Pour vivre au rythme de l'Eglise universelle.
La visite apostolique du Pape à Chypre
du vendredi 4 au dimanche 6 juin 2010
 
  5 juin : Avec les prêtres, les religieux, les religieuses et les animateurs pastoraux  

Dans l'église de la Sainte-Croix, à quelques mètres de la ligne de démarcation, les évêques de la région, les prêtres, les religieux et les religieuses, une délégation de catéchistes et d'animateurs pastoraux ont participé à la messe de l'Exaltation de la Sainte-Croix.

Au début de la messe, le Patriarche latin de Jérusalem a présenté la bienvenue de tous. "Nous nous tournons vers vous comme vers un père, avec nos peines, nos peurs et nos douleurs, et nous attendons de vous une parole de réconfort et d'encouragement", lui a dit le Patriarche Fouad.

Les mots de la méditation du Pape prenaient un sens tout particulier pour ceux qui connaissent le tragique de leur situation dans ces régions. L'espérance, l'amour, la force, la Résurrection, tout cela exeprimait, dans les paroles du Pape les exils et les réfugiés.

Durant la prière universelle il fut également prié pour tous les émigrés qui ont quitté leur famille et qui souvent par un dur trvavail, leur assure, dans leur pays d'origine, des salaires de survie.

DISCOURS DU PATRIARCHE
texte intégral

Saint-Père,
Soyez chaleureusement bienvenu à Chypre !

" Par votre arrivée aujourd'hui sur cette île, vous parachevez votre visite pastorale aux fidèles du Patriarcat latin de Jérusalem, ces hommes et ces femmes qui ont le privilège de vivre sur la Terre Sainte, terre sanctifiée par les événements de l'histoire biblique du salut. Une fois de plus, alors que nous vivons un moment difficile – notre région est en effet menacée par la violence et nous ne pouvons que pleurer ceux qui sont morts, notamment ceux qui sont morts en essayant d'apporter la justice et la paix – votre visite nous réconforte.

" Elle nous encourage à redoubler d'efforts pour ne pas nous taire et travailler à la justice et à la paix, qui peuvent et doivent finir par régner dans notre région et transformer notre Eglise du Calvaire en Eglise de la Résurrection. Nous nous tournons vers vous comme vers un père, avec nos peines, nos peurs et nos douleurs, et nous attendons de vous une parole de réconfort et d'encouragement.

" Ici à Chypre, comme en Jordanie, en Palestine et en Israël, s’est forgée l'identité chrétienne. C'est de Chypre que Joseph Barnabé partit pour nous donner l'exemple lumineux de sa vie chrétienne en déposant tout ce qu'il avait aux pieds des apôtres (Ac 4, 36-37). Il allait devenir le proche collaborateur de saint Paul. Ce furent également des croyants de Chypre qui arrivèrent à Antioche et commencèrent à prêcher la Bonne Nouvelle aux païens, faisant de nous ce que nous sommes aujourd'hui : une Eglise catholique, c’est-à-dire universelle (Ac 11, 20). L’Apôtre des Nations lui-même a visité l'île : Saul il y est arrivé, Paul il en est reparti. Ce changement de nom, signe de la mission universelle qui était la sienne désormais, eut lieu à Paphos (Ac 13, 4-12).

" Saint-Père, c'est mon privilège, en tant que Patriarche latin de Jérusalem, de vous souhaiter la bienvenue, à vous et à votre honorable délégation, dans cette belle île, lieu de résidence de petites communautés catholiques, essentiellement latines et maronites.

" La présence catholique sur cette île remonte à l'époque des Croisades. Nous avons connu de longues périodes de turbulence et de souffrance, et ce jusqu'à l'époque moderne. Le passé n'est pas oublié, mais nous cherchons aujourd'hui à mettre en place les fondations d'un avenir différent, celui du dialogue, du pardon et de la réconciliation qui réunira tous les habitants de cette île : orthodoxes, musulmans, catholiques, ainsi que les autres communautés chrétiennes. C'est bien dans cet esprit que vous êtes venu rencontrer le chef de l'Eglise orthodoxe de Chypre, ainsi que ses fidèles, nos frères et sœurs, qui ont toujours été en majorité ici, et avec qui nous entretenons aujourd'hui des relations fraternelles.

" Nous, catholiques latins, n'avons qu'une présence très modeste ici – peu de gens du pays, un bon nombre de travailleurs étrangers (beaucoup originaires d'Asie), des étudiants, des réfugiés et des retraités. Malgré notre petit nombre, grâce à nos prêtres dévoués, aux religieux et religieuses, aux catéchistes et aux laïcs, nous offrons de nombreux services à la population de l'île. Nos quatre paroisses, trois confiées aux Franciscains et une au Patriarcat latin, sont des centres de culte et de vie communautaire dynamiques.

" Nos écoles, dirigée à Nicosie par les Franciscains et à Limassol par les Franciscaines Missionnaires du Sacré-Cœur, sont ouvertes à tous et assurent un niveau élevé d'éducation. Ces dernières tiennent également un foyer pour personnes infirmes à Larnaca. En outre, il existe des centres de soutien pour les travailleurs étrangers et réfugiés, tenus avec grand dévouement par nos sœurs de Saint-Joseph de l'Apparition à Nicosie, et par la paroisse franciscaine à Limassol. Et ces jours, nous mettons la touche finale à un hôpital de soins palliatifs à Paphos. Sans oublier de mentionner les débuts d'une communauté monastique, celle des Sœurs de Bethléem.

" La communauté catholique latine, dans toutes ses composantes, est ici aujourd'hui devant vous, Saint-Père : notre vicaire le P. Umberto Barato, les prêtres, les religieux et religieuses, les contemplatifs, les membres des différents mouvements ecclésiaux, les catholiques locaux, ainsi que les représentants de nombreuses communautés étrangères. Tout cela constitue la riche diversité et le dynamisme de l'Eglise catholique latine de Chypre, de plus en plus composite. Pour elle nous demandons votre bénédiction et votre soutien.

" Nous, catholiques, attendons également avec beaucoup d'impatience et d'espoir la réunion du Synode de l'Église catholique au Moyen-Orient. Demain, à la Messe, vous nous remettrez l'Instrumentuum laboris, document qui guidera notre travail synodal. Saint-Père, nous vous remercions encore pour votre sollicitude paternelle envers les chrétiens de ces terres, si chers au Seigneur, qui ont été ses témoins depuis l'aube de notre foi.

" C'est en intense prière que nous passons ces quelques jours avec vous, afin que votre mission au service de l'unité et de la réconciliation porte beaucoup de fruit. Que cet appel à la réconciliation et au pardon, à la justice et à la paix pour tous les peuples – et en particulier les peuples de Terre Sainte qui vivent encore sans liberté –, que cet appel lancé à nouveau, cette fois-ci en provenance de Chypre, soit entendu !

" Que Dieu vous bénisse et vous protège dans toutes vos rencontres, et que l'Eglise de Chypre, ainsi que tous les habitants de cette île magnifique, puisse tirer d’abondants bénéfices de votre visite."

LA MÉDITATION DE BENOÎT XVI
texte intégral

Chers frères et sœurs dans le Christ,

Le Fils de l’Homme doit être élevé, pour que quiconque croit en lui ait la vie éternelle (cf. Jn 3, 14-15). Pendant cette messe votive, nous adorons et nous prions notre Seigneur Jésus Christ parce que, par sa Sainte Croix, il a racheté le monde. Par sa mort et sa résurrection, il a ouvert les portes du ciel et il a préparé une place pour nous afin que nous, ses disciples, nous puissions avoir part à sa gloire.

"Dans la joie de la victoire du Christ sauveur, je vous salue vous tous qui êtes ici rassemblés dans l’Église de la Sainte Croix, et je vous remercie de votre présence. J’ai beaucoup apprécié la chaleur de l’accueil que vous m’avez réservé. Je suis particulièrement reconnaissant à Sa Béatitude le Patriarche latin de Jérusalem pour ses paroles de bienvenue au début de la messe et pour la présence du Frère Custode de Terre Sainte. Ici à Chypre, terre qui fut la première escale dans les voyages missionnaires de saint Paul autour de la Méditerranée, je viens parmi vous aujourd’hui, en mettant mes pas dans ceux du grand Apôtre, pour vous affermir dans votre foi chrétienne et pour prêcher l’Évangile qui a donné vie et espérance au monde.

" Au cœur de notre célébration d’aujourd’hui, se trouve la Croix du Christ. Beaucoup pourraient être tentés de demander pourquoi nous, qui sommes chrétiens, célébrons un instrument de torture, un signe de souffrance, de défaite et d’échec. Il est vrai que la Croix exprime tout cela. Et cependant, parce que le Christ a été élevé sur la Croix pour notre salut, elle représente aussi le triomphe définitif de l’amour de Dieu sur toutes les formes du mal dans le monde.

" Selon une ancienne tradition le bois de la Croix viendrait d’un arbre planté par Seth, le fils d’Adam, sur le lieu où Adam avait été enterré. En cet endroit précis, connu sous le nom de Golgotha, le lieu du crâne, Seth planta une graine provenant de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, l’arbre qui se trouvait au milieu du jardin d’Eden. Grâce à la Providence divine, l’œuvre du Malin aurait ainsi été défaite en retournant contre lui ses propres armes.

" Séduit par le serpent, Adam avait abandonné sa confiance filiale en Dieu et il avait péché en mangeant du fruit de l’unique arbre du jardin qui lui était interdit. En raison de ce péché, la souffrance et la mort sont entrées dans le monde. Les effets tragiques du péché, la souffrance et la mort, sont trop évidents dans l’histoire de la descendance d’Adam. Nous le voyons dans la première lecture de ce jour, qui fait écho à la Chute et aux annonces de la rédemption par le Christ.

" Comme un châtiment pour leur péché, des membres du peuple d’Israël, languissant dans le désert, furent mordus par des serpents et ne purent être sauvés de la mort qu’en regardant le signe que Moïse éleva, préfigurant la Croix qui mettrait fin au péché et à la mort une fois pour toutes. Nous voyons clairement que l’homme ne peut se sauver lui-même des conséquences de son péché. Il ne peut se sauver lui-même de la mort. Dieu seul peut le libérer de son esclavage physique et moral.

" Et parce qu’il a tant aimé le monde, il a envoyé son Fils unique, non pour condamner le monde – comme la justice semblait le commander – mais pour que, par Lui, le monde soit sauvé. Le Fils unique de Dieu a dû être élevé, tout comme Moïse avait élevé le serpent dans le désert, pour que tous ceux qui le regarderaient avec foi puissent avoir la vie.

" Le bois de la Croix est devenu le moyen de notre rédemption, tout comme l’arbre duquel elle a été tirée a entraîné la Chute de nos premiers parents. La souffrance et la mort, qui ont été la conséquence du péché, sont devenues les moyens mêmes par lesquels le péché a été vaincu. L’agneau innocent fut immolé sur l’autel de la Croix, et une vie nouvelle a jailli alors de l’immolation de la victime: le pouvoir du mal était détruit par le pouvoir de l’amour qui s’offre en sacrifice.

" La Croix est donc quelque chose de beaucoup plus grand et plus mystérieux qu’elle ne l’apparait au premier abord. C’est en effet un instrument de torture, de souffrance et d’échec mais, en même temps, elle exprime la complète transformation, le renversement définitif de ces afflictions: c’est ce qui en fait le symbole d’espérance le plus éloquent que le monde ait jamais vu. Elle parle à tous ceux qui souffrent – les opprimés, les malades, les pauvres, les parias, les victimes de la violence – et elle leur offre l’espérance que Dieu peut transformer leur souffrance en joie, leur solitude en communion, leur mort en vie. Elle offre une espérance sans limite à notre monde déchu.

" C’est pourquoi le monde a besoin de la Croix. La Croix n’est pas uniquement un symbole privé de dévotion. Elle n’est pas seulement l’insigne des membres d’un groupe particulier au sein de la société, et, en son sens le plus profond, elle n’a rien à voir avec l’imposition par la force d’un credo ou d’une philosophie.

" La Croix parle d’espérance, elle parle d’amour, elle parle de la victoire de la non-violence sur l’oppression. Elle dit que Dieu relève celui qui est humble, qu’il fortifie le faible, qu’il triomphe des divisions et surmonte la haine par l’amour. Un monde sans la Croix serait un monde sans espérance, un monde dans lequel la torture et la brutalité seraient sans contrôle, où la faiblesse serait exploitée et l’avidité aurait le dernier mot. L’inhumanité de l’homme pour l’homme se manifesterait de façon toujours plus horrible, et il n’y aurait aucune fin au cycle vicieux de la violence. Seule la Croix y met fin

" . Alors qu’aucun pouvoir terrestre ne peut nous sauver des conséquences de nos péchés, et qu’aucun pouvoir terrestre ne peut vaincre l’injustice à sa source, l’intervention salvatrice de notre Dieu d’amour a pourtant transformé la réalité du péché et de la mort en leur contraire. C’est ce que nous célébrons quand nous nous glorifions dans la Croix de notre Rédempteur. C’est ce que fait, à juste titre, saint André de Crête en décrivant la croix comme «le meilleur et le plus magnifique de tous les biens; car c’est en lui, par lui et pour lui que tout l’essentiel de notre salut consiste et a été restauré pour nous» (Oratio X; PG 97, 1018-1019; trad. Liturgie des Heures, Office des lectures, 14 septembre)

" Chers frères prêtres, chers religieux, chers catéchistes, le message de la Croix nous a été confié, afin que nous puissions offrir l’espérance au monde. Quand nous proclamons le Christ crucifié, c’est Lui que nous annonçons et non nous-mêmes. Nous n’offrons pas notre sagesse au monde, ni ne revendiquons un mérite quelconque de notre part, mais nous agissons comme des canaux de sa sagesse, de son amour et de ses mérites salvateurs.

" Nous savons que nous sommes simplement des vases d’argile, cependant, étonnamment, nous avons été choisis pour être les hérauts de la vérité qui sauve et que le monde a besoin d’entendre. Ne cessons jamais de nous émerveiller de la grâce extraordinaire qui nous a été faite. Ne cessons jamais de reconnaître notre indignité. Mais, en même temps efforçons-nous de devenir moins indignes de notre noble appel, de peur que par nos fautes et nos manquements nous n’affaiblissions la crédibilité de notre témoignage.

" En cette Année sacerdotale, permettez moi de m’adresser en particulier aux prêtres présents aujourd’hui, et à ceux qui se préparent à l’ordination. Méditez sur les mots qui sont adressés au prêtre nouvellement ordonné quand l’Évêque lui présente le calice et la patène: «Comprenez ce que vous faites, imitez ce que vous célébrez, et conformez votre vie au mystère de la Croix du Seigneur».

" Quand nous proclamons la Croix du Christ, efforçons-nous toujours d’imiter l’amour désintéressé de celui qui s’est offert pour nous sur l’autel de la Croix, de celui qui est à la fois prêtre et victime, de celui en la personne de qui nous parlons et nous agissons lorsque nous exerçons le ministère que nous avons reçu. Quand nous réfléchissons, individuellement ou collectivement, sur nos défauts, nous reconnaissons humblement que nous avons mérité le châtiment que Lui, l’Agneau innocent, a souffert à notre place. Et si, selon ce que nous avons mérité, nous avons part aux souffrances du Christ, réjouissons-nous car nous jouirons d’une plus grande félicité quand sa gloire se révélera.

" J’ai particulièrement conscience, dans mes pensées et dans mes prières, que beaucoup de prêtres et de religieux au Moyen Orient font actuellement l’expérience d’un appel particulier à conformer leurs vies au mystère de la Croix du Seigneur. Là où les chrétiens sont une minorité, là où ils souffrent l’épreuve en raison de tensions ethniques et religieuses, de nombreuses familles prennent la décision de partir, et il peut être tentant pour leurs pasteurs de faire de même.

" Néanmoins, dans des situations de cette nature, un prêtre, une communauté religieuse, une paroisse qui reste ferme et qui continue à rendre témoignage au Christ est un signe extraordinaire d’espérance, non seulement pour les chrétiens mais aussi pour tous ceux qui vivent dans la région. Leur seule présence est une expression éloquente de l’Évangile de la paix, de la détermination du Bon Pasteur de prendre soin de tout le troupeau, de l’engagement inébranlable de l’Église au dialogue, à la réconciliation et à la reconnaissance bienveillante de l’autre. En embrassant la Croix qui leur est tendue, les prêtres et les religieux du Moyen Orient peuvent vraiment faire rayonner l’espérance qui est au cœur du mystère que nous célébrons dans la liturgie de ce jour.

" Prenons tous courage avec les paroles de la deuxième lecture du jour, qui parlent si magnifiquement du triomphe qui a été réservé au Christ après sa mort sur la Croix, un triomphe auquel nous sommes invités à prendre part. «C’est pourquoi Dieu l’a élevé au-dessus de tout; il lui a conféré le Nom qui surpasse tous les noms, afin qu’au nom de Jésus, aux cieux, sur terre et dans l’abîme, tout être vivant tombe à genoux» (Ph 2, 9-10).

"Oui, chers frères et sœurs dans le Christ, que la croix du notre Seigneur Jésus Christ reste notre seul orgueil (cf. Ga 6, 14). Il est notre vie, notre salut et notre résurrection; par lui, nous avons été sauvés et rendus libres. "

(source : VIS)

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