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14 mai 2014 - Chine
LES RELIGIONS LEUR SONT UN DÉFI


Ce qui vient de se passer dans le Zhejiang, les actions et les destructions décidées par le pouvoir chinois pourraient être le reflet d’une certaine peur, à savoir celle de ne pas contrôler tout groupe, surtout quand ce groupe est de nature religieuse.

Les autorités chinoises se méfient du pouvoir mobilisateur des religions auprès de peuples auxquels les autres dimensions de leur existence sont niées.

D'autant que le pouvoir des religions est ailleurs et hors de Chine. Elles ne peuvent être intégrées au Parti, même de loin. A l’évidence, les religions font partie des éléments de la société civile qui sont toutes à surveiller de très près.

Le pouvoir en place compte l’« infiltration religieuse en provenance de l’étranger » au nombre des quatre plus « sérieux défis » qui se posent à lui. Pékin ne s’en cache pas. Le 6 mai dernier, un département du gouvernement chinois, l’Académie chinoise des sciences sociales a publié un « Livre bleu » où sont détaillés les « défis les plus sérieux » qui se posent au pays, défis qui représentent autant de « menaces » pour « la sécurité nationale » du pays.

Le "Livre bleu" est coédité par l’Académie et l’Université des relations internationales, installée à Pékin et placée sous la supervision directe du ministère de la Sécurité d’Etat. Autant dire que sa publication reflète des voix très autorisées au sein des plus hautes sphères de l’administration.

Selon Wu Li, directeur adjoint de l’Institut d’études sur la Chine contemporaine, instance rattachée à l’Académie des sciences sociales, le Livre bleu « arrive à point nommé ». Sont ainsi mentionnés ces « défis » menaçant la sécurité de la Chine : l’exportation par les nations occidentales des idéaux démocratiques, l’hégémonie culturelle occidentale, la dissémination de l’information via Internet et les infiltrations religieuses.

« Des forces occidentales hostiles infiltrent les religions en Chine en utilisant des voies toujours plus variées et d’une manière toujours plus grande. Cela se fait en mettant en œuvre des moyens toujours plus subtils, que ce soit de manière ouverte ou secrète. Ces forces sont de nature fortement séditieuse et agissent par nature en sous-main », peut-on lire dans ce rapport. « Des infiltrations religieuses en provenance de l’étranger ont pénétré dans tous les domaines de la société chinoise », y est-il encore écrit.

Si le thème de l’influence néfaste venue de l’étranger par le biais de la religion ne constitue pas une nouveauté dans l’univers mental des dirigeants chinois, la publication de ce Livre bleu intervient dans un contexte particulier, caractérisé par un raidissement très net du pouvoir en place.

Alors que l’arrivée au pouvoir du président Xi Jinping en mars 2013 avait soulevé quelques espoirs du côté des cercles réformateurs chinois, force est de constater que ces espoirs ont été très rapidement déçus. Le New York Times a révélé en août dernier qu’au mois d’avril 2013, une circulaire interne au Parti communiste, le « Document n° 9 », avait été émise. Celle-ci établissait un état des lieux sur « la situation dans la sphère idéologique » et appelait à un resserrement du contrôle sur les voix les plus critiques dans la société civile.

Que ce soit au Tibet, où la multiplication des immolations par le feu de Tibétains bouddhistes rend compte du désespoir de cette communauté face à la colonisation humaine et culturelle chinoise, ou que ce soit au Xinjiang, où le surgissement d’actions terroristes de la part de Ouïghours témoigne, là aussi, de l’impasse dans laquelle se trouve acculée cette communauté identifiée à la fois par son appartenance ethnique et religieuse.

Dans le cas du christianisme, Ying Fuk-tsang, directeur du Centre d’études des religions et de la société chinoise à l’Université chinoise de Hongkong, explique à l’agence Ucanews que l’attitude des dirigeants chinois est ambivalente. A court terme, ils reconnaissent que la foi chrétienne et ses œuvres peuvent contribuer au développement d’une « société harmonieuse » ; mais, à long terme et sur le fond, ils s’en méfient et associent le christianisme à un outil occidental visant, par le biais d’« évolutions pacifiques », à saper les bases du pouvoir du Parti communiste.

L'expérience de l'histoire est là d'ailleurs pour le démontrer dans bien des cas. Les situation de l'Église comme celle issue du protestantisme doivent être analysées dans les processus à venir.

Pour le christianisme catholique, partout dans le monde – et cela demeure vrai à peu de chose près en Chine –, son universalité (avec ce que cela suppose de relations au-delà du cadre national), ses institutions (ses paroisses, ses séminaires, ses services sociaux et caritatifs, ses maisons d’édition), ses statuts (pour son clergé, séculier ou régulier) et ses cérémonies (à travers le culte et les sacrements) sont des réalités visibles et stables. L’ensemble forme un ensemble cohérent, qui appelle (ou au contraire repousse) l’adhésion et la participation de ses membres. Mais les autorités peuvent obtenir un certain "contrôle".

Les dirigeants communistes chinois ont tenté d'appliquer le même processus aux dénominations protestantes et celles-ci se sont trouvées organisées au sein du "Mouvement pour les trois autonomies" (autonomie de gouvernement, de finance et d’enseignement) par l’entremise du "Front uni," qui a la tutelle du Bureau des Affaires religieuses.

Mais l’explosion numérique des communautés protestantes s’est faite en-dehors de ce schéma. La plupart des bâtiments, des églises et des lieux de rencontres des chrétiens ont été construits sur la base d’initiative locale et sans la reconnaissance ou l’autorisation du gouvernement. Et l’on constate que la plupart des bâtiments et des églises, qui avaient été édifiés dans un style plutôt triomphal avant de subir l’assaut des bulldozers mandatés par les autorités, n’appartenaient au départ qu’à de très modestes communautés de croyants, qui rassemblaient pas plus de quelques dizaines de personnes se réunissant chez l’un ou l’autre, en-dehors de toute supervision officielle.

A l'inverse de la manière de faire des catholiques qui entretiennent plus de liens avec l’institution Eglise, les protestants se sont développés sur une base plus souple, plus légère et plus adaptable face aux exigences des autorités locales, à partir de petits groupes de prière, de partage de la Bible, d’études bibliques autour d’une vidéo diffusée dans le cercle domestique ou au bureau. Il n’est pas rare que des entrepreneurs chrétiens organisent dans leurs ateliers et usines des groupes de chrétiens où l’on prie et où l’on étudie la Bible dans l’enceinte même de l’entreprise.

Les réactions des autorités gouvernementales peuvent alors être très différentes d'une région à une autre. Un parti "monolithique" est difficile à comprendre pour ces deux raisons. La "psychologie" chinoise et la nature même de l'ensemble des mouvements religieux.
(source : Mepasie)

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