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31.07.04 - Madagascar : Le président et les Eglises.

Après avoir joué un rôle décisif en faveur de Marc Ravalomanana lors du changement de pouvoir, les chrétiens ont aujourd’hui une position plus nuancée car les promesses présidentielles risquent de ne rester qu'un slogan.

La meilleure volonté se heurte aux limites du système : comment recruter 2 000 à 3 000 instituteurs par an, quand il n’y a dans le même temps que 30 000 nouveaux bacheliers ? Élu avant tout parce que la majorité des citoyens ne voulait plus de Ratsiraka, Marc Ravalomanana, dont l’implantation électorale reste fragile, risque de devoir affronter une grogne populaire croissante s’il ne redresse pas rapidement la barre de l’économie.

Des foyers de contestation sont latents, notamment parmi les étudiants et les « réservistes », d’anciens militaires. Une série d’attentats à la grenade, non revendiquée, a été commise le mois dernier dans différentes villes du pays. Quelques jours avant la fête nationale, la déclaration du Conseil des Eglises chrétiennes a fait l’effet d’un pavé dans la mare. « Changement de ton », « attaque du pouvoir », « interpellation au gouvernement » ont titré les journaux.

A l’issue de leur congrès, les 300 délégués, catholiques, anglicans, luthériens et réformés ont en effet mis le nouveau pouvoir face à ses responsabilités, comme le FFKM l’a toujours fait en vingt-cinq ans d’existence. « C’est avec respect que nous vous disons à vous, les dirigeants du pays, que vous devez chercher par tous les moyens à réduire les difficultés de la population et faire en sorte qu’elle ressente un changement," peut-on lire dans le message final du 5ème congrès.

..." Gare à l’insensibilité face aux souffrances des autres ! " Ces quelques mots ont été interprétés comme une prise de distance par rapport au président Ravalomanana. Les délégués du FFKM précisent quelle doit être, à leurs yeux, la distance entre Églises et État : « Le pouvoir et les Églises s’occupent du même peuple, peut-on lire. C’est pour cela que tout ce que l’État fait pour le bien et pour faire progresser réellement le pays est loué et encouragé par les Églises. Dans certains domaines, les Églises sont prêtes à travailler avec les pouvoirs publics, chacun selon ses responsabilités et dans un absolu respect mutuel. »

" L’énumération par le FFKM de maux tels que la corruption et le programme scolaire n’équivaut pas à une attaque contre le pouvoir" , ont précisé le cardinal Armand Gaëtan Razafindratandra, Mgr Rémi Joseph Rabenirina (Église anglicane) et les pasteurs Benjamin Rabenorolahy (Église luthérienne) et Edmond Razafimahefa (Église réformée).

..." Le FFKM travaille complètement avec l’État pour continuer tout ce qui dans notre pays », insistent-ils. Une mise au point qui a suscité la mauvaise humeur de certains, laïcs et clercs, qui trouvent que les liens entre Églises et État sont devenus trop proches. « Si vous avez un ami qui commet des gaffes et que vous ne lui dites rien, vous n’êtes pas un vrai ami", gronde un prêtre malgache ayant participé au congrès.

De fait, la position de Marc Ravalomanana est singulière. En plus d’être resté de facto à la tête d’une des principales entreprises privées du pays, le président de la République est aussi depuis 2001 vice-président de l’Église réformée malgache, la FJKM. Non seulement il n’a pas envisagé d’abandonner ce mandat une fois élu à la tête du pays, mais selon certaines sources, il aurait bien l’intention de rester à son poste à l’issue du prochain synode national de la FJKM, qui doit se tenir du 18 au 27 août.

Outre la situation particulière du chef de l’État, qui finance généreusement les activités de son Église et inaugure des temples durant ses tournées en province, le changement de régime a aussi marqué la multiplication des références à Dieu dans les discours des élus, et l’instauration de prières dans les écoles publiques ou au Parlement. Madagascar est une république laïque dont la Constitution et l’hymne national font référence à Dieu. On considère que la moitié de la population est chrétienne, partagée à égalité entre catholiques et protestants. (source : La Croix)

Pour plus d'informations : La Croix

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