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du 19 au 21 mars 2006 (semaine 12)
 

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2006-03-21 - Indonésie
RÉFORMER LE CONCEPT MÉDIÉVAL DE LA GUERRE SAINTE.

Le recteur de l’Université islamique d’Etat de Djakarta appelle les responsables religieux musulmans à reformuler le concept de djihad ou "guerre sainte". Les oulémas doivent en effet être présents sur un front "idéologique" pour combattre les islamistes.

Depuis quelques mois, le gouvernement indonésien est engagé dans la lutte contre le terrorisme. Si, selon les responsables gouvernementaux, c’est bien la police qui est chargée de la lutte physique contre les terroristes, les oulémas doivent être présents sur un autre front, le front "idéologique".

En septembre dernier, une Fondation pour la prévention du crime en Indonésie a ainsi été fondée. Les 27 et 28 février, cet organisme officiel a réuni trois cents personnes, venues de 43 pays, pour un colloque intitulé : "Bâtir une coopération internationale contre le terrorisme : se concentrer sur les attentats-suicide comme symptômes du terrorisme". Les débats ont été introduits par le président de la république lui-même, Susilo Bambang Yudhoyono.

Le recteur de l’Université islamique d’Etat de Djakarta, Azyumardi Azra, a développé l’idée qu'il était "nécessaire pour les oulémas et les autres responsables musulmans de reformuler, en une version plus actuelle, le concept de djihad". Si cela n’est pas fait, a-t-il expliqué, le djihad "sera et pourra, comme c’est la tendance aujourd’hui, être confondu avec le terrorisme".

A la base, a rappelé le professeur, le djihad désigne cette conduite de l’individu qui le mène à faire de son mieux pour parvenir à une vie meilleure, que ce soit en son for intérieur ou dans sa vie sociale. Il s'agit d'une démarche spirituelle et matérielle, dans ce monde et dans l’autre monde.

Dans le contexte du terrorisme actuel, "il y a urgence", pour les penseurs de l’islam, "à repenser, réinterpréter et reformuler" une certaine compréhension du djihad, portée par une lecture médiévale et classique du Coran. Quant aux exemples de détournement du concept de djihad depuis l’indépendance de l’Indonésie, Azyumardi Azra a cité les rébellions qu’ont connu, dès la fin des années 1950, des régions comme Java-Ouest, Célèbes-Sud et Aceh, où l’objectif était de transformer la République unitaire d’Indonésie en République islamique.

Le professeur a cité à ce propos les Laskar Jihad, actifs aux Moluques contre la communauté chrétienne, ou encore le Front des défenseurs de l’islam (FPI, Front Pembela Islam), connu pour ses descentes contre les bars, discothèques et autres lieux publics où, selon son chef, Habib Riziq Shihab, la police ne fait pas respecter la loi.

Les dirigeants des grandes organisations musulmanes ont conseillé aux Indonésiens désireux de partir pour le djihad en Irak, en Afghanistan ou en Palestine, de ne pas aller se battre, mais plutôt d’organiser des envois de médicaments et de denrées alimentaires au profit des populations de ces zones de conflit. 

A propos des attentats-suicide, le professeur a précisé que ce phénomène était complexe et ne pouvait pas être relié uniquement à une compréhension erronée du djihad. D’autres éléments jouent, notamment "la désorientation et la dislocation croissantes des couches les plus vulnérables de la société, en particulier les jeunes".

Pour l’inspecteur général de la police Gories Mere, de religion catholique, la seule application de la loi ne peut suffire à éradiquer le phénomène des attentats-suicide. Tous les responsables religieux du pays doivent s’impliquer dans cette question, afin d’empêcher que des personnes
passent à l’action. (source : Eglises d'Asie-EDA)

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