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du 12 au 14 février 2006 (semaine 07)
 

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2006-02-14 -
L'ARCHEVÊQUE DE PARIS ÉVOQUE LES CARICATURES DANOISES.

L’archevêque de Paris a voulu répondre à ces deux questions actuelles : "Comment réagir en croyants devant l’affaire des caricatures qui agite le monde musulman. Doit-on admettre toute caricature au nom de la liberté d’expression ?"

"Il est bon de réfléchir à l’histoire culturelle de nos pays," dit Mgr André VingtTrois, en introduisant sa réflexion. "Une manière de dérision à l’égard des institutions appartient à la tradition de la culture occidentale, en tout cas depuis le 17è siècle, un peu avant même, si on veut inclure Rabelais dans ce mode d’expression. Une certaine forme de contre-pouvoir, et donc d’expression de liberté, s’est manifestée à travers le genre littéraire de la caricature, caricature visuelle comme pour les affaires qui nous occupent ou caricature écrite, romans satiriques, etc."

" Dans notre société occidentale, ce fut un moyen d’exprimer une réaction qui ne trouvait pas son mode d’expression dans les outils habituels. Cela peut avoir des effets pervers et cela peut avoir des effets bénéfiques, tout dépend de la manière dont les différents éléments de la société agissent l’un par rapport à l’autre. On sait très bien, par exemple, que, au moment de la Fronde avec les Mazarinades, aussi bien que dans les décennies qui ont précédé la Révolution française, les pamphlets ont joué un rôle important dans la constitution de l’opinion publique.

" Il ne s’agit donc pas d’un genre anodin ou insignifiant. Les Français, - je parle des Français puisque nous sommes en France, je pourrais dire la même chose d’autres peuples -, sont capables de lire ou de voir des productions de ce genre avec une distance historique. Ils sont capables de rigoler quand c’est drôle sans pour autant prendre tout cela au pied de la lettre. Mais cette attitude fait partie d’une tradition culturelle progressivement établie chez nous.

" Dans le cas qui nous occupe se pose une autre question : comment vivre, comment nourrir une relation que nous jugerions saine, que nous jugerions équilibrée avec l’islam et avec les modes d’expression les plus fondamentalistes de l’islam ? Le sentiment prédomine que l’on n’a pas trouvé encore les moyens d’entrer dans cette communication.

" On pourrait dire d’une certaine façon, que du point de vue culturel, nous sommes dans une question de choix tactique. Si certains sont convaincus que notre mode de vie est le meilleur et que, par conséquent, la voie du progrès serait d’amener des populations arriérées à rejoindre notre monde culturel, quelle est la meilleure tactique pour y parvenir ? Est-ce la provocation ?

" Dans cette affaire au contraire, le but principal du jeu n’était pas d’associer des gens à un mouvement culturel intérieur, c’était de poser un acte de provocation. N’y a-t-il pas d’autres approches à employer ? Nous pourrions par exemple miser davantage sur la capacité d’évolution d’un certain nombre de groupes islamiques à travers le contact et le dialogue.

" Un troisième aspect de cette affaire est l’aspect purement financier. Un certain nombre d’organes de presse vivent à la limite de leurs moyens ; tout ce qui peut leur faire vendre du papier est alors du pain béni.

" On ne voit vraiment pas quel est l’objectif poursuivi par ce genre de campagne, le résultat en tout cas de cette attitude provocatrice est de susciter un débat faux. Le débat est faux parce qu’on place la question sur le terrain d’une opposition entre le respect des croyances et la liberté d’expression, comme si on était devant deux termes comparables.

" En fait, ce qui est en cause n’est pas la liberté d’expression, c’est la liberté de manipulation. Si chaque fois que l’on émet une critique sur une production littéraire, artistique ou médiatique, on se trouvait accusé de vouloir supprimer la liberté d’expression, nous serions devant un pouvoir (celui de la presse) qui viserait à être totalitaire. (source : diocèse de Paris)

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