22.05.04
- France : Le mariage homosexuel.
Le maire de Bègles, une commune de son diocèse, ayant
décidé de célébrer un mariage civil entre
deux personnes homosexuelles, l'archevêque de Bordeaux, Mgr Jean-Pierre
Ricard, également président de la Conférence des
évêques de France, a dit clairement les raisons de son
refus.
Par contre, certains partis politiques se sont crus obligés de
faire chorus, d'autres personnalités de ces même partis
désapprouvent. Le secrétaire général du
Parti socialiste, François Hollande, a dit, sans attendre, son
accord. L'ancien président socialiste, Lionel Jospin, se déclare
nettement contre et Robert Badinter également socialiste et ancien
président du Conseil Constitutionnel français, hésite
à se prononcer. Dans les milieux politique français du
centre ou du centre-droit, on remarque plus d'oppositions que d'hésitations.
Dominique Perben, le Garde des Sceaux et ministre de la Justice déclare
la décision du maire de Bègles, illégale dans le
cadre actuel de la législation française.
"Vous avez dit "mariage" ? Mariage homosexuel ? Pourquoi non,"
déclare Mgr Ricard dans
l'éditorial de la revue bimensuelle de son diocèse.
Nous en donnons ici le texte.
" Monsieur Noël Mamère célèbrera-t-il en sa mairie de Bègles un
mariage de deux personnes homosexuelles, le 5 juin prochain ? Cela est-il
conforme au Code civil ? Ces questions ont alimenté les articles des
journaux et les conversations depuis quelques semaines. Elles ne sont
pourtant pas les plus importantes. Car la question de fond est bien
celle-ci : notre société peut-elle reconnaître l'union de deux personnes
homosexuelles (et éventuellement d'autres formes d'union) comme un "mariage"
?
"Certains militent pour cette reconnaissance. Ils dénoncent comme
discriminatoire la volonté du législateur et éventuellement d'une société
de ne reconnaître que le mariage hétérosexuel. Ils qualifient celui-ci
de "traditionnel", de "bourgeois". Ils le considèrent comme une option
parmi d'autres choix possibles. La loi civile ne doit-elle pas tenir
compte de l'évolution des mours, l'entériner et parfois l'anticiper
dans l'opinion publique ? Je dois dire mon désaccord avec cette façon
de voir.
" Même s'il y aura toujours une distance entre l'expression des
valeurs d'une société et ce qu'en codifie la loi civile, celle-ci doit
renvoyer à la symbolique, à la culture et à la vision de l'homme dont
cette société est porteuse. Or, sur ce point, notre société ne saurait
mettre sur le même plan l'union d'un homme et d'une femme, ouverte sur
la naissance de nouveaux êtres, avec celle de deux semblables, qui ne
l'est pas. En effet, si notre société donne tant d'importance au mariage
d'un homme et d'une femme, ce n'est pas simplement pour prendre acte
de la constitution d'un couple (dans ce cas, pourquoi alors le refuser
socialement aux personnes homosexuelles ?) mais c'est parce que le mariage
assure également le renouvellement des générations, la lisibilité de
la filiation et de la parenté et apporte de la sécurité aussi bien aux
adultes qu'aux enfants issus de leur union, ce qui n'est pas le cas
d'une union entre personne s du même sexe.
" Certains objecteront qu'il devrait y avoir possibilité d'adoption
pour des personnes homosexuelles. Si le mariage concerne tant la filiation,
on ne sera pas surpris que cette question de l'adoption arrive très
vite dans le débat. Or, il faut le dire : un enfant qui est né de l'union
d'un homme et d'une femme a besoin d'un père et d'une mère. Pour structurer
sa propre personnalité, il faut qu'interviennent auprès de lui image
paternelle et image maternelle.
" Répondre qu'il suffit qu'un enfant se sente aimé n'est pas satisfaisant.
L'enjeu éducatif est autrement exigeant. En effet, il faut aussi savoir
dans quelle structure relationnelle un enfant doit être placé pour se
développer. Le bien de l'enfant doit primer sur le désir d'enfant de
ceux qui souhaiteraient être "parents". Dire ceci, est-ce faire preuve
de discrimination vis-à-vis de personnes ou tout simplement rappeler
un principe de réalité ?
" Le Catéchisme de l'Eglise catholique nous rappelle que les personnes
présentant des tendances homosexuelles foncières "doivent être accueillies
avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute
marque de discrimination injuste." (n°2358) Mais il n'y a rien de discriminatoire
à rappeler que ce sont des hommes et des femmes qui se marient, qui
conçoivent, éduquent et adoptent des enfants. Quand l'Eglise intervient
dans ce domaine, ce n'est pas pour défendre une éthique étroitement
confessionnelle mais pour soutenir les principes fondateurs de la vie
sociale elle-même.
" Tout ne contribue pas à renforcer le lien social. Il y a des
choix à faire et des points de repère structurants à rappeler. De façon
paradoxale, ce débat sur le "mariage homosexuel" peut être l'occasion
d'approfondir et de réaffirmer nos convictions sur le mariage, son importance
et sa place dans notre société. En effet, celui-ci a plus besoin aujourd'hui
d'être soutenu que fragilisé."
Mgr Jean-Pierre RICARD Archevêque de Bordeaux et évêque de Bazas.
(source : cef)
Pour plus d'informations : Conférence
des évêques de France
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