Pour vivre au rythme de l'Eglise universelle.
FlashPress - Infocatho
du 12 au 14 avril 2008 (semaine 16)
 

-
2008-04-14 -
L'ÉGLISE OUBLIERAIT-ELLE L'AMÉRIQUE LATINE ?


Le cardinal hondurien Oscar Rodriguez Maradiaga estime que le Vatican, comme le reste du monde, n’est pas assez attentif à la situation en Amérique latine, allant jusqu'à dire qu'il est temps qu’un Pape du tiers-monde soit élu à la tête de l’Eglise.

Dans un livre d’entretiens avec le journaliste français Eric Valmir "De la difficulté d’évoquer Dieu dans un monde qui pense ne pas en avoir besoin" qu'il vient de publierà Paris le 14 avril, l'archevêque de Tegucigalpa qui est également président de la Caritas internationale, , révèle que, lors d’une audience avec Benoît XVI, il s’était “permis de lui faire observer que l’Amérique latine était sous-représentée dans la curie romaine alors que la moitié des catholiques du monde habite le continent sud-américain“.

“La présence européenne est trop importante au Vatican. Et Rome doit avoir une perception de la réalité géopolitique de notre continent", écrit-il. "Tous les regards se tournent vers la Chine et l’Inde pour toutes les questions économiques et commerciales. D’un point de vue religieux, les relations avec l’islam occupent les esprits. Mais l’Amérique latine, tout le monde s’en moque. C’est comme si elle n’existait pas. Le tiers-monde, c’est toujours pareil, c’est lassant."

A la question de savoir s’il a le sentiment d’être écouté au Vatican, il répond tout de même “qu’au prix de longues conversations, nous avançons“ notamment auprès du Conseil pontifical Justice et Paix avec lequel il travaille dans son action de lobbying auprès des pays du G8 pour la lutte contre la pauvreté.

" Pour l’heure, les origines du Pape restent essentiellement européennes, mais à l’avenir pourquoi le souverain pontife ne viendrait-il pas d’Amérique latine? La moitié des catholiques de la planète vivent ici. Un Pape qui porte les préoccupations du tiers-monde, la symbolique serait forte.... Ce n’est pas la même chose de parler de la pauvreté… et de la vivre. Un Pape doté de cette expérience aurait une faculté de dialogue pour peser sur les négociations Nord-Sud."

Il révèle que lors de l’élection de Benoît XVI l’idée d’un Pape du tiers-monde et éventuellement d’un pape d’Amérique du Sud était dans les esprits, mais l'on sait également que certains cardinaux hésitaient à élire un Latino-américain, étant donné que la présence de cardinaux de forte stature sont indispensables dans ce continent instable où l'Église est affrontée à de graves défis.

D'ailleurs ce n'est pas sans raison que Benoît XVI soit venu à Aparecida en mai 2007, éveiller bon nombre d'évêques aux réalités à venir. "Le monde d’aujourd’hui nous provoque, souligne le cardinal Maradiaga, par ses nouveautés et ses contradictions; notre réponse doit mettre en phase tradition et innovation“

Il regrette la discrétion de Benoît XVI dans le monde des médias :" une donnée que nous ne devons pas négliger"... "Le cardinal Ratzinger n’a jamais été un grand communicant. Il met sa vie au service de la doctrine. Ses homélies sont simples, précises et denses“.

Il regrette également que Benoît XI ait déconcerté une partie du clergé latino-américain“ du fait de “l’absence de nuances dans son message à l’égard de l’héritage de la théologie de la libération. L’engagement social de l’Eglise sud-américaine “n’est ni politique, ni partisan, comme le laissent entendre les soupçons du Vatican“. Et d’ajouter: “c’est une grande méconnaissance du terrain que d’asséner des affirmations aussi décalées. "... " Les grandes lignes de Vatican II restent méconnues“ et, “plus grave encore, il en manque l’application“.

Rappelons que le
cardinal Oscar Maradiaga fut un temps président du CELAM, la Conférence épiscopale d’Amérique latine et des Caraïbes, et qu'il est connu pour ses positions sociales avancées et qu'il avait salué les paroles de Benoît XVI à Aparecida lorsqu'il avait reconnu la valeur de la théologie de la libération et son apport pour la défense des pauvres, estimant que le cardinal Ratzinger l’avait encouragée, prenant le contrepoids du cardinal brésilien Hummes, qui prétend que la théologie de la libération " qui utilise l’analyse marxiste, en soutenant qu'elle est une ligne d’analyse scientifique, alors qu’au contraire, elle est idéologique et athée", dit le cardinal Hummes.

A cette époque, le président des évêques d’Amérique latine n'hésitait pas à déclarer que le cardinal Ratzinger « a toujours encouragé la théologie de la libération ». « Il a seulement discuté quelques problèmes doctrinaux », mais qui « ne sont pas le cœur » de cette théologie.

Au sujet de l’éventuelle béatification d’Oscar Romero, le cardinal Maradiaga avait révélé que Benoît XVI avait fait « une enquête approfondie sur ses écrits » et qu’il n’avait « rien trouvé de dangereux pour la doctrine " et qu'en 2007 Benoît XVI avait qualifié l’archevêque de San Salvador, Oscar Romero, assassiné en 1980 alors qu’il célébrait la messe, de « grand témoin de la foi ». Dans l'avion qui le menait à Aparecida, le Pape parlé du « problème » que pose sa cause en béatification, car « certains groupes politiques veulent en faire leur porte-drapeaux. (source : Apic)

Retour aux dépèches