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du 31 mai au 3 juin 2006 (semaine 22)
 

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2006-06-03 - Timor
LA SOUTANE, LES CAILLASSES ET LA CAGOULE.

Il donne des claques aux jeunes émeutiers encagoulés. Il confisque les pierres des mains même des casseurs... Face aux violences qui se poursuivent au Timor oriental, le P. Guillermo Lebron, jésuite, fait front et pour cela, il remet sa soutane.

Le Timor oriental connaît une recrudescence de la violence. Le P. Lebron l'attribue aux tensions historiques entre les ethnies de l'Est, les "lorosae", et celles de l'Ouest, les "loromonu". Les Orientaux accusent les Occidentaux d'avoir collaboré avec l'envahisseur indonésien, qui a occupé le pays de 1975 à 1999, multipliant les violations des droits de l'homme.

Ces griefs historiques sont encouragés par l'extrême pauvreté de la population. Le Timor est le pays le plus pauvre d'Asie avec un chômage massif et une population très jeun e: la moitié des quelque 900.000 Timorais a moins de 18 ans.

"Les jeunes n'ont pas d'avenir. Une machette ou une barre de fer leur fait croire qu'ils sont importants: tout à coup, on a peur d'eux", explique le prêtre.

"Les gens en ont également profité pour se venger et régler des vieilles querelles de voisinage. Certains veulent tout simplement piller les magasins. J'espère que nous allons éviter la guerre civile, avec l'aide de la communauté internationale, de l'Eglise et, bien sûr, de Dieu".

Le Père Lebron ne se contente pas de beaux sermons. Devant les armes à feu artisanales, les lance-pierres armés de flèches métalliques, les machettes et tout l'arsenal du casseur timorais qu'on lui a brandi au visage, le Père s'approche d'eux et comme il s'agit d'un prêtre, on baisse les armes. "J'essaie de porter ma soutane quand je sors. Comme ça, ils peuvent voir que je suis un prêtre. Mais je n'ai pas toujours le temps..."

"Une fois, j'ai dû sortir du séminaire en courant, parce qu'on avait vu de la fumée et entendu des gens crier", dit-il, et c'est comme ça que le prêtre, d'origine paraguayenne, et son compère vietnamien Peter Van Phuc, ont réussi à sauver plusieurs familles des flammes de leur maison incendiée.

Un jour, on l'a vu flanquer une baffe à un ado encagoulé, comme un professeur remonté l'aurait fait à un élève turbulent. Un autre jour, il est allé au devant d'un groupe de jeunes, médusés, pour leur prendre des mains les pierres qu'ils étaient en train de jeter et leur dire de rentrer chez eux.

Mais le Père avoue lui aussi avoir peur: "parfois, nous marchons au milieu d'une foule très remontée, brandissant toutes sortes d'armes, et j'espère alors que Dieu est là pour me protéger". Il y a peu, il a ouvert aux réfugiés les portes de son séminaire, l'un des rares endroits de Dili où l'on se sente encore en sécurité. Ils sont actuellement 700 à y avoir élu domicile.

Les victimes des violences, il les prend dans ses bras, leur murmurant "calma, calma", dans le dialecte local teinté de portugais, langue de l'ancienne puissance coloniale.

Il y a quelques jours, il confisquait aux enfants des réfugiés du séminaire les lance-pierres avec lesquels ils jouaient dans la cour. Il en a alors profité pour donner une leçon de civilité. "On a prononcé des discours et organisé un cérémonie formelle de remise des armes... Les enfants étaient très solennels. J'espère que le message est passé". (information : EDA)

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