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du 8 au 11 avril 2015 (semaine 15)
 


- 11 avril
2015 - Ukraine
DES INCOMPRÉHENSIONS ENTRE LE PAPE ET LES GRÉCO-CATHOLIQUES

Comment définir l'actuel conflit en Ukraine ? «Guerre fratricide» ou «agression par la Russie» ? Le choix des mots a son importance et ceux qu'emploie la diplomatie vaticane ne plaisent pas du tout à l'Eglise grecque-catholique d'Ukraine.

Et cette incompréhension est très active notamment aux Etats-Unis où vit depuis des décennies une importante communauté d'origine ukrainienne, qui d'ailleurs a marqué le retour des responsables grécocatholiques américains sur la terre d'Ukraine.

Même dans les chancelleries européennes, on note la différence d'intensité des interventions du Saint-Siège quand il s'agissait de la guerre en Syrie et aujourd'hui dans le conflit ukrainien.

Dans le premier cas, le Pape a pris position avec force contre l'intervention armée que projetaient des Etats-Unis en Syrie. Il a même organisé une veillée de prière place Saint-Pierre le 7 septembre 2013. Dans le cas de l'Ukraine au contraire, il n'a jamais pris la parole pour arrêter la Russie, mais a toujours semblé vouloir mettre les deux pays, Russie et Ukraine, sur le même plan. En fait la "canonicité" du Patriarcat de Moscou sur la terre ukrainienne est millénaire, à commencer par la baptême des Russ du prince Vladimir à Kiev.

Le Pape n'a jamais pris la parole pour arrêter la Russie, mais a toujours semblé vouloir mettre les deux pays, Russie et Ukraine, sur le même plan.

Fidèles à Rome, les grecs-catholiques ukrainiens n'en ont pas moins vivement réagi après l'appel à la paix du Souverain pontife, lancé à la fin de l'audience générale du mercredi 4 février. «Demandons au Seigneur que cesse au plus vite cette horrible violence fratricide», avait dit le Pape, et il avait ajouté : «Je pense à vous, frères et sœurs ukrainiens. Car enfin, il s'agit d'une guerre entre chrétiens ! Vous avez tous reçu le même baptême. Vous vous battez entre chrétiens. Réfléchissez à ce scandale».

Pour les Ukrainiens gréco-catholiques, il est inacceptable de parler de «guerre fratricide» plutôt que d'agression russe.

Sur les 44 millions d'habitants de l'Ukraine, les grecs-catholiques fidèles à Rome sont environ 5 millions, auxquels s'ajoutent les catholiques de rite latin et les Ruthènes. Pendant 50 ans, jusqu'en 1989, ils ont vécu leur foi dans une quasi-clandestinité.

Aujourd'hui, les grec-catholiques de Kiev, sont de nouveau persécutés en Crimée. L'Eglise grecque-catholique est appelée «uniate» de façon péjorative par les orthodoxes de Moscou depuis qu'elle a reconnu l'autorité du Saint-Siège en 1596 lors de l'Union de Brest-Litovsk (ralliement à Rome des orthodoxes de l'ouest de la Pologne d'alors).

Depuis le début du conflit, les catholiques ukrainiens ont pris des positions nationalistes très hostiles à Moscou. C'est pourquoi ils ne supportent pas l'attitude qui consiste, selon eux, à mettre sur le même plan les agresseurs et les agressés. Anatoly Babinski, directeur d'une revue grecque-catholique a sévèrement critiqué l'appel du Pape, qui montre, selon lui, son ignorance de la situation en Ukraine et l'influence qu'exercent sur lui les pro-russes du Vatican.

Un soupçon sans doute accentué par le patriarche orthodoxe de Moscou, Cyrille 1er qui, le 3 février, la veille de l'appel de François, avait critiqué le nationalisme de l'Eglise grecque-catholique, louant au contraire l'équilibre de la position du Saint-Siège.

Le 21 décembre dernier, Mgr Sviatoslav Chevtchouk, archevêque majeur de Kiev, avait d'ailleurs lancé un cri d'alarme au sujet de la Crimée et des autres territoires annexés par la Russie. «La liberté religieuse n'y a déjà plus cours», avait-il déclaré

En effet, depuis le 1er janvier, est entrée en vigueur dans tous les territoires de l'Ukraine revenus dans l'orbite de Moscou une loi qui oblige toutes les Eglises et confessions religieuses autres que l'orthodoxie russe à s'enregistrer auprès des autorités.

A la suite de toutes ces réactions, le Saint-Siège a dû redresser la barre. Le P. Federico Lombardi, porte-parole du Saint-Siège a déclaré le 10 février : «Face aux diverses interprétations qui ont été données des paroles du Pape, spécialement celles du mercredi 4 février, je tiens à préciser qu'il a toujours tenu à s'adresser à toutes les parties prenantes, faisant confiance à l'effort de chacune d'entre elles pour appliquer les décisions prises d'un commun accord et rappelant le principe du droit international auquel Saint-Siège s'est souvent référé depuis le début de la crise».

Le Pape veut rester au-dessus des parties et en même temps soutenir les efforts de la communauté internationale pour trouver une solution négociée à la crise ukrainienne.

L'Église qui est à Moscou et l'Église qui est à Kiev doivent vivre une difficile communion, que ne peut résoudre la diplomatie. (source
: FPIC)

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