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du 7 au 10 mai 2014 (semaine 19)
 

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10 mai 2014 - Libye
L'ÉGLISE DU SILENCE


Trois ans après l’intervention de l’Otan, le pays a sombré dans l’anarchie et la violence généralisée. L'insécurité règne pour l’ensemble de la population, les chrétiens, souvent originaires d’Afrique et d’Asie, font aussi l’objet de violences ciblées.

« Notre communauté se réduit comme peau de chagrin, nos vies sont suspendues à un fil… Survivrons-nous au milieu de ce chaos ? » Lorsque Mgr Dominique Rézeau est arrivé à Tripoli comme prêtre missionnaire, en décembre 2012, après une longue carrière de diplomate au service du Saint-Siège, tous les espoirs semblaient permis en Libye. Après quarante ans de dictature féroce, un vent de liberté soufflait sur les décombres.

Mais, aujourd’hui, la ferveur révolutionnaire a disparu. L’anarchie et la violence engloutissent chaque jour un peu plus le pays, livré aux milices, aux attentats et aux enlèvements quotidiens.

Venu renforcer la petite communauté franciscaine de Tripoli – deux Philippins, un Égyptien et un évêque italien –, Mgr Rézeau est aux premières loges pour témoigner. Les Africains subsahariens forment le gros de la population chrétienne en Libye. Pour la plupart sans travail dans ce pays de six millions d’habitants où l’activité économique reste atone depuis 2011

Après un séjour plus ou moins prolongé, certains gagnent les pays voisins ou l’Europe. D’autres périssent au fond de la Méditerranée après avoir chèrement payé leur place sur des radeaux de fortune.

Mieux lotis, les travailleurs philippins et indiens occupent des postes d’infirmiers dans les hôpitaux. « Nous nous déplaçons dans tout le pays pour célébrer avec eux, bien que ce soit de plus en plus difficile », explique le prêtre. Quant aux Européens, cadres dans les grandes compagnies pétrolières, ils ont quitté le pays en 2011 et ne sont pas revenus.

Le personnel diplomatique encore présent à Tripoli se terre dans des hôtels – la chancellerie de l’ambassade de France a été soufflée par une explosion l’an dernier – et incite les Occidentaux à quitter le pays.

Traditionnellement, la cohabitation entre les Libyens, à 100 % musulmans, et ces dizaines de milliers de chrétiens « importés » se déroulait sans problème. Il ny a pas d’hostilité antichrétienne dans la population. Mais la progression des groupes islamistes, absents durant la révolution de 2011, sème la peur et dissuade les habitants d’adresser la parole aux religieux. «

Sept jeunes travailleurs coptes, ont été retrouvés sur une plage de Cyrénaïque en février dernier. « Des hommes en armes les avaient enlevés après avoir vérifié qu’ils avaient une croix gravée sur leur poignet, puis les ont exécutés. »

Le jour suivant l’arrivée de Mgr Rézeau en Libye, fin 2012, l’église copte de Misrata a essuyé un tir de missile juste après l’office : deux fidèles tués. Malgré tout, le prêtre veut croire qu’une présence chrétienne en Libye a encore un sens. « Le drame de ce pays, au-delà des tribus et des milices qui s’entre-tuent, c’est l’indifférence générale. » (source : FPIC)


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