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2006-09-10- Indonésie
ÉPOUVANTABLE INSTRUMENTALISATION DE LA MORT.
L'exécution programmée, sans date encore fixée à ce jour, des trois paysans catholiques accusés d'avoir dirigé une milice antimusulmane et dont la culpabilité des meurtres qui leur sont reprochés est douteuse divise l'Indonésie.
Les communautés chrétiennes et les communautés musulmanes s'opposent en cette affaire. Dans cette région, les affrontements entre chrétiens et musulmans ont coûté la vie à un millier de personnes en 2000 et en 2001.
Ces trois paysans pauvres, Fabianus Tibo, Dominggus da Silva et Marinus Riwu, auraient fomenté des attaques ayant fait de nombreux morts en 2000 dans le centre de l'île de Célèbes.
Emprisonnés en avril 2001, condamnés à la peine capitale, ils nient cependant catégoriquement avoir dirigé une milice. "Nous ne savons pas précisément quel fut leur rôle dans les massacres et certaines personnes affirment qu'ils sont complètement innocents", affirme Sidney Jones, spécialiste de l'islamisme en Indonésie. "Je ne pense certainement pas qu'ils aient été des cerveaux". Ils savent à peine écrire et lire.
Amnesty International "craint que ces trois hommes n'aient pas bénéficié d'un procès équitable en 2001" et cite les manifestations hostiles devant le tribunal et les intimidations visant leurs avocats. Leurs défenseurs affirment que les trois villageois sont des boucs-émissaires. Une ONG a rassemblé une liste de seize noms, ceux, selon elle, des vrais meneurs.
La mise à mort de Tibo, Riwu et da Silva est aujourd'hui considérée par les musulmans radicaux comme une question de principe. Voilà des semaines qu'ils manifestent pour que l'exécution ait lieu. "La communauté musulmane estime généralement que Tibo était le responsable sur le terrain. Son implication dans les tueries est prouvée", a assuré Adnan Arsal, un dirigeant musulman de Poso, ville où se sont déchaînées les violences.
Le P. Mudji Sutrisno, prêtre catholique, regrette à cet égard que "le gouvernement tente d'être équitable." On attend en effet l'exécution attendue de trois islamistes, auteurs des attentats de Bali de 2002, qui eux revendiquent clairement leurs actes sanglants."Les condamnés musulmans et chrétiens seraient exécutés en même temps".
Le gouvernement pourrait ainsi chercher à calmer les islamistes, qui, au centre de Célèbes, dans l'île de Sulawesi, continuent de harceler les chrétiens, malgré un accord de paix de 2001.
Le gouvernement et le président indonésien Susilo Bambang Yudhoyono, qui a refusé toute grâce, sont soumis à diverses pressions. D'un côté, une partie des intellectuels et des médias indonésiens, le clergé, le pape Benoît XVI, l'Union européenne et même des responsables musulmans lui ont demandé "un geste de clémence" pour les "trois de Poso". De l'autre, il fait face à une opinion publique à 90% musulmane, très en faveur de la peine de mort.
"Certains responsables gouvernementaux estiment que si les trois de Poso ne sont pas exécutés la violence se poursuivra au centre de Sulawesi et que, d'une certaine façon, si vous offrez à la communauté musulmane l'exécution de ces trois hommes, alors soudainement le sentiment d'injustice prendra fin", a analysé Sidney Jones, qui estime qu'il s'agit par ce "marchandage " d'une "instrumentalisation épouvantable du recours à la peine de mort"..
Un chrétien a encore été tué mercredi par une bombe artisanale et de tels crimes sont récurrents. Trois lycéennes chrétiennes avaient été décapitées fin novembre 2005 à Poso au moment où elles revenaient de leur école. (information : indian catholic)
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