De tous les pays islamiques, l’Arabie saoudite est celui où la liberté religieuse est le plus vigoureusement proscrite, et dans son principe même. Le royaume se proclame « intégralement » islamique, considère le Coran comme la seule Constitution du pays et la charia comme sa loi fondamentale.
Selon l’interprétation théologique du wahhabisme professée par l’État, la terre de la péninsule arabique est le pays natal du prophète Mahomet, la plus sainte de toutes les terres, où l’on ne peut même pas pratiquer les « religions du Livre » tolérées par l’islam, le judaïsme et le christianisme. Pour la même raison, tout ce qui pourrait sembler porter atteinte à cette sorte de virginité religieuse est sévèrement condamné et les autorités sont chargées d’empêcher la diffusion d’aucun autre message religieux que celui de la foi islamique. Toute manifestation d’une foi non musulmane (possession de bible, port de crucifix, de chapelet, prière publique) est donc interdite
La police religieuse (la fameuse mutawwa’in) est investie d’un grand pouvoir et a la responsabilité de contrôler les activités des autres religions. Le « zèle » excessif déployé par la mutawwa’in se solde souvent par des arrestations sommaires et des tortures dans les prisons. La police religieuse incarcère fréquemment des membres de groupes religieux minoritaires, comme les chrétiens et les musulmans chiites, qui sont libérés seulement après avoir signé un document attestant qu’ils renoncent à leur foi.
Les travailleurs émigrés non musulmans sont exposés à l’arrestation, l’expulsion et l’emprisonnement s’ils sont surpris à pratiquer leur religion, ou s’ils sont accusés de possession d’ouvrages religieux ou de prosélytisme. Ces dernières années, grâce à la pression internationale, la famille royale saoudienne a autorisé la pratique d’autres religions mais seulement en privé, bien que la distinction entre la sphère publique et la sphère privée ne soit pas encore clairement définie.
Aucune manifestation ou culte d'une autre religion n'est acceptée et ceux qui expriment à ce titre une opinion différente sont déclarés apostats et passibles de la peine de mort. La liberté de religion de la population non-musulmane d'origine y est très restreinte, et doit s'exercer exclusivement dans le domaine privé.
Les personnes de confession juive, ou simplement personnes ayant un visa pour Israël sur leur passeport, sont interdits de séjour.
De plus, l'accès des villes de La Mecque et Médine est uniquement réservé aux musulmans. |
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LES CHRÉTIENS
Il est difficile de connaître exactement le nombre de chrétiens dans le pays. Il doit atteindre un pourcentage significatif des plus de 8 millions de travailleurs étrangers présents sur le territoire. On estime qu’ils devraient représenter un million de ces travailleurs, issus principalement des Philippines, mais aussi d’Europe, des États-Unis et du Moyen-Orient. Les chrétiens sont privés de toute assistance pastorale, car les prêtres ne sont pas autorisés à pénétrer dans le pays. En substance, les chrétiens n’ont pas le droit d’exprimer leur foi par la pratique d’un culte public.
De nombreux rapports récents ont signalé des interventions brutales de la mutawwa’in au milieu d’offices cultuels, notamment parmi la communauté philippine de Riyad, donnant lieu à la confiscation de toutes les publications religieuses trouvées sur place.
Le 6 novembre 2007, le pape a reçu le roi saoudien Abdallah, « dans une atmosphère cordiale ». Le Saint-Siège et l’Arabie saoudite n’entretenant pas de relations diplomatiques, c’était la première rencontre entre les deux pays, qui se faisait par surcroît à un si haut niveau. Le Vatican avait toujours dénoncé l’Arabie saoudite comme l’un des pays où la liberté religieuse était la moins respectée.
Très peu d’informations ont filtré au sujet de cette « rencontre historique ». La chaîne de télévision Al Djazira a mentionné que parmi les questions abordées figuraient la « situation vécue par la minorité chrétienne en Arabie saoudite, le besoin d’une plus grande coopération inter-religieuse, et les perspectives de paix au Moyen-Orient ».
Commentant cette visite pour AsiaNews, Mgr Paul Hinder, vicaire apostolique en Arabie depuis 2005, a souligné que la liberté de religion en Arabie saoudite restait encore problématique, même si au cours des dernières années on a enregistré moins d’arrestations de chrétiens et le roi a réduit le pouvoir de la mutawwa’in. « Je pense que cette rencontre a été aussi une excellente opportunité pour discuter des droits religieux des chrétiens en Arabie saoudite. Ce sujet n’est pas explicitement mentionné dans le communiqué de presse, mais il y est fait mention de « la présence positive et dynamique des chrétiens ». Je crois que dans ce contexte, le pape a pu discuter aussi de la liberté de culte en Arabie saoudite ».
L'ISLAM
Le 24 mars 2006, en accord avec le ministre de la Justice, le général Ali Al-Harithy, directeur général des prisons, a annoncé que dorénavant les prisonniers seraient libérés au bout de six mois de détention si pendant ce laps de temps ils n’étaient pas encore passés en jugement.
Le gouvernement a donné un important signe d’ouverture en juin 2007 avec la création d’un « Département des lois et des règlements » destiné à examiner les nombreuses accusations et critiques dont a fait récemment l’objet la mutawwa’in. Cette police toute-puissante a la responsabilité de non seulement poursuivre ceux qui boivent de l’alcool, qui ne s’habillent pas conformément aux codes islamiques ou se conduisent de façon « immorale », mais aussi de réprimer toutes les activités religieuses, même privées, qui ne sont pas conformes à l’islam wahhabite.
Dans son premier rapport, la Société nationale pour les droits humains a accusé la mutawwa’in d’avoir « obtenu des confessions par la force » et d’autres violations des droits de l’homme. Ce même mois de juin 2007, trois membres de la police religieuse saoudienne sont passés en jugement, pour la première fois dans l’histoire du pays, pour être impliqués dans la mort d’un homme qu’ils avaient arrêté. Selon les statistiques officielles, en janvier 2007 on dénombrait 3.227 polices religieuses travaillant dans 1.310 centres répartis dans les 13 provinces saoudiennes.
LES MUSULMANS CHIITES
Bien que représentant entre 10 et 15% de la population, les chiites se plaignent toujours de discriminations à leur encontre. Dans la région orientale du pays, où résident la plupart, aucun gouverneur de province, aucun maire ou directeur de centre ministériel n’est chiite; sur les 59 membres des conseils municipaux nommés par le gouvernement, seulement 3 appartiennent à cette communauté. Parmi les membres élus de ces conseils néanmoins, les chiites sont bien représentés, comme en témoigne la ville de al-Qatif.
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Mais sur les 150 membres du Majlis al-Shura (le Conseil national consultatif), seulement 4 sont chiites.
Le gouvernement ne finance pas la construction de mosquées chiites. La demande d’un permis de construire pour leurs mosquées (non requis pour les mosquées sunnites) est une formalité longue et difficile. Les chiites ont donc leurs propres mosquées privées, connues sous le nom de « husseiniya », qui n’ont pas d’autorisation officielle. En janvier 2007, les autorités ont arrêté un membre du clergé chiite pour avoir officié dans une husseiniya illégale |
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LES AHMADIS
Les ahmadis s’estiment musulmans, mais sont considérés comme hérétiques par les autres musulmans, parce qu’ils ne reconnaissent pas Mahomet comme le dernier prophète; c’est pourquoi ils subissent la persécution des fondamentalistes dans beaucoup de pays islamiques, dont le Pakistan, le Bangladesh, l’Indonésie, l’Iran et l’Arabie saoudite. Neuf autres ahmadis ont été arrêtés début 2007. Toutes les personnes arrêtées ont ensuite été expulsées d’Arabie saoudite.
LES ISMAÉLITES
Selon Human Rights Watch, en août et septembre 2006, un membre de la communauté ismaélite, Hadi al-Mutif, a entamé une grève de la faim pour protester contre son emprisonnement dont la raison est d’avoir « insulté le prophète Mahomet ».
En septembre 2006, trois cents ismaélites de Najran ont protesté contre les discriminations envers leurs communautés et demandé la libération de leurs coreligionnaires, en détention depuis l’an 2000. Ils ont aussi réclamé à un juge des excuses publiques pour les avoir traités d’« infidèles » et exigé que soit mis fin à l’implantation de Yéménites naturalisés sur leurs terres.
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