04.11 - France : L'Assemblée plénière
des évêques.
Le cardinal Louis-Marie Billé a
ouvert dimanche à Lourdes ) l'assemblée plénière annuelle des évêques
de France en évoquant l'intrusion de la justice dans les archives de
l'Eglise, en présentant deux dossiers importants, la catéchèse
et le mariage, et en revenant sur le contexte international qu'il a
jugé "inédit et dramatique."
"La brutalité de toutes ces morts, délibérément provoquées, la volonté
radicale de déstabilisation ont frappé tous les esprits. On a parlé
de choc de civilisation, de guerre de religion", a rappelé le président
de la Conférence des évêques de France à propos des événements
du 11 septembre. "Rien ne pourra jamais justifier une action suicidaire
entraînant des milliers d'innocents dans la mort."
..." En même temps, nous le savons bien, nous ne pouvons pas nous
dispenser de réfléchir sur la situation de notre monde, de discerner
les lignes de fracture qui traversent notre humanité, si nous voulons
promouvoir les valeurs essentielles auxquelles nous tenons. La paix
et la démocratie n'existent pas pour tous, et des pans entiers de la
population mondiale continuent à vivre dans la pauvreté et le dénuement."
" Les Etats-Unis, devenus l'unique superpuissance et le principal
modèle, cristallisent sur eux toutes les haines et tous les mécontentements.
Est-il juste de dire que les attentats de septembre s'appuyaient sur
une contestation ou plutôt un refus total du monde occidental à travers
le modèle américain? Peut-on éviter en tout cas de redire, avec Jean
Paul II, que la mondialisation de l'économie doit s'accompagner d'une
mondialisation de la solidarité?", s'est interrogé le cardinal Louis-Marie
Billé.
Revenant sur les affaires de pédophilie qui ont touché l'Eglise ces
dernières années, le cardinal Billé a évoqué le procès de Mgr Pierre
Pican -condamné à trois mois de prison avec sursis pour non-dénonciation
d'atteintes sexuelles sur mineurs-, procès que "nous avons tous vécu
douloureusement", a-t-il souligné. "Je tiens à lui redire publiquement
notre solidarité dans l'épreuve".
Puis il s'est longuement arrêter sur les intrusions judiciaires
de Lyon : ... "Je veux m'arrêter sur ce qui s'est passé à l'Officialité
de Lyon et qui a été rendu public par d'autres instances que l'Officialité
elle-même. Une enquête canonique (portant en l'occurrence sur un membre
d'une congrégation religieuse) a été réclamée par un juge d'instruction,
qui a d'ailleurs envoyé des policiers, agissant sur commission rogatoire,
perquisitionner les locaux de l'Officialité."
" Je veux ici m'en tenir calmement aux enjeux, que je crois d'une
extrême gravité pour l'Église et pour le respect des consciences. L'Official
agissant en qualité de vicaire de l'évêque, n'est-ce pas notre activité
même de ministres du culte qui pourrait s'en trouver menacée ? Lorsqu'un
Official saura que ses notes et ses conclusions pourront être produites
impunément devant une juridiction pénale, il perdra la liberté d'action
qui lui est nécessaire. Il sera empêché. C'est bien la liberté du culte
qui est en cause."
" L'Église tient à collaborer à la manifestation de la vérité.
Mais comment peut-elle le faire si ses procédures propres ne peuvent
plus être appliquées ? La justice française ne saurait à la fois reprocher
à l'Église son inaction devant des crimes ou délits commis par les clercs
et venir bloquer le fonctionnement de sa justice interne quand elle
la met en œuvre. Ce n'est pas en niant délibérément le secret professionnel
des ministres du culte que la justice permettra à l'Église d'assumer
ses responsabilités et de collaborer à la manifestation de la vérité."
" Parmi les dossiers saisis à l'Officialité de Lyon, beaucoup ont
trait à des procès en reconnaissance de nullité de mariage. Ils contiennent
des confidences, qui touchent la vie la plus intime des personnes en
cause. Ils contiennent des informations données par des témoins qui
ne déposent qu'en raison de la garantie du secret. Comment accepter
que de telles confidences soient saisies et exploitées ? Comment accepter
qu'elles puissent être détournées ainsi de leur finalité propre ? Comment
accepter que la confiance absolue qui nous est faite soit trahie, confiance
de ceux qui acceptent de se livrer justement parce qu'ils savent que
nous ne nous livrerons pas ?"
" Il faudra bien que soient apportées des réponses à de telles
questions. Ou bien serions-nous amenés, dans telle ou telle situation,
à choisir l'objection de conscience et à en assumer les risques ? Je
n'ignore pas que le secret professionnel subit aujourd'hui de nombreuses
attaques, qu'il est souvent perçu comme créant des lieux de non-droit
permettant à certains privilégiés d'éluder leurs responsabilités ?"
" Comment nier d'ailleurs qu'il y ait des abus ? Comment nier qu'il
y ait un contrôle normal de l'institution judiciaire sur l'exercice
de ce secret ? Mais dans le secret professionnel, c'est fondamentalement
l'intérêt public, le bien commun de la société qui sont en cause. Le
secret professionnel préserve un espace de parole, de confiance pour
les personnes, espace qui garantit leur autonomie, indispensable au
fonctionnement même de la démocratie."
Le cardinal Billé a également évoqué la catéchèse -autre grand sujet
qui sera évoqué lors de l'assemblée-, en reconnaissant qu'elle traversait
"un temps de crise, voire même de rupture". "De plus en plus de jeunes
et d'adultes sont étrangers à la foi chrétienne, même parmi ceux qui
participent à la catéchèse", a-t-il affirmé.
Après le discours d'ouverture du cardinal Billé, une messe a été célébrée
en la basilique souterraine de Lourdes. 25.000 personnes, dont 10.000
choristes, y ont assisté, cette messe marquant aussi le centenaire de
la basilique du Rosaire.
Pour plus d'informations : Conférence
des Evêques de France
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