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11.06.02 - Pour des rapports de respect mutuel.

Dans un long entretien publié le 11 mai par les "Izvestia", le patriarche Alexis II a précisé sa pensée vis-à-vis des relations entre son Église et le Vatican, "qui ne peuvent être celles de la concurrence du marché.".

"Nous n'avons aucune raison de craindre une montée significative de l'influence catholique en Russie", estime le patriarche, commentant la création par le Vatican de quatre diocèses en Russie en janvier dernier. "Nous entendons seulement avoir avec l'Église catholique romaine des rapports constructifs et emprunts de respect mutuel."

La Patriarche considère qu'il ne peut accepter les récentes allégations du cardinal Walter Kasper, président du Conseil pontifical pour l'unité des chrétiens, qui, en mars dernier, dans la revue jésuite italienne Civiltà Cattolica, avait reproché à l'Église russe de réagir "idéologiquement" en essayant d'"imposer son hégémonisme au détriment de la liberté de la personne."

Le patriarche rappelle le point de vue de l'Église russe qui déplore l'"initiative inamicale" du Vatican après l'ouverture de quatre diocèses en Russie "sans consultations préalables ni discussion" avec les responsables orthodoxes. Concrètement, cela signifie que l'Église catholique a mis en place des "structures parallèles" à celles de l'Église orthodoxe, et que le territoire qui relève canoniquement de l'Église orthodoxe russe depuis un millénaire s'est vu attribuer le "statut ambigu de 'province ecclésiastique' du Vatican".

Pour le patriarche de Moscou, la notion de territoire canonique est un principe intangible de l'histoire ecclésiale, même si aujourd'hui il est dédaigné par le Vatican "pour des raisons conjoncturelles".

A l'affirmation des responsables du Vatican, selon lesquels l'Église catholique ne déploierait son activité missionnaire en Russie qu'en direction de personnes n'ayant pas de convictions religieuses particulières, le patriarche répond en rappelant "les nombreux cas de conversion d'orthodoxes au catholicisme, qui résultent souvent d'une mauvaise information de ces gens quant aux différences existant entre le catholicisme et l'orthodoxie, voire même parfois d'une exploitation de la situation matérielle difficile dans laquelle vivent ces personnes".

"Comment peut-on parler d''âmes égarées' ou 'oubliées', alors que les deux tiers de la population de notre pays appartiennent à l'orthodoxie, que ce soit par la pratique religieuse, par le baptême, ou par l'identification socioculturelle ?", s'interroge-t-il encore, avant de juger inacceptable d'étendre à la sphère religieuse les principes de "la libre concurrence du marché".

Pour lui, l'attitude générale du Vatican résulte en fait de son "refus fondamental de tenir compte des valeurs religieuses et culturelles traditionnelles des peuples orthodoxes". L'histoire démontre, ajoute-t-il, que le Vatican a toujours essayé d'étendre son influence en Russie quand l'État et l'Église russes traversaient des "périodes d'affaiblissement" : "Il n'y a qu'à voir ce qui s'est passé [dans les années 1920] quand le Vatican a cherché a engager un dialogue avec le gouvernement bolchevique, alors que l'Église orthodoxe subissait de plein fouet les persécutions", rappelle-t-il.

En dépit des difficultés actuelles, l'Église russe continue d'entretenir de "bonnes relations" avec de nombreux diocèses catholiques, couvents, écoles de théologie et institutions caritatives, qui n'ont aucune velléité de prosélytisme et qui souvent ne cachent pas leur déception face aux initiatives unilatérales du Vatican en Russie.

Interrogé sur une éventuelle rencontre avec le pape de Rome, à Moscou ou à l'étranger, le patriarche se déclare prêt "sur le principe". Mais, ajoute-t-il, cette rencontre ne pourra avoir lieu qu'une fois réglés les principaux problèmes qui assombrissent les relations entre les deux Églises : "Une telle rencontre n'a de sens que si elle sert à guérir les plaies du passé et à régler réellement les problèmes existants".

Et de répéter les conditions préalables : rejet de tout prosélytisme, dénonciation de l'uniatisme comme méthode inadaptée à la recherche de l'unité, respect du principe ecclésial de territoire canonique.

Pour plus d'informations : Service Orthodoxe de presse



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