millénaire de la rupture entre l'Eglise orthodoxe et l'Eglise de Rome, et aujourd'hui encore, il n'est pas très populaire dans les Balkans de dire que les orthodoxes et les catholiques sont issus de la même civilisation religieuse.

"Ici, personne n'a le courage de s'élever jusqu'au Christ et à son message, préférant s'en tenir aux divisions historiques et politiques." C'est le constat que fait le théologien laïc serbe orthodoxe Mirko Djordjevic qui plaide pour un véritable dialogue, qui ne va pas sans risques, et que rapporte le "Courrier des Balkans".

"Les historiens ont tout écrit, ils ont montré le visage et l'oeuvre de l'impérieux Keroularios, patriarche de Constantinople, et celui du légat pontifical. Dans les documents sur leur mutuelle excommunication domine un langage de haine et d'extrême exclusivisme. Toutefois, même pour les chercheurs les plus assidus, il manque l'essentiel : d'où vient cette tension remplie d'émotions et pourquoi cette division des gens et des saints qui ont accepté la première science planétaire, mondialistique, le message du Christ ?"

"Il n'y a pas de solution, disait le pape Pie XI, une solution ne pourrait arriver que par miracle". Le pape a utilisé une expression encore plus étrange : "Cela ne peut que se survoler." Personne encore ne s'est envolé si haut." constyate Djordjevic.

... " Le pape actuel ajoute : "Il n'y aura pas d'avancée dans le rapprochement des orthodoxes et des catholiques, donc de l'Orient et de l'Occident, si " la purification de la mémoire historique " ne se fait pas. Il pense à la catharsis historique, ou mieux encore, à l'équivalent chrétien de cette notion, au repentir commun."

... " Ainsi revient-on toujours aux origines, comme si l'histoire s'était arrêtée, ne serait-ce que dans la conscience. Mais lorsqu'on fait un pas en avant, on en fait aussi sept en arrière. Parfois, quelqu'un se met à énumérer les péchés des orthodoxes et ces derniers les péchés des " Latins ".

..." Ce qui est oublié depuis longtemps remonte au premier plan et devient, souvent sans raison, une pierre d'achoppement. Ainsi, les catholiques sont dans l'erreur car ils se rasent la barbe, mangent de la viande la première semaine du jeûne, et le samedi des oeufs et des produits laitiers, ils ne se marient pas, ils ne respectent pas les icônes, ils sont donc des hérétiques."

" Celui qui connait l'histoire ecclésiastique reconnait ici la liste des " erreurs latines " dénoncées par Keroularios déjà en cette lointaine année 1054. Du point de vue dogmatique, reste la fameuse différence du Filioque, c'est-à-dire que le Saint Esprit procède aussi du Fils, comme l'apprennent les catholiques, à la différence des orthodoxes qui soutiennent que le Saint Esprit est glorifié " par " le Fils."

" Naturellement, les théologues les plus sérieux disent que cela non plus ne doit pas être un obstacle. Cette différence ne devrait pas être plus forte que l'amour. À leur tour, les catholiques font aux orthodoxes une liste de leurs " erreurs schismatiques ".

..."Personne n'a le courage de s'élever jusqu'au Christ et à son message. Même les gens bien intentionnés ne peuvent sortir du sillon du modèle historique. Le père Sava Janjic de Visoki Decani au Kosovo pense de la même façon : " Les tentatives pour surmonter les différences fondamentales entre l'orthodoxie et le catholicisme par l'oecuménisme politique, le piétisme ou par l'oubli n'arriveront jamais à une véritable unification des catholiques avec une Église, Une, Sainte Orthodoxe, Apostolique et Catholique ".

..." Un dignitaire de l'Église orthoxe serbe, l'évêque Artemije du Kosovo est du même avis. Il n'y a pas d'Europe unie, dit-il, et il en indique les raisons : la condition pour que les choses changent en Europe, c'est de renoncer aux erreurs que Rome a faites ces 950 dernières années. Monseigneur Artemije n'admet que la réunification de tous à l'Église orthodoxe. Fondé sur cette idée, l'unité n'a aucune chance d'exister."

" Heureusement, sur un espace oecuménique plus large, toute l'orthodoxie n'est pas de cet avis et pas seulement chez nous. Une sorte de scandale positif survient, comme par exemple lorsque l'évêque controversé de Backa, Irinej, a dernièrement discouru sur l'unité des Chrétiens d'Europe, sur l'orthodoxie et le catholicisme. L'évêque croit à l'unité, il n'insiste pas sur les différences et voit le monde de l'avenir différemment. Il a aussi courageusement abordé le problème du pape et de sa primauté, qui est une " place dangereuse ".

" Si un jour les orthodoxes et les catholiques se réconciliaient, alors, d'après l'évêque Irinej, " conformément à l'ancien ordre canonique, l'évêque de la ville de Rome serait le premier évêque de l'Univers chrétien ".

... "Le pape a demandé pardon aux orthodoxes pour tout le mal que les catholiques leur ont fait dans l'histoire. Il a même invité, ce qui était autrefois inimaginable, le patriache serbe à Rome. Le pardon sera-t-il également demandé du coté serbe, nous ne le savons pas encore. L'appel de Rome est peut-être un instant d'espoir et il ne faut pas le laisser passer. Il y aura toujours des différences, mais il est important qu'elles ne soient pas une pierre d'achoppement. Le meilleur juge sera celui qui aura la force de " survoler " l'histoire, de franchir ce mur qui ne s'élève tout de même pas jusqu'au ciel." Mirko Djordjevic - Courrier des Balkans. 14 avril

Pour plus d'informations : Courrier des Balkans

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