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15 mars 2014 - France
UNE DÉCISION DICTÉE PAR LA SAGESSE

Le " Conseil famille et société "des évêques de France a annulé la venue, le 19 mars, de la philosophe Fabienne Brugère à une réunion,des sites proches de l’extrême droite l'accusant d’être une « adepte » de la théoricienne du genre Judith Butler.

Une centaine de responsables diocésains de la pastorale familiale devait se réunir le 19 mars comme tous les ans pour une session de formation, sur le thème : « Prendre soin de l’autre ». Le programme, transmis aux participants il y a plus d’un mois, prévoyait des ateliers, ainsi que l’intervention du P. Vincent Leclercq sur les « liens familiaux » et de la philosophe Fabienne Brugère autour de « la dimension sociale du soin de l’autre ».

Une pétition contre la venue de cette chercheuse, professeur à l’université Bordeaux 3, a été lancée le 3 mars par le blog "Le Salon Beige", proche de l’extrême droite. Les initiateurs – anonymes – de cette « supplique à Mgr Pontier » reprochent à la philosophe d’être « une adepte de l’idéologie de Judith Butler », l’une des théoriciennes phares des études de genre.

« Cette invitation constitue un coup de poignard dans le dos », écrivaient-ils. Au total, cette pétition a recueilli 1.100 signatures et plusieurs évêques français ont reçu des lettres et des courriels, dont le nombre exact est inconnu.

Si Fabienne Brugère a bien étudié les ouvrages de Judith Butler, ses travaux n’entrent toutefois pas dans le champ des études de genre. La philosophe est l’une des spécialistes française du « care » , mot anglais utilisé pour désigner la réflexion sur la place du souci pour autrui.

Pour éviter les tensions et les remous qui pourraient entourer cette venue, le président du "Conseil famille et société", Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre, a décidé, le lundi 10 mars, d’annuler la participation de Fabienne Brugère à la session de formation, après avoir consulté les membres – clercs et laïcs – de son instance le week-end précédent. Les participants en ont été informés jeudi par courriel.

« Cette décision nous a été dictée par la sagesse, explique Mgr Brunin. Les conditions du dialogue ne sont pas réunies, comme l’ont montré les tensions et les remous qui ont entouré l'annonce de cette venue. Maintenir l’intervention aurait abouti à une crispation, qui aurait menacé la communion ecclésiale. »

Selon l’évêque du Havre, qui dénonce une « campagne de désinformation »,« tous les chrétiens ne sont pas mûrs pour s’engager dans une éthique de la rencontre et du dialogue telle que le pape François nous le recommande pourtant. »

Cette décision ne revient-elle pas à mettre le doigt dans un engrenage ? « Non, se défend Mgr Brunin. Notre rôle est toujours de faire dialoguer les chrétiens et les courants de pensée qui parcourent actuellement la société. Nous ne cédons pas sur cet objectif. »

Inquiet, un évêque s’interroge pourtant : « Où allons-nous, si nous renonçons, sous la pression de quelques groupuscules comme ceux-là, à inviter des gens qui ne pensent pas comme nous ? »

Selon plusieurs sources, d'autres évêques se sont inquiétés de la venue de la philosophe et ont alerté en ce sens l’évêque du Havre. Certains craignaient des manifestations à l’extérieur de la Conférence des évêques de France, ainsi que des protestations de la part de certains délégués de la pastorale familiale. D’autres ont au contraire insisté sur l’importance du dialogue : « Discuter avec des gens avec lesquels on n’est pas d’accord ne signifie pas avaliser leurs décisions », dit l’un d’entre eux.

« Nous faisons le choix de la patience et non de l’affrontement », souligne Mgr Brunin. Les organisateurs de la formation comptent remplacer l’intervention de la philosophe – dont l’épiscopat rappelle par ailleurs la qualité des travaux sur la sollicitude et le soutien – par une réflexion sur la question du « dialogue dans l’Église ».

La question pourrait également être abordée lors de la prochaine assemblée plénière de l’épiscopat, prévue à Lourdes du 8 au 11 avril. (source : AP)


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