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19.05.04 - Nigeria : A la recherche d'une solution .

La plus haute instance de chrétiens nigérians a demandé mardi que l'état d'urgence décrété dans l'Etat du Plateau, au centre, le soit aussi dans l'Etat de Kano au nord, où des émeutes mortelles contre des chrétiens ont eu lieu la semaine dernière.

" On ne peut penser monter à un arbre en partant de la cime. La déclaration de l'état d'urgence et la suspension du gouverneur du Plateau ne serviront pas à résoudre une situation dont les racines sont ancrées dans la mauvaise gouvernance, la pauvreté et le sous-développement de certaines zones de ce pays. Vu le critère choisi, Obasanjo ferait mieux de s'auto-suspendre pour six mois. Le gouvernement fédéral et le gouvernement fédéré du Plateau ont les mêmes responsabilités face aux tensions ethnico-politico-religieuses enregistrées dans la région".

Telle est la sévère réaction de l'archevêque de Jos, Mgr Ignatius Ayau Kaigama, suite à l'annonce faite aujourd'hui par le président Olusegun Obasanjo de déclarer l'état d'urgence et de suspendre le gouverneur et le vice-gouverneur du Plateau pour six mois après les avoir qualifiés de "faibles" et "incompétents" dans leur gestion des violences qui ont opposé des agriculteurs sédentaires majoritairement chrétiens d'ethnie Tarok à des éleveurs nomades essentiellement musulmans, les Fulani. Ces affrontements ont causé ces dernières semaines des centaines de morts parmi les musulmans et ils ont été suivis de représailles contre les chrétiens ailleurs dans le pays.

"Nous avons été surpris par les décisions du gouvernement fédéral" a poursuivi Mgr Kaigama, "parce qu'après les violences provoquées il y a deux semaines, le calme revenait progressivement; les mesures adoptées par le gouvernement donnent l'impression que le Plateau est de nouveau en proie à la violence, alors que ce n'est pas le cas". "Je ne connais pas les raisons qui ont poussé le président Obasanjo à adopter de telles mesures, mais les problèmes du Plateau et d'autres zones du Nigeria sont structurels. Le gouvernement central et le gouvernement local en sont pareillement responsables d'une situation qui s'est aggravée en 2001. Pourquoi chercher des remèdes maintenant?" s'interroge l'archevêque.

"Hier, une rencontre entre les chefs religieux de toutes les religions, catholiques, protestants et musulmans, s'est tenue chez moi. Nous avons décidé d'oeuvrer ensemble pour tenter d'arranger les choses, mais surtout de faire arriver l'écho de notre voix partout, au Nigeria et ailleurs" a conclu Mgr Kaigama.

"Kano... a ardemment poursuivi à la moindre occasion le plan d'extermination des non musulmans", a déclaré Peter Akinola, primat de l'Eglise anglicane du Nigeria et président de l'Association des chrétiens du Nigeria, une structure oecuménique. "Maintenant nous nous demandons pourquoi seulement l'Etat du Plateau, pourquoi pas Kano, Delta et Bauchi où ont eu lieu des crises incessantes ?", a demandé Peter Akinola.

Les 11 et 12 mai, de violentes émeutes anti-chrétiens ont eu lieu à Kano, qui ont fait un peu plus de 30 morts et plus de 30.000 déplacés, majoritairement chrétiens. Mais le vice-président pour Kano de l'Association des chrétiens du Nigeria, Matthew Abdullahi, a affirmé mardi que quiconque déclarait "qu'il y a moins de 1.000 victimes chrétiennes commet un mensonge flagrant. Soit il prend parti soit il fait partie de ceux qui ont commis ces atrocités".

L'Etat de Kano est gouverné par Ibrahim Sherakau, qui mène une politique d'application intégrale de la Charia, et dont une des dernières mesures prises avant ces émeutes a été d'interdire la vente et la consommation d'alcool aux chrétiens. Le nombre total de victimes des violences interethniques et inter-religieuses depuis l'élection de M. Obasanjo en 1999 est estimé à 10.000. (source : misna)

Pour plus d'informations : Agence Misna

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