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du 22 au 26 mars 2014 (semaine 13)
 

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26 mars 2014 - Syrie
POUR LAISSER LA GUERRE DERRIÈRE EUX


Quand Louis Bandak a fui les violences en Syrie, il a trouvé refuge dans le pays que son grand-père avait dû abandonner il y a 90 ans presque jour pour jour, la Turquie et demain, en transit vers l'Europe, il rejoindra le Canada.

Louis Bandak et sa famille ont rejoint la cohorte, de plus en plus grande, de ces chrétiens qui ont traversé la frontière au Nord pour rejoindre la Turquie et laisser derrière eux une guerre qui a déjà fait plus de 140.000 victimes. « Même si je n’y étais jamais allé, je ne m’y sens pas étranger. Ici aussi, c’est chez moi », affirme-t-il à l’entrée du monastère Mor Abrohom, un vestige du Ve siècle, à une cinquantaine de kilomètres au nord du dernier village syrien.

Si la plupart des réfugiés chrétiens ont pris la direction du Liban ou de la Jordanie, des pays avec lesquels ils ont souvent une proximité linguistique et culturelle, lui, avec quelques milliers a choisi la Turquie.

Pour beaucoup d’entre eux, il s’agit d’un retour aux – lointaines – origines, un siècle, 1915 ou 1917, après l’exode de 1924 quand leurs ancêtres fuyaient alors le climat hostile dans la Turquie de la Première Guerre mondiale et de l’entre-deux guerres.

Dans la mesure où l’ONU ne tient pas de comptabilité en fonction de la religion des uns et des autres, il est impossible de connaître le nombre exact de chrétiens réfugiés, mais selon Mark Ohanian, de Charités chrétiennes orthodoxes internationales, ils sont entre 300.000 et 500.000.

Si les Bandak ont quitté leur maison, c’est en partie parce que la communauté chrétienne, considérée comme un soutien du pouvoir de Bachar el-Assad, s’est sentie menacée par la rébellion. Les chrétiens, qui représentaient environ 10 % de la population du pays avant le conflit, s'étaient pourtant tenus à l’écart des affrontements entre des rebelles souvent sunnites, d’un côté et, de l’autre, Bachar el-Assad, qui appartient au clan alaouite, et ses alliés chiites. « Les chrétiens sont pris pour cible parce qu’ils sont vus comme des alliés d’Assad, mais aussi parce qu’ils représentent une cible naturelle pour les fondamentalistes », explique l’historien William Dalrymple, spécialiste des communautés chrétiennes du Moyen-Orient.

Jusqu’au déclenchement du conflit, la Syrie était un havre de paix relatif pour les chrétiens à l’image de ce que pouvait être l’ensemble du Moyen-Orient, plus tolérant il y a 50 ans, selon William Dalrymple. « Les chrétiens du Moyen-Orient vivent leur période de déclin la plus spectaculaire, et c’est irréversible », ajoute-t-il, en soulignant que l’Irak a perdu près de 70 % de sa population chrétienne depuis l’intervention américaine en 2003.

Louis Bandak a pris la décision de partir lorsque des combattants étrangers ont contrôlé ses papiers et l’ont accusé de collaboration avec l’État sur la seule foi de son nom à consonance non musulmane. « J’ai dit que j’étais un pauvre électricien, ils m’ont relâché. Je n’arrêtais pas de trembler, j’ai pensé à ce que deviendraient mes filles sans leur père », raconte-t-il.

Quelques valises de vêtements et un disque dur plein de photos sous les bras, le couple et leurs filles ont atterri à Midyat où ils vivotent avec environ 500 autres Syriens. Désormais, ils attendent un visa pour l’Allemagne. Louis Bandak est syriaque, l’une des Églises catholiques orientales, qui rassemble environ 180.000 fidèles.

Selon le président de la Fondation syriaque-orthodoxe d’Istanbul, Sait Susin, plus de 5.000 d’entre eux sont arrivés en Turquie puis, de là, sont partis en Europe – même si on ne peut pas connaître leur nombre exact compte tenu des conditions dans lesquelles ils transitent. En attendant son éventuel visa, Louis Bandak doit faire avec les rudiments de turc que lui a enseignés son grand-père, Barsom, qui avait pris le chemin de la Syrie le 24 février 1924. (source : ORJ)


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