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La chronique hebdomadaire
du P. Pierre Calimé et du P. Alexis Bacquet,
émission du dimanche matin 7h 45.
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Un chrétien vous parle - Dimanche
14 octobre 2001
Pierre Calimé
Il en va
de notre liberté
Bonjour .
Quand va le monde au bruit des armes, il se passe d’étranges choses
dans certains palais dits de Justice. Voilà de quoi il s’agit.
En mars dernier, l’évêque d’Autun est saisi, sous le sceau de
la confidentialité, de la plainte d’une jeune femme, concernant
un prêtre, religieux de Saint-Jean, qui aurait abusé d’elle. En
Avril, l’Evêque, à la demande de la plaignante, saisit le tribunal
ecclésiastique régional pour une enquête selon le Droit de l’Eglise.
Le supérieur de ce religieux, en Juillet, informe la Justice qui
ouvre une information judiciaire.
Aucune dissimulation dans cette affaire puisqu’une double enquête
est engagée à la demande de l’autorité ecclésiastique. L’une considère
ce religieux comme un citoyen devant rendre compte de son acte
devant la Justice de son pays. L’autre concerne le religieux comme
justiciable devant son Eglise, laquelle, si c’est le cas, prononcera
les peines prévues par le Droit Canon.
Et voilà que, en Août, le juge en charge du dossier perquisitionne
les locaux du Tribunal de l’Eglise, à Lyon, que l’on appelle "Officialité".
Cela ne s’est encore jamais vu dans l’histoire. La police saisit
dossiers, disquettes et jusqu’au disque dur d’un ordinateur, c’est
à dire une partie de la mémoire de l’Officialité.
Quantité de dossiers, couverts par le secret professionnel, s’y
trouvent qui n’ont rien à voir avec celui du juge. Qu’importe,
tout est saisi, y compris la correspondance avec le Saint-Siège,
ce qui constitue une violation caractérisée du secret diplomatique.
Il ne s’agit pas d’une "affaire de curés". La même chose peut
arriver, demain, aux journalistes, aux psychiatres, psychologues,
conseillers conjugaux, et autres médecins de famille qui reçoivent
confidences.
On nous rebat les oreilles de la protection de notre vie privée
assurée par la Commission Informatique et Liberté : elle serait
bien gardée. Allons donc !
Un juge peut saisir des secrets de consciences sans rapport avec
son affaire. Sur la mémoire informatique de l’Officialité, il
a trouvé tout ce qui concerne des enquêtes pour une demande de
nullité de mariage, de voeux religieux, de réduction de prêtres
à l’état laïc. Toutes les dépositions recueillies sont faites
sous le serment du secret absolu. Il y va de la liberté de la
parole.
Bien plus: de la liberté de la conscience dans ce qu’elle a de
plus intime, de plus vulnérable. Quand on touche à la liberté
de conscience, c’est la liberté tout court qui est en danger.
La justice est-elle devenue trop précieuse pour la laisser aux
juges ? Le juge doit certes connaître des faits. Il a charge d’estimer
s’ils sont, et de quelle manière, contraires aux lois et règlements.
Il juge au "for externe". Mais il n’a aucune compétence en matière
de secret des consciences. A moins qu’il ne se fasse exécuteur
d’une idéologie totalitaire digne des talibans.
En saisissant une partie de la mémoire de l’Officialité, il a
violé la conscience de dizaines de personnes qui s’étaient confiées
en toute sécurité. C’est un viol de conscience par personne ayant
autorité. Serait-il moins grave que le viol physique et au nom
de quoi?
J’ose alors une question que je vous adresse, puisque c’est en
notre nom que Justice est rendue: qui jugera les juges lorsque,
sans raison , ils violent les consciences?
C’est de notre liberté qu’il s’agit. Et ce n’est pas une mince
affaire. !
Pierre Calimé
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