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02.10.03 - Europe : Il suffirait d'ajouter un mot.

Le pape Jean Paul II croit possible l'inscription d'une référence aux valeurs du christianisme dans la Constitution de l'Europe élargie car "au moins onze pays sont d'accord pour modifier le projet de texte en ce sens".

C'est ce qu'a affirmé le mercredi 1er octobre le porte-parole du Vatican. "Au moins onze nations sont d'accord pour une modification du texte (de la Constitution) dans le sens souhaité par Jean Paul II", a déclaré Joaquin Navarro-Valls dans un entretien accordé à la deuxième chaîne de la Rai, le service public audiovisuel italien qui sera diffusé samedi. "Il suffirait d'ajouter les mots -"principalement le christianisme"- dans le passage du préambule du texte qui fait mention de l'héritage culturel et religieux de l'Europe", a-t-il expliqué.

Les chefs d'Etat et de gouvernement des quinze membres de l'Union européenne et leurs homologues des dix nouveaux pays adhérents se retrouvent samedi à Rome pour un sommet extraordinaire au cours duquel sera lancée la négociation sur le projet de Constitution de l'europe élargie. Le projet de texte difficilement élaboré par la Convention présidée par le Français Valery Giscard d'Estaing ne fait pas référence aux racines chrétiennes de l'Europe faute d'accord sur cette demande. Quatre pays seulement --l'Italie, l'Espagne, l'Irlande et la Pologne-- défendent l'inscription de cette référence réclamée par Jean Paul II, a précisé le président en exercice de l'UE, l'Italien Silvio Berlusconi.

Le président du Conseil italien aurait promis à Jean-Paul II de demander à ses partenaires européens une référence aux valeurs chrétiennes dans le futur texte de la Constitution européenne. " Nous représenterons cette demande, mais avec réalisme, je ne crois pas qu'elle sera acceptée par les 25 pays ", a-t-il annoncé puisque seuls l'Espagne, l'Italie, l'Irlande et la Pologne ont défendu cette référence lors de la rédaction du projet de Constitution. Il semble que ce réalisme sera de se référer à la majorité.

Tout l'été, dans la lignée de son exhortation apostolique "Ecclesia in Europa" publiée le 28 juin, Jean-Paul II avait plaidé une dizaine de fois en deux mois pour que l'Union mentionne l'héritage chrétien de l'Europe. Pas un Angélus ni une audience sans que le Pape ne rappelle sa demande. Le 13 juillet, il dénonçait ainsi une "apostasie silencieuse" à travers une "tentative" de vouloir construire une Europe "sans Dieu et sans Christ". Le 24 août, il rappelait que "l'Église catholique est convaincue que l'Évangile du Christ, qui a constitué un élément unificateur des peuples européens durant des siècles, demeure encore aujourd'hui une source inépuisable de spiritualité et de fraternité".

Pourtant, en précisant que l'Union s'inspire "des héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe", le projet présenté en juin dernier à Thessalonique par Valéry Giscard d'Estaing constituait déjà une avancée notable aux yeux de beaucoup par rapport au texte de la Charte européenne des droits fondamentaux. Dans un premier temps, celui-ci mentionnait "les civilisations helléniques et romaines" et les "courants philosophiques des Lumières", alors que le christianisme s'intégrait à un elliptique "élan spirituel qui a parcouru l'Europe". Face au tollé suscité par cette formulation, la Convention en revint sagement aux "héritages culturels, religieux et humanistes de l'Europe".

Adoptée en décembre 2001 à Nice, elle excluait en effet toute référence religieuse, ou plutôt l'incluait dans la formule du "patrimoine spirituel et moral" de l'Union. Aussi, lors des travaux de la Convention sur l'avenir institutionnel de l'Union, les Églises s'étaient-elles mobilisées. Trois points les préoccupaient : le maintien et le respect de leurs statuts nationaux spécifiques, la mise en place d'une structure de dialogue entre les instances de l'Union et les religions et la reconnaissance européenne des religions comme "institutions", et pas uniquement comme pratique individuelle ou collective. Sur tous ces sujets, le projet de Constitution leur a donné finalement satisfaction.

Début septembre, les évêques polonais déclaraient : "Nous attendons que le texte définitif prenne en compte l'héritage religieux, chrétien en particulier, de notre continent", écrivaient-ils à Silvio Berlusconi. Le 22 septembre, c'était autour de la Commission des épiscopats de la Communauté européenne, la COMECE, de lui écrire : une référence au christianisme dans le Préambule "compléterait la Constitution en évoquant explicitement ce que nombre de citoyens reconnaissent comme la source des valeurs qui fondent le projet européen". Le patriarche orthodoxe de Moscou et le patriarche oecuménique Bartholomée I, ont fait de claires déclarations dans ce sens.

Mais du côté des autres confessions chrétiennes, les voix sont loin d'être aussi catégoriques. Réunie fin juin et début juillet à Trondheim (Norvège) l'assemblée générale de la Conférence des Églises européennes, la KEK, qui rassemble protestants et orthodoxes, n'a pas approuvé la demande d'inclure dans la Constitution européenne une référence explicite à l'héritage chrétien.

Seul le Conseil œcuménique des Églises a demandé, le 1er septembre, que "le rôle central du christianisme et les contributions d'autres religions" à l'histoire et à la civilisation européenne soient reconnus dans la Constitution. "C'est un fait de l'histoire que le christianisme a joué un rôle immense, un rôle central, dans l'histoire de l'Europe", a souligné le catholicos arménien Aram Ier de Cilicie, président du Comité central du COE.

Le 24 septembre, à Strasbourg, le Parlement européen a rejeté par 238 voix contre, 211 en faveur et 15 abstentions, un amendement du Parti populaire européen (PPE) demandant d'insérer une référence explicite aux racines judéo-chrétiennes. Un vote serré où le parti démocrate chrétien européen n'a pas réussi à faire le plein de ses voix. (source : vis/apic)

Pour plus d'informations : COMECE

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