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du 15 au 18 avril 2015 (semaine 16)
 


- 18 avril
2015
EST-CE UN TOURNANT DANS LE PONTIFICAT

Cela fait deux ans qu’il est Pape et il ne lui était jamais arrivé d’être attaqué aussi violemment qu’il l’est aujourd’hui par la Turquie, parce qu’il a dénoncé le génocide arménien.

Jusqu’à ces jours derniers, ne suscitait que le respect et l’admiration vient d’être rompu par le premier véritable "casus belli". Celui-ci a éclaté à propos d’un massacre, perpétré il y a de cela un siècle, que le pape François a eu l’audace d’appeler par son nom, en employant le mot tabou de "génocide". Il l’a rapproché de tous les autres anéantissements systématiques, programmés, de peuples et de religions qui ont marqué le XXème siècle et qui caractérisent également, désormais, le XXIème.

Pour le vaticaniste Sandro Magister, on peut difficilement nier qu’il s’agit là d’un tournant dans le pontificat.

En effet, il y a seulement quelques mois de cela, à la fin du mois de novembre, François s’est rendu en Turquie et il n’a pas dit un mot à propos des Arméniens. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi il avait gardé le silence, il a répondu qu’il donnait davantage d’importance aux petits pas, comme celui que le président Recep Tayyip Erdogan avait effectué, l’année précédente, en écrivant une lettre dans laquelle il exprimait sa tristesse à ce sujet.

Erdogan avait demandé au Pape de ne pas parler du génocide et le Pape avait respecté la consigne. Il y a à peine une vingtaine de pays dans le monde qui désignent explicitement par le terme de "génocide" l’extermination des Arméniens chrétiens. Et ils le font avec toutes les précautions voulues pour ne pas irriter un allié, réel ou potentiel, auquel ils tiennent trop.

Mais lorsque le Pape François a inscrit dans son agenda 2015, à la date du premier dimanche de Pâques, l’évocation, à Saint-Pierre, du souvenir du massacre des Arméniens cent ans plus tôt, cela signifiait qu’il allait changer de démarche. Il ne pouvait pas parler moins que ses prédécesseurs ne l’avaient fait.

En effet Jean-Paul II avait déjà employé le terme de génocide pour qualifier cette tragédie, le 9 novembre 2000 puis à nouveau le 27 septembre 2001, dans deux déclarations solennelles signées conjointement avec le "catholicos" Karékine II, la première à Rome et la seconde dans la capitale de l'Arménie, où il s’était rendu alors que le monde était bouleversé par la destruction des Twin Towers.

A Erevan, au mémorial de l’extermination, il avait prononcé une prière pleine d’affliction dans laquelle il avait employé, pour définir la tragédie, la même expression que les Arméniens : "Metz Yeghérn", le grand mal.

À cette époque-là aussi, ces mots étaient tabous, mais les autorités turques réagirent avec modération.

Benoît XVI évoqua également le "Metz Yeghérn" sans susciter de réactions lorsque, le 20 mars 2006, il reçut le patriarche des Arméniens catholiques. En revanche il y eut une explosion de réactions bruyantes contre lui quelques mois plus tard, lorsque, à Ratisbonne, il dévoila les racines violentes de la religion musulmane.

Dimanche dernier, le pape François aurait pu s’exprimer de manière minimaliste. Au contraire, et c’est là que réside la nouveauté, il a été plus loin, beaucoup plus loin.

Non seulement il a placé le génocide des Arméniens en tête des autres génocides du siècle dernier, mais il a dressé la liste de ceux-ci, l’un après l’autre, jusqu’à ceux qui s’accomplissent encore actuellement, au détriment d’un grand nombre de gens qui sont "persécutés, exilés, assassinés, décapités uniquement parce qu’ils sont chrétiens", qu’il s’agisse de catholiques ou d’orthodoxes, de syriaques, d’assyriens, de chaldéens, ou de grecs.

Comme il y a cent ans, a-t-il déclaré, "on a l’impression que l'humanité ne parvient pas à arrêter de verser du sang innocent".

Les réactions turques ont été virulentes, les chancelleries occidentales ont été évasives. " Pour François, c’est la fin de la tranquillité, en ce domaine ", estime Sandro Magister. (source : Chiesa)

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