Changer de style - Changer de rythme

Comment appliquer l'enseignement de l'Église à propos du Carême, comment le Carême peut-il avoir une influence réelle, et non point seulement extérieure sur notre existence, alors que les conditions de notre sont très différentes de celle qu'on vivait jadis.

On vivait en effet dans une communauté relativement restreinte, et souvent encore marquée par la proximité des rythmes de la vie rurale, au sein d'un monde organiquement chrétiens où le rythme même de la vie d'un chacun était donné par l'Église.

Nous vivons aujourd'hui dans une société urbaine, technique, avec le pluralisme de ses croyances religieuses, le sécularisme de sa vision du monde. Le Carême n'est plus "visible". Est-ce une raison de nous lamenter ou de nous replier ?

DANS LA REALITE QUOTIDIENNE

L'Eglise nous appelle à trouver un autre rythme, un autre style, mais qui restent dans la perspective fondamentale de ce temps. Il nous faut en faire une force spirituelle dans la réalité quotidienne de notre existence, en assumant les richesses spirituelles de notre temps, en ayan assez de foi créatrice pour les épanouir en message de Dieu.

Le Carême peut alors devenir un moment privilégié de la recherche du sens, considéré en termes de vocation et d'appel de Dieu, du sens de la vie professionnelle, du sens de ma relation aux autres, du sens de l'amitié, du sens de ma responsabilité. Il n'y a aucun métier, aucune vocation qui ne puissent être "transformés", ne fut-ce qu'un peu, non pas en termes de plus grande efficacité ou de meilleure organisation, mais en termes de valeur humaine.

UNE REDECOUVERTE DE LA FOI

Si donc le Carême peut devenir pour l'homme une redécouverte de lui-même et de sa vie, il doit être plus encore une redécouverte de sa foi, de son sens divin et de sa profondeur sacrée.

C'est sans doute là que se situe le véritable sens du jeûne. En nous abstenant de la nourriture que nous redécouvrons sa douceur et sa finesse que les excès, la gourmandise, la "goinfrerie" détruisent. Nous réapprenons à la recevoir de Dieu avec joie et gratitude, qui a créé tous ces éléments constitutifs de la nourriture des hommes,"fruits de la terre et du travail des hommes pour qu'ils deviennent pain de vie."

C'est en réduisant la musique et les divertissements, les conversations et les entretiens superficiels, que nous redécouvrons la valeur dernière des relations humaines, du travail de homme et de son art.

"Dieu se fit entendre dans la brise légère", nous dit le prophète. Et nous redécouvrons tout ceci tout simplement parce que nous redécouvrons Dieu lui-même, parce que nous retournons à lui, et, en lui, à tout ce qu'il nous a donné, dans sa miséricorde et son amour infinis.

MISE EN RELATION AVEC LA VIE

C'est un même effort d'intériorisation de toutes nos relations qui nous, est demandé ici, du fait que nous sommes des êtres libres, devenus sans le savoir, bien souvent, prisonniers de systèmes qui déshumanisent progressivement le monde. Et notre foi ne peut avoir un sens que si elle est mise en rapport avec la vie dans toute sa complexité

Il est tentant de passer à côté et d'évincer le sérieux des exigences de la religion sur nos vies, exigences qui nous demandent engagement et effort. Si l'Église catholique a jugé utile de réduire d'abord le jeûne à un strict minimum, elle nous demande d'autres efforts sans doute plus exigeants, en particulier dans le domaine de la prière, de la réconciliation.

Que ce soit ou non le Carême, le monde qui nous entoure et dont nous faisons partie intégrante, ne change pas pour autant. C'est pourquoi cette situation exige de nous une nouvelle imagination créatrice et un nouvel effort pour repenser le lien religieux qui existe nécessairement entre "l'extérieur" et "l'intérieur". Ce serait une véritable aberration que de diviser notre vie en deux parties, la partie religieuse et la partie séculière, qui seraient de moins en moins interdépendantes. Il faut donc faire un effort spirituel pour transposer les coutumes et les rappels hérités de la tradition, qui constituent les moyens de notre effort de Carême.

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