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du 1 au 3 septembre 2006 (semaine 35)
 

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2006-09-03 -
OSER LA MISSION DANS UNE EUROPE QUI SE CONSTRUIT .

Du 24 au 28 août, à Paris, 125 théologiens spécialistes de la mission ont travaillé sur le thème : « L'Europe après les Lumières : oser la mission dans l'Europe qui se construit », lors d'une conférence organisée par l'AFOM.

Pour l’Association francophone œcuménique de missiologie (AFOM), un seul souci : honorer le riche héritage des Lumières et comprendre comment il implique de repenser la mission aujourd’hui en Europe.

« Beaucoup de catholiques mettent les difficultés actuelles de l’Église et de la mission sur le compte des Lumières, regrette le P. Jean-Marie Aubert, responsable de la Coopération missionnaire pour l’épiscopat français et coprésident catholique de l’Afom. Cette hostilité semble injustifiée, car beaucoup de valeurs des Lumières sont consonantes avec l’Évangile. »

Pour lui,
les principaux apports des Lumières sont : l’autonomie de la raison et l’appel à «oser penser par soi-même», le souci de l’universel et la formulation des droits de l’homme, l’appel à la liberté, et un art de vivre marqué par «l’attention à l’autre» et le désir de communiquer avec lui.

À la lumière de cet héritage, et dans laconférence d'ouverture, le théologien a tenu à rappeler que, d’un point de vue religieux, les Lumières « ne sont pas antichrétiennes » mais qu’elles se caractérisent par « un refus du pouvoir politique de l’Église. »

L’un des apports du colloque a certainement été la confrontation des analyses du paysage religieux européen. Pour Grace Davie, sociologue des religions à l’université d’Exeter (Grande-Bretagne), la situation d’aujourd’hui se caractérise par un « croire sans appartenir » (« believing without belonging ») – l’individu peut être croyant sans être membre d’une communauté ecclésiale – et par le maintien d’une « religion par procuration ».

Durant ces quatre jours, les intervenants ont ainsi cherché à redéfinir le rôle de la mission face à une situation religieuse inédite en Europe, qui fait de ce continent un cas particulier à l’échelle mondiale. Par-delà des divergences d’appréciation sur les Lumières, les théologiens ont tous plaidé pour une mission qui ne se place pas dans un rapport d’opposition à la culture qui en est résultée. « Le pire serait un retour à l’irrationnel, sous toutes ses formes, y compris de religiosité », a souligné François Bousquet.

Dans la même ligne, Knut Wenzel, de l’université de Ratisbonne, a vigoureusement plaidé pour une mission qui soutienne le « sujet ». Il entendait répondre à la critique du sujet qui caractérise la postmodernité. Le théologien allemand a plaidé pour la notion de « subjectivité radicale », invitant la théologie et la pratique missionnaire à soutenir le « sujet capable » (Paul Ricœur), qui est aussi un « sujet sous pression », éprouvé par l’immensité des responsabilités qui pèsent sur lui : réussir à s’orienter soi-même, réussir à s’inventer soi-même, réussir à se rendre flexible dans tous les domaines.

La réalité plurireligieuse nouvelle de l’Europe a également été au cœur des débats des théologiens. L'on y a a souligné combien la distinction entre espace privé et espace public (héritée des Lumières et de leur souci d’éviter la confrontation violente des convictions individuelles) était remise en cause par l’arrivée sur le sol européen de croyants, musulmans ou chrétiens, n’ayant pas la même conception de l’espace public. Devant cette nouveauté, les débats ont souligné l’importance d’aller à la rencontre des autres croyants.

Peter Lodberg, professeur de théologie à l’université d’Aarhus (Danemark), a ainsi invité les ministres des Églises à être « en contact journalier avec des personnes de traditions religieuses différentes » : « Le pasteur est responsable de maintenir et de développer l’identité chrétienne comme source de coopération et de résolution non-violente des conflits », a-t-il souligné.

Éducation, écoute et dialogue : il n’est pas apparu, aux théologiens réunis à Paris, d’autres réponses possibles à la situation religieuse de l’Europe et à la coexistence en son sein de la prémodernité, de la modernité et de la postmodernité. Un cocktail inédit, qui ne doit pas devenir explosif. (information : AFOM)

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