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du 1 au 4 mai 2006 (semaine 18)
 

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2006-05-04 - Chine
FAUT-IL SUSPENDRE LES NÉGOCIATIONS ?

Les termes employés dans la déclaration et la réaction du Saint-Siège concernant les récentes ordinations sont à situer dans le cadre de la situation actuelle de "l'Église officielle" et dans la cadre des rapports du gouvernement avec cette Église.

"Les évêques récemment élus et ordonnés (...) ont été loués par de nombreux hommes d'Église et fidèles", a affirmé le communiqué du ministère. "De nombreux" nuance le ministère, ... pas tous, c'est pourquoi le Vatican peut lui répondre dans sa déclaration que selon "nos informations, des évêques et des prêtres ont été soumis à de fortes pressions et des menaces de la part d'organismes extérieurs à l'Eglise pour participer à l'ordination des évêques".

"J'ai été contraint de me rendre à Kunming pour la consécration de Mgr Ma Yinglin, dimanche dernier car je n'ai pas pu donner d'excuses solides pour refuser la demande émanant de l'association patriotique des catholiques chinois... Non, je n'ai pas pu refuser, la pression était trop forte." Cet extrait d'une lettre écrite par un des évêques chinois consécrateurs à Kunming dimanche dernier, dont le quotidien catholique français "La Croix" a pu obtenir la teneur, montre à l'évidence combien les consécrations d'évêques du 30 avril et du 3 mai ont été organisées sous la contrainte par l'organisme politique chargé de contrôler les évêques officiels de l'Église catholique de Chine depuis 1957, date de la rupture entre Rome et Pékin.

Après enquête, on a pu apprendre qu'on avait menacé cet évêque de lui couper tous les budgets destinés à la rénovation et à la construction de nouvelles églises dans son diocèse...

Un autre témoignage recueilli par La Croix explique comment l'évêque de Wuhan, Mgr Dong, reconnu par Rome il y a quelques années, âgé de plus de 90 ans et qui n'a plus toute sa tête, a été traîné jusqu'à Kunming, à des milliers de kilomètres de là, pour être le consécrateur principal du nouvel évêque Mgr Ma Yinglin, pour qui lAssociation patriotique a de grandes ambitions. Il s'agirait ni plus ni moins pour lui à l'avenir de prendre la succession p de l'évêque de Pékin, Mgr Fu Tieshan (marié et père de deux enfants) qui devrait bientôt prendre sa retraite.

"L'Association patriotique a fait les choses en grand à Kunming," confirme i un prêtre chinois du diocèse de Hong Kong, car il y avait dix évêques présents qui ont dû céder à des chantages pour se rendre sur il place, rendant les consécrations à valides bien qu'illicites pour le Vatican."

D'aucuns pensent qu'il s'agit en fait d'une contre-attaque de la part de l'Association officielle alors que les négociations entre le Saint-Siège et Pékin au plus haut niveau politique laissaient espérer dans un avenir proche un rapprochement officiel entre les deux parties. L'on sait que l'association, une structure politique issue d'un autre temps, est devenue l'obstacle majeur à une reprise des relations entre Pékin et Rome. Cet "État autonome au sein de l'Église de Chine" redoute plus que tout cette normalisation car l'association y perdrait ses prérogatives, ses pouvoirs et ses privilèges.

De fait, même les évêques officiels, souvent assimilés à tort au régime communiste, souffrent de multiples pressions et chantages de la part de l'association qui joue le rôle de lien entre eux et le régime politique. Dissoudre cet organisme serait l'idéal, les évêques jouant alors leur rôle à travers la Conférence des évêques de Chine, 'mais cela impliquerait un bouleversement total de toute la politique religieuse mise en place au début des années 1950.

Plusieurs forces s'affrontent à Pékin. Le ministère des affaires étrangères chinois a souligné jeudi matin, juste avant la réaction venue du Vatican, que "la Chine souhaite sincèrement améliorer les relations entre la Chine et le Vatican et nous avons fait de vrais efforts", dit le communiqué du ministère des Affaires étrangères,d'une tonalité très différente de celle habituellement exprimée par l'Association patriotique. Ce qui fait dire à certains spécialistes qu'il s'agit une nouvelle fois, comme en l'an 2000, d'un «sabotage» visant à détruire les avancées politiques durement acquises ces derniers mois.

Mais le contexte de 2006 n'est plus celui de 2000. Hu Jintao est bien en place, les Jeux olympiques approchent et la réputation politique du Vatican n'est plus aussi «sulfureuse» aux yeux de Pékin que par le passé. Benoit XVI a envoyé dès son élection l'an dernier des signaux très amicaux en direction de la Chine. L'expression officielle de sa forte contrariété d'hier offrira peut-être l'occasion aux autorités politiques chinoises de mettre un terme aux agissements incontrôlés de l'Association patriotique et de donner plus d'autonomie aux évêques reconnus officiellement par le gouvernement.

D'autant que sans minimiser les faits, Pékin veut en réduire la portée. C'est peut-être le sens à donner à cette phrase du communiqué où les autorités chinoises ont jugé les critiques du Vatican "dépourvues de raisons".

De son côté, le Vatican maintient sa "reconnaissance ecclésiale" à ces évêques "officiels" dans l'unité de l''Église. "Une grave blessure a été infligée à l'unité de l'Eglise pour laquelle de sévères sanctions sont prévues par le droit canon". La déclaration ne spécifie pas si le pape a décidé d'excommunier les deux nouveaux évêques chinois ou s'il s'agit d'une menace.
Certains vaticanistes experts en droit canon précisent que l'excommunication ne sera pas effective si les ordinations ont été célébrées sous la pression ou la menace et contre la volonté des intéressés. Et l'on en revient à la déclaration d'un évêque cité par le quotidien "La Croix". (source : EDA - La Croix)

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